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Intervention de Christian Paul

Réunion du 29 octobre 2008 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Paul :

La crise du système des comptes sociaux n'est pas anticipée par le budget de la sécurité sociale pour 2009. Monsieur Woerth, madame Bachelot, vous nous présentez un budget hors-sol et hors du temps, pâle répétition des années précédentes, comme si la crise mondiale épargnait notre système de protection sociale.

Deux conséquences s'enchaînent et elles sont ravageuses. Il y a, d'une part, la crise de financement, qui nous occupe plus particulièrement aujourd'hui. Dans ce domaine, l'imprévoyance précède l'austérité et la privatisation de la couverture maladie. Cette crainte ancienne prend aujourd'hui corps, et l'augmentation des assurances complémentaires sera un des symptômes de ce mal.

Vos prévisions de recettes, monsieur le ministre, sous-estiment totalement l'impact du krach financier et de la dépression économique. Or l'aggravation inéluctable des déficits, si elle n'est pas anticipée, se traduira par une mise en danger structurelle de l'assurance maladie, chargée désormais d'une dette sans limite. Et nous prenons date.

En se condamnant à l'impuissance, le Gouvernement a renoncé à une stratégie plus juste de prélèvements qui aurait, par exemple, conduit à assujettir aux cotisations salariales des revenus qui en sont jusqu'ici exonérés, en premier lieu, bien sûr, les stock-options et les parachutes dorés. (Approbation sur les bancs du groupe SRC.). Il aurait également été possible de remettre à plat, sans tabou, les exonérations de cotisations sociales. Mais vous préférez un changement structurel du prélèvement, jusqu'à présent progressif et redistributif, mais condamné à l'être de moins en moins dans les années qui viennent.

La crise de l'assurance maladie se prolonge enfin au sein du système hospitalier, dont les 750 millions d'euros de déficit tétanisent l'action et les possibilités de réforme.

La seconde conséquence, tout aussi ravageuse, est la régression de l'offre de soins. Les inégalités devant l'offre de soins sont croissantes, mais rien dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne répond au douloureux problème de la désertification médicale ni aux enjeux de santé publique que la précarité amplifie. La réorganisation de l'offre de soins se borne jusqu'ici à des mesures autoritaires de restructuration, qui ont déstabilisé les territoires et dont vous faites, madame la ministre, votre marque de fabrique. Il est plus que temps d'en finir avec une politique de cette nature.

Vous nous promettez le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires ». Fort bien, mais selon quel calendrier ? Aucun député de notre groupe n'en est informé. Nous débattrons le moment venu de ce projet paré pour l'heure de toutes les vertus, mais dont nous avons dans l'idée qu'il contient des remèdes bien tièdes et que nous essayerons donc d'amender.

Il faut en finir avec cette interminable transition et passer désormais à l'action. Car 5 millions de Français au moins se soignent mal malgré la CMU. La pauvreté, c'est d'abord, pour de plus en plus de nos concitoyens qui ne se soignent qu'en urgence, c'est-à-dire trop tard, être mal loti face à la santé et ignorer la prévention. Un tiers des Français ont retardé ces dernières années le moment de se faire soigner, quand il n'y ont pas tout simplement renoncé, pour des raisons financières.

Les professionnels de santé sont eux aussi déstabilisés. Je ne parle pas ici d'une minorité dont les privilèges scandaleux sont encore intacts et auxquels il faudra bien s'attaquer ; je parle des professionnels de santé qui sont sur tous les fronts, à la ville comme à la campagne, là où la démographie est déséquilibrée. Je pense aux professionnels de l'hôpital, qui subissent la pression de déficits pour lesquels vous n'apportez pas de réponse. Je pense aussi aux pharmaciens, profession jusqu'ici protégée en apparence mais qui a tout à craindre d'une marchandisation offensive qui ne peut aboutir qu'à des restructurations signant la fin d'un service de proximité.

Je pense enfin aux obstacles géographiques et financiers qui se sont accumulés entre les Français et l'offre de soins, ou aux restructurations hospitalières qui aggravent ces obstacles géographiques. Vous nous dites, madame la ministre, qu'il n'y a pas de carte hospitalière. Mais c'est gravissime, car cela signifie que vous ne savez pas où vous voulez aller ! Je préférerais donc que vous assumiez cette carte plutôt que de la garder cachée dans les placards de votre ministère et des ARH, et que nous en discutions, quitte à être en désaccord.

Je vous l'ai signalé récemment à propos d'un cas précis, mais je m'étais promis, madame la ministre, de vous redire que votre ministère et votre entourage font preuve d'une méconnaissance totale des réalités hospitalières et surtout de l'impact des décisions que vous prenez.

Bref, vous pensez que la protection sociale et l'assurance maladie coûtent trop cher. Vous êtes tentés par la privatisation…

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