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Intervention de Pierre Morel-A-L'Huissier

Réunion du 7 février 2012 à 15h00
Résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat après engagement de la procédure accélérée

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur :

Tout d'abord merci pour l'expression de votre passion, monsieur le ministre. En tant que rapporteur, je vais essayer modestement de faire preuve de la même ouverture d'esprit que vous envers tous, quel que soit leur banc dans l'hémicycle.

Le présent projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, vient répondre aux enjeux multiples que recouvrent les situations professionnelles variées des agents contractuels de la fonction publique, conformément aux annonces faites par le Président de la République en janvier 2010.

La possibilité de recourir à des agents non titulaires, déjà prévue dans le statut de 1946, a permis de garantir la continuité du service public sur l'ensemble du territoire national et sa mutabilité. On dénombre quelque 891 000 agents contractuels dans les trois versants de la fonction publique, qui représentent environ 16 % des 5,3 millions d'agents.

Fruit d'une négociation engagée par le Gouvernement avec les partenaires sociaux et les représentants des employeurs territoriaux et hospitaliers, un protocole d'accord a été signé avec six organisations syndicales – UNSA, CGT, FO, CFDT, CGC, CFTC – le 31 mars 2011, afin de sécuriser les parcours professionnels des agents contractuels dans les trois versants de la fonction publique.

Les deux premiers titres du présent projet de loi tendent à assurer la transposition de ce protocole d'accord d'une double manière.

Premièrement, ils apportent une réponse immédiate aux situations de précarité rencontrées sur le terrain, avec l'institution, d'une part, d'un dispositif d'accès à l'emploi titulaire, fondé sur des modes de recrutement réservés et valorisant les acquis professionnels, et d'autre part, à titre complémentaire, d'un dispositif de transformation des contrats en contrats à durée indéterminée pour les agents qui ne pourraient ou ne voudraient accéder à la titularisation.

Deuxièmement, ils proposent des moyens pour éviter la reconduction de telles situations de précarité à l'avenir, notamment grâce à un meilleur encadrement des cas de recours au contrat et des conditions de leur renouvellement.

Ainsi, le présent texte renforce la cohérence du cadre juridique applicable aux agents non titulaires, avant tout pour apporter une réponse aux situations de renouvellement abusif des contrats à durée déterminée, en prévoyant la garantie pour tout agent employé depuis six ans dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée.

En outre, le projet précise le régime juridique du recours à l'emploi des agents contractuels et harmonise le droit applicable dans les différents versants de la fonction publique de multiples manières : modification des modalités de recours au contrat pour assurer le remplacement d'agents absents ou l'occupation temporaire d'emplois vacants ; redéfinition des modalités du recours au contrat pour des besoins occasionnels ou saisonniers.

Attentif de manière plus globale encore à la nécessité d'une adaptation du droit de la fonction publique aux évolutions des pratiques administratives et des besoins des agents, le Gouvernement a aussi complété ce projet de loi de dispositions diverses visant à améliorer les situations professionnelles des fonctionnaires dans les domaines suivants : la poursuite de la lutte contre les discriminations avec un renforcement de l'évaluation des politiques mises en oeuvre ; le développement de la mobilité des agents publics, avec plusieurs dispositions clarifiant et élargissant les règles issues de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique ; l'évolution du statut des membres du Conseil d'État et du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi que des membres du corps des chambres régionales des comptes.

S'agissant des juridictions administratives, plusieurs articles du projet de loi tendent à faciliter les recrutements et à moderniser les procédures.

En ce qui concerne les membres du corps des chambres régionales des comptes, la version initiale du projet de loi prévoyait deux mesures spécifiques ciblant deux problèmes bien identifiés : d'une part, l'existence de difficultés de recrutement dans les juridictions financières, faute d'un cadre statutaire adapté ; d'autre part, un régime des incompatibilités applicable aux magistrats des chambres régionales des comptes jugé trop restrictif.

Le texte proposé par le Gouvernement comportait aussi deux dispositions relatives au dialogue social – concernant notamment les modalités de publicité des comptes des organisations syndicales – ainsi que quelques mesures diverses destinées à procéder à des ajustements nécessaires à la mise en oeuvre du code de la fonction publique ou à la prise en compte de la réforme des retraites de 2010.

