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Intervention de Claude Birraux

Réunion du 25 janvier 2012 à 17h00
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Birraux, député, premier vice-président :

Par ailleurs, les maladies monogéniques soulèvent des problématiques éthiques liées à leur origine génétique. Le coût de plus en plus réduit du séquençage du génome à haut débit et le développement de tests génétiques diagnostics mais aussi prédictifs, parfois en libre accès sur Internet, accroissent la pertinence de ces interrogations.

L'information génétique a un caractère particulier car elle porte sur des éléments constitutifs de l'individu, qui le relient à sa famille, et est en relation avec son destin. Aussi cette connaissance plus fine de prédispositions génétiques a-t-elle nécessairement des conséquences éthiques, juridiques et sociétales, dont il importe de prendre la mesure. Quand elle est fournie par les tests génétiques, elle peut conduire à une variation des conditions dans lesquelles la personne sera assurée, embauchée etc…

Quelle législation envisager concernant l'usage des tests génétiques ? La législation ne peut pas être la même si l'usage des tests génétiques devient commun ou s'il concerne un très faible pourcentage de la population. Le Comité national consultatif d'éthique, comme l'Agence de la biomédecine, s'inquiètent du développement très rapide de l'analyse du génome humain qualifié de « génétique récréative » et de la multiplication de tests génétiques en libre accès sur Internet, dont on ne peut pas garantir la fiabilité.

Actuellement, la plupart des tests disponibles sur Internet portent sur des maladies qui ne sont pas monogéniques : tests de susceptibilité, sans utilité au niveau individuel et dont l'interprétation peut évoluer d'un jour à l'autre en fonction des publications, car dans le génome, on trouve autant de gènes qui protègent que de gènes qui fragilisent, ce qui rend son interprétation particulièrement difficile. Or les tests génétiques portent sur diverses prédispositions, et posent des problèmes en termes d'accompagnement des patients. Qui interprétera le résultat ? Quel médecin prendra en charge le patient si un élément pathologique est découvert ? Quelle est l'utilité clinique d'un test qui révèle une prédisposition dont on ne sait que faire ?

S'agissant des tests génétiques pour les maladies monogéniques, jusqu'à présent, on répondait à une demande ; c'est ainsi qu'ont été mis en place les tests sur la maladie de Huntington, par exemple, dans des conditions très encadrées. Or on se trouve désormais face à une situation nouvelle : des facteurs génétiques seront identifiés chez des personnes qui n'avaient rien demandé. Il en va ainsi pour le diagnostic postnatal de la mucoviscidose, avec les tests génétiques à rebours chez les parents, puis les apparentés des sujets porteurs, posant la problématique des tests pratiqués chez les porteurs sains. Il sera difficile de s'assurer que ceux-ci seront en mesure de décider s'ils veulent savoir ou ne pas savoir.

Le développement très rapide de l'analyse du génome entier, ajoute des interrogations. Que devra-t-on faire si, en voulant soigner un patient atteint d'une maladie, l'analyse de son génome conduit à en trouver une autre ? En génétique, on rencontre des malades et des personnes qui ne sont pas ou qui ne se sentent pas malades. Par ailleurs, on progressera dans l'analyse du génome ; il faudra donc anticiper l'évolution de l'interprétation du génome.

Le développement des tests génétiques, comme le séquençage du génome à haut débit, s'inscrivent dans une logique de renforcement du contrôle social sur l'individu, sujet qu'il conviendra d'approfondir. Plus il devient facile de séquencer le génome complet d'une personne et moins cela coûte cher, plus il importe de protéger ces données pour éviter que celles-ci ne soient utilisées à des fins autres que médicales et scientifiques. Cela est d'autant plus délicat que la mondialisation de la biologie rend quasiment impossible de s'assurer que ce qui est strictement réglementé, voire interdit, dans un pays, ne sera pas pratiqué sous l'empire d'une réglementation plus laxiste ou inexistante dans d'autres pays pour un coût souvent modique. À cet égard, l'Agence de la biomédecine joue son rôle, elle veille à une information et un suivi de l'usage des tests génétiques en libre accès sur Internet. Cependant est-ce suffisamment dissuasif ?

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