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Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 7 mai 2008 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur les langues régionales et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce débat trop longtemps repoussé a enfin lieu ! C'est un premier succès pour celles et ceux qui, des décennies durant, ont résisté à une conception réductrice des questions linguistiques. Résistance qui renvoie fondamentalement à deux conceptions opposées de l'organisation sociale : l'une marquée par les logiques de domination et de hiérarchisation, l'autre par celles de solidarité, de partage, de respect mutuel, de tolérance.

Cette avancée marque l'évolution d'une opinion qui adhère plus largement à l'idée que l'universalité de la culture n'est nullement incompatible avec la diversité de ses sources et la spécificité des individus, des groupes et des nations dont elle est l'expression. Le refus de toute hiérarchie normative a grandi ; il a renforcé l'exigence d'une création permanente fondée sur le respect et la valorisation de la diversité des expériences, des savoirs et de la fertilité des individus et des groupes qui font société. C'est de cette évolution que témoigne la transformation, en 2002, sans la moindre polémique, de la délégation générale à la langue française en délégation générale à la langue française et aux langues de France ; et c'est dans cette perspective qu'il convient d'aborder sereinement le débat sur les langues de France, leur reconnaissance par la République et leur place au sein de celle-ci.

Le plurilinguisme est une expression de la richesse de la diversité humaine. Cette perspective doit conduire la France à accepter sa diversité linguistique historique et, plus encore, à en faire un atout. Il convient donc, non seulement de la défendre, mais aussi de la promouvoir, dans l'espace privé comme dans l'espace public.

Pour être sincère, cette volonté exige, au-delà d'une nécessaire modification constitutionnelle, une loi donnant aux langues de France un statut et définissant le cadre de leur promotion. À défaut, c'est une part de notre patrimoine culturel qui serait définitivement perdu.

Cette exigence, les parlementaires communistes l'expriment depuis longtemps. Notre groupe a déposé deux propositions de loi, l'une le 27 mai 1986, l'autre le 14 octobre 1988, à l'initiative de Guy Hermier. L'interprétation par le Conseil constitutionnel de la modification de la loi fondamentale du 25 juin 1992 leur interdit d'être examinées : comme si l'acceptation par tous du français comme langue de la République devait exclure toute appropriation culturelle en matière linguistique !

Celles et ceux qui militent en faveur de la reconnaissance et de la promotion des langues de France ont donc été contraints d'apporter des réponses à des questions qui ne devraient pourtant plus se poser : sur l'héritage culturel, qu'il convient en permanence de revivifier ; sur les bienfaits cognitifs et pédagogiques du bilinguisme, que plus aucun spécialiste ne nie ; sur la meilleure compréhension du milieu local, de sa géographie et de son histoire, que permet la langue du terroir ; sur l'utilité de la diversité linguistique pour le français, lui-même confronté au risque de banalisation culturelle porté par une certaine conception de la mondialisation ; sur l'ouverture qu'elle offre aux espaces culturels voisins et, en conséquence, sa contribution à la construction d'une culture européenne commune ; sur le fait que, face à la diversité, il n'est de meilleur apprentissage de la tolérance que la prise de conscience de la diversité propre de la culture française ; enfin – pur bon sens ! – sur le fait que la France ne peut continuer à militer en faveur du respect de la diversité culturelle dans le monde tout en la refusant sur son propre territoire.

Hélas, au nom de présumés risques de replis identitaires, toute discussion sur la reconnaissance des langues de France a été rejetée, sans même que l'on s'aperçoive que ce rejet était un repli risquant, par les déceptions et les frustrations qu'il susciterait, de mener tout droit au péril qu'on disait vouloir éviter.

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