Voilà donc, esquissé à grands traits, le projet de loi tel qu'il avait été présenté par le Gouvernement dès le mois de septembre dernier.

Dans une large mesure, le Sénat a conforté l'économie générale de ce texte, ajustant sur quelques points ciblés ses modalités d'application. Il a également assez substantiellement enrichi le projet, ajoutant 40 nouveaux articles et portant ainsi leur nombre total à 103. Notre commission des lois a prolongé ces travaux en les confirmant très souvent, excepté sur quelques points sur lesquels je reviendrai.

Concernant le dispositif d'accès à l'emploi titulaire, le Sénat a procédé à plusieurs ajustements et ajouts dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Le second titre, dédié à l'encadrement des cas de recours aux agents contractuels, a également été approuvé pour l'essentiel par le Sénat qui a même assoupli encore les modalités d'accès au contrat à durée indéterminée.

En revanche, le Sénat avait, contre la lettre du protocole d'accord du 31 mars 2011, doublé la durée maximale de renouvellement des contrats conclus pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans la fonction publique territoriale. Notre commission a rétabli sur ce point le texte du projet de loi initial.

Le Sénat s'est par ailleurs prononcé en faveur de l'institution de commissions consultatives paritaires pour les contractuels des collectivités territoriales – mesure approuvée par notre commission – et d'un document équivalent au registre unique du personnel des entreprises pour la fonction publique. Cette dernière initiative a été supprimée en commission des lois, non pour des raisons de fond mais pour prendre en compte les discussions menées actuellement avec les partenaires sociaux sur ce sujet.

Concernant les dispositions relatives au recrutement et à la mobilité, le Sénat a notamment clarifié le statut des agents de la direction générale de la sécurité extérieure et relevé de trois à quatre ans la durée de validité des listes d'aptitude dans la fonction publique territoriale. Notre commission a préféré, sur ce dernier point, en revenir à la rédaction initiale du projet.

S'agissant de l'évolution du statut des membres du Conseil d'État et du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le Sénat a procédé à plusieurs ajouts : institution de la qualité de maître des requêtes en service extraordinaire ; création d'emplois de premier vice-président dans les tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ; ouverture de la possibilité d'un renforcement ponctuel et immédiat des effectifs d'un tribunal administratif. Notre commission, tout en conservant très largement ces apports, a procédé à deux ajustements sur lesquels nous reviendrons lors de la discussion des amendements.

En ce qui concerne l'évolution du statut des membres de la Cour des comptes et du corps des chambres régionales des comptes, le Sénat a introduit sept articles additionnels qui visent à proroger le dispositif de recrutement des CRC et à introduire dans ce texte certaines dispositions similaires à celles que notre commission avait adoptées dans le cadre du projet de loi portant réforme des juridictions financières. La commission des lois a validé l'essentiel de ces dispositions, à l'exception de la modification du régime des nominations des conseillers référendaires au tour extérieur qu'elle n'a pas jugé nécessaire, tout en procédant à quelques ajouts tendant en particulier à favoriser la création d'emplois de vice-présidents dans les plus grandes chambres régionales des comptes.

Le chapitre consacré au dialogue social a été complété par plusieurs mesures mettant en oeuvre les engagements pris par le Gouvernement à l'issue de la concertation avec les organisations syndicales de fonctionnaires et ayant conduit à l'adoption du relevé de conclusions du 29 septembre 2011 relatif à la modernisation des droits et moyens syndicaux. Des mesures relatives au crédit de temps syndical, à l'avancement des fonctionnaires exerçant un mandat syndical et au versement d'une subvention à défaut de mise à disposition d'un local syndical ont notamment été ajoutées.

Le Sénat a enfin assez substantiellement enrichi le volet de ce texte consacré à des dispositions diverses, en particulier en adoptant plusieurs articles destinés à assurer la mise en oeuvre de la réforme de l'encadrement supérieur ou encore à amorcer l'évolution des centres de gestion dans la fonction publique territoriale.

Notre commission des lois a complété ce volet du texte en adoptant un amendement établissant un cadre juridique pour la mise en oeuvre du télétravail dans la fonction publique. Monsieur le ministre, j'avais fait une mission à vos côtés sur ce sujet qui m'est cher et qui est majeur pour l'évolution des relations de travail.

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