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Intervention de Philippe Gosselin

Réunion du 29 avril 2008 à 15h00
Archives du conseil constitutionnel archives — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Adoptés à l'unanimité – cela n'est pas une garantie absolue, mais c'est une présomption de sagesse ! – en première lecture au Sénat, le 8 janvier 2008, ces deux projets de loi ont pour objet non seulement d'améliorer la protection de l'ensemble des archives en France, et pas simplement de celles du Conseil constitutionnel, mais aussi de faciliter l'accès à ces archives.

Sans mettre à mal les principes fondateurs de la loi de 1979, précédée par les lois de 1978 sur la CNIL, l'accès aux documents administratifs et la communication de ces documents, l'idée est aujourd'hui d'adapter notre droit à la forte demande de notre société de mieux s'approprier son histoire. Je rejoins ce qui a été dit tout à l'heure sur ce point essentiel. En effet, et il est heureux d'avoir ce débat, les archives font partie de notre patrimoine national au même titre que les vieilles pierres ou certaines oeuvres d'art. Il s'agit d'un bien commun, de la mémoire d'un peuple, d'un territoire. Cependant c'est aussi la mémoire de familles, de tranches de vie, avec ses heurs et ses malheurs.

Si la première loi en la matière date de la Révolution – loi du 7 messidor an II –, la monarchie aussi s'est préoccupée de ces archives ainsi que les paroisses, certaines familles, les corporations. C'est donc un attachement très ancien, sans doute même un peu viscéral pour nous, Français. Bien sûr, la disparition d'archives est toujours un drame.

Tirant les conclusions de ce qui se faisait depuis de nombreuses années, le conseiller d'État Guy Braibant avait tenté, dans une quarantaine de propositions, d'articuler au mieux les archives, et c'est ce que nous faisons aujourd'hui, avec un peu de retard, dans les meilleures conditions. Il faut, disait Guy Braibant, que les archives soient plus riches, plus ouvertes et mieux gérées. Tel est le sens de ces projets de loi qui s'articulent autour de deux axes.

Premier axe : une meilleure protection des archives publiques et privées.

S'agissant des archives publiques, le projet de loi ordinaire renforce les sanctions pénales en cas de détournement d'archives publiques. Il rappelle l'interdiction importante de détenir sans droit ni titre des archives publiques. C'est aussi une protection contre le vol et les dégradations.

S'agissant des archives privées, le renforcement de la protection des archives privées classées archives historiques est la marque d'un intérêt public qui va à l'encontre des propos que j'ai entendus tout à l'heure.

Second axe : faciliter l'accès aux archives publiques et privées.

C'est le coeur de notre discussion et j'avoue avoir beaucoup de mal à comprendre que l'on puisse parler de « fermeture », d'« omerta » ! Le projet de loi ordinaire instaure, en effet, un principe qui me paraît essentiel : le principe de libre communicabilité. Certes, c'est vrai, sont prévues quelques dérogations, quelques exceptions, mais un État a aussi besoin, dans certains cas, de se protéger et de protéger ceux qui ont pu agir dans des contextes particuliers.

Les délais spéciaux sont réduits de façon importante. Sans entrer dans le détail, c'est sur ce sujet que s'est focalisée une partie de la polémique de ces dernières semaines sur ce projet de loi, mais la commission des lois, à l'initiative de son rapporteur François Calvet, a fort justement cherché à apaiser des craintes qui pouvaient être légitimes. Nos collègues sénateurs avaient peut-être poussé le curseur un peu loin et, dans notre grande sagesse collective – ce n'est pas l'apanage de nos collègues de la Haute assemblée ! –, je souhaite que nous revenions sur des chemins qui puissent nous réunir.

Sont également prévues des dérogations accrues à l'accès individuel, voire des ouvertures anticipées. Cela représente une avancée très importante.

Enfin, le principe de la gratuité de l'accès, cher à la foultitude des généalogistes amateurs dans un cadre familial et pas seulement aux chercheurs, est renforcé. C'est encore un grand progrès.

Pour m'attarder encore quelques instants sur la loi organique, j'illustrerai ces propos par la soumission des archives du Conseil constitutionnel au droit commun. Quelle avancée extraordinaire que de réduire leur délai de consultation de soixante à vingt-cinq ans ! Quelle richesse, pour tous ceux qui s'intéressent à la vie politique, les chercheurs et les constitutionnalistes, mais aussi pour l'ensemble des Français ! Derrière ce bien commun, en effet, se cache la possibilité de mieux comprendre nos institutions, donc notre vie.

Le texte apporte également la consécration juridique, qui touche plus particulièrement notre assemblée, des protocoles d'archives conclus avec les autorités politiques. Une telle mesure est intéressante, puisqu'elle permettra d'alimenter et d'enrichir nos débats et, par conséquent, les archives et les livres de demain.

Ainsi, ces deux lois me paraissent des lois d'ouverture, principe que l'on nous reproche parfois en politique (Sourires), mais que nous appliquons aussi en matière d'archives et, souhaitons-le, avec bonheur. J'espère que nos collègues sauront tout à l'heure nous rejoindre.

Elles apportent un vrai progrès pour les historiens et pour la société en général. Nous y reviendrons lors de l'examen des articles. Je crois que nous avons su entendre les justes récriminations de certains historiens. Celles-ci ne relèvent pas, à mes yeux, de la polémique, mais plutôt d'une mise en garde. À ce titre, je me réjouis qu'historiens et chercheurs aient été nombreux à nous alerter.

Au-delà des arguties, le débat qui nous occupe offre au moins l'intérêt de montrer l'attachement viscéral des Français à leurs archives. Ils entretiennent avec elles un rapport passionnel et passionné, qui montre qu'ils ont besoin du passé pour mieux comprendre le présent et éclairer l'avenir. C'est en face qu'ils regarderont l'histoire, sans chercher à la farder ni à la restreindre.

Je crois réellement que les deux projets de loi qui nous sont soumis nous permettront d'y voir plus clair et, contrairement à ce qu'on a pu dire, d'ouvrir encore davantage nos archives. C'est pourquoi le groupe UMP les votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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