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Intervention de Jacqueline Fraysse

Réunion du 8 février 2012 à 10h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

La prévention sanitaire est un sujet extrêmement important, dont nous sommes souvent amenés à débattre. Nous partageons tous le même constat : dans ce domaine, la France est en retard, et des efforts doivent être consentis.

Certes, « mieux vaut tard que jamais ». Permettez-moi néanmoins de regretter que ce rapport ait été si tardif. Je reconnais qu'il résulte d'un travail important, que je tiens à saluer, et qu'il contient des éléments intéressants, tant en ce qui concerne le constat que pour certaines de ses préconisations. Je ne partage toutefois pas l'enthousiasme dont a fait preuve le président de notre commission, car j'estime que ce rapport manque cruellement d'ambition au regard de la situation actuelle.

Certaines propositions méritent certes notre intérêt, comme l'élaboration d'une nouvelle loi de santé publique que nous réclamons dans nos rangs depuis longtemps, la coordination des actions entreprises, l'organisation d'un débat parlementaire sur les orientations retenues en matière de santé publique, un accès et une transmission des dossiers médicaux facilités entre médecins scolaires, médecins du travail, médecins-conseils et médecins traitants, ou encore l'interdiction de messages publicitaires portant sur certains produits alimentaires. Sur ce dernier point, permettez-moi de rappeler que notre groupe, mais pas seulement, a déjà eu l'occasion de déposer des amendements en ce sens et qu'ils ont toujours été rejetés par la majorité… Il est certes tout à fait « sympathique » d'émettre aujourd'hui une telle préconisation, mais encore faudrait-il, lorsque l'occasion en est donnée, y donner suite !

J'estime qu'en réalité, une grande partie des préconisations de la mission s'apparentent à des déclarations d'intention. Ainsi, la proposition d'un développement de la visite à domicile dans les familles en situation précaire dans le cadre de protection maternelle et infantile est évidemment excellente, mais pourquoi un tel dispositif n'existe-t-il pas aujourd'hui ? Où sont donc les moyens humains, en particulier les assistantes sociales, qui permettraient de le mettre en oeuvre ? De la même manière, il est proposé de renforcer les missions transversales des agences régionales de santé en matière de prévention sanitaire, mais on sait bien que ces instances travaillent surtout à supprimer des services sanitaires et des hôpitaux et qu'elles consacrent beaucoup moins de moyens à adapter la réponse sanitaire aux besoins de santé.

Ce rapport, catalogue de bonnes intentions, comporte de nombreuses carences et ne propose pas de mesure sérieuse ou ambitieuse pour améliorer la situation. Ainsi en est-il en matière de médecine du travail : rien n'est proposé pour responsabiliser les employeurs et réduire la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Tout au plus préconise-t-on de confier au médecin du travail le soin de rédiger et transmettre au médecin traitant un document précisant les risques éventuels que peut comporter un poste de travail… Quelle sera l'efficacité d'une telle mesure qui vise non pas à supprimer les risques mais simplement à les signaler, d'autant que les dernières réformes ont conduit à fragiliser l'indépendance des médecins du travail à l'égard de l'employeur ? Des insuffisances similaires peuvent être observées en matière de médecine scolaire. Les préconisations émises manquent singulièrement d'ambition au vu de la situation de ce secteur. Je rappelle qu'on ne compte en moyenne qu'un médecin scolaire pour 12 000 élèves et que seulement 62 % des postes de médecins scolaires et 69 % des postes d'infirmiers scolaires sont pourvus. Pourquoi cette situation ? Comment la surmonter ? Le rapport ne donne pas de réponse à ces questions ; il se borne à proposer la suppression des visites médicales des élèves âgés de neuf et douze ans, ce qui me laisse dubitative.

Le rapport est également silencieux sur le subventionnement par l'État de substances dangereuses, en particulier des pesticides qui bénéficient d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, sur les déterminants sociaux qui déterminent le mauvais état de santé ou encore sur les inégalités d'accès aux soins.

Pour toutes ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) juge très insatisfaisant ce rapport qui témoigne d'une ambition bien en-deçà de ce que la situation actuelle aurait exigé, notamment en termes de moyens consacrés à la prévention sanitaire. Ses insuffisances sont telles que nous nous sommes abstenus sur l'adoption du rapport.

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