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Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 17 février 2012 à 9h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Article 4 - État b

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 4 a notamment pour objet d'autoriser le Gouvernement à provisionner des autorisations d'engagement – à hauteur de 16,6 milliards d'euros – et des crédits de paiement – à hauteur de 6,8 milliards d'euros – pour le futur Mécanisme européen de stabilité. Celui-ci fait l'objet d'un traité, dont notre assemblée examinera le projet de loi de ratification mardi prochain et nous dirons, à cette occasion, ce que nous en pensons sur le fond. Mais, à ce stade, je souhaiterais souligner plusieurs points.

Tout d'abord, ce Mécanisme européen de stabilité, qui doit prendre le relais du Fonds européen de stabilisation financière – de nature intergouvernementale – et du Mécanisme européen de stabilité financière – de nature communautaire –, tous deux provisoires, est destiné à devenir définitif et sera doté de 500 milliards d'euros. Les deux mécanismes provisoires ont permis d'aider – et c'est une bonne chose – l'Irlande et le Portugal. Sur le principe, bien entendu, puisque nous n'avons cessé de réclamer la création de dispositifs de solidarité, nous ne pouvons que juger positif, d'une part, qu'un mécanisme permanent prenne le relais de ces mécanismes provisoires, d'autre part, que l'on décide enfin d'accélérer sa mise en oeuvre, qui devrait être avancée de juillet 2013 à juillet 2012. Il en va de la solidarité et nous avons tous intérêt à stabiliser la zone euro.

Toutefois – et nous y reviendrons plus longuement mardi prochain –, les conditions de création de ces fonds sont très révélatrices des atermoiements et de l'indécision qui sont à l'origine de la perte de confiance des marchés et expliquent que la situation gravissime de la Grèce ne soit, aujourd'hui, toujours pas résolue. Ils ont fait l'objet de décisions insuffisantes et trop tardives. Ainsi, je veux souligner que la création des deux fonds provisoires – le FESF et le MESF – a été décidée en mai 2010, c'est-à-dire un an et demi après qu'a éclaté la crise de 2008 et qu'il a fallu, ensuite, attendre plus d'un an pour que ces dispositifs soient abondés et leurs compétences élargies lors des sommets européens de la zone euro des 11 mars et 21 juillet 2011 – et je ne parle pas des délais liés aux ratifications successives.

En outre, il a fallu que le triple A de plusieurs pays européens, dont le nôtre, hélas ! soit dégradé pour que l'on accélère la mise en oeuvre du mécanisme permanent, dont on nous demande d'approuver une partie des crédits aujourd'hui. En dépit de cette accélération du calendrier, ce mécanisme ne sera mis en place qu'en juillet 2012 : que se passera-t-il si, entre-temps, l'Espagne ou l'Italie rencontre d'importants problèmes ? De l'avis de tous les experts et de nombreux politiques, 500 milliards d'euros, c'est insuffisant pour faire face à des problèmes de ce type. Je rappelle, à ce propos, qu'au départ, le FESF devait être doté de 700 milliards d'euros et que l'on s'est aperçu ensuite que seulement 440 milliards lui avaient été alloués. Cela a provoqué des hausses et des baisses sur les marchés – dont il ne s'agit pas d'excuser l'attitude –, qui n'apprécient pas qu'on leur raconte des histoires. Bref : 500 milliards, de l'avis général, c'est trop peu.

Je veux, du reste, souligner le paradoxe suivant : plus la dotation des fonds de secours est faible, plus on risque de devoir s'en servir, donc plus ils risquent de coûter cher à nos budgets : 6 milliards plus 16 milliards d'euros potentiels, ce n'est pas rien ! Si ces fonds étaient suffisamment dotés pour dissuader la spéculation, on n'aurait pas à s'en servir, donc à libérer les crédits que l'on nous demande de voter aujourd'hui.

Enfin, je veux faire une dernière remarque concernant la brutalité indécente de la conditionnalité imposée à la Grèce. Ce pays est dans sa cinquième année de récession et nous voyons bien que ce sont les malheureux Grecs qui paient le prix des fautes graves qui ont été commises par les dirigeants des anciens gouvernements – ceux qui ont précédé celui de M. Papandréou, je le souligne.

En conclusion, nous sommes loin de ce qu'il faudrait faire pour stabiliser la zone euro et aider les pays en difficulté. Non seulement il faudrait augmenter la capacité du Mécanisme européen de stabilité, mais il faudrait pouvoir lui donner une licence bancaire pour qu'il soit adossé sur la garantie de la Banque centrale européenne et afficher la volonté politique de mutualiser la dette et de soutenir la croissance. J'espère que, sur ces questions, madame la ministre, monsieur le ministre, vous pourrez nous apporter quelques réponses.

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