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Intervention de étienne Guyot

Réunion du 26 janvier 2012 à 11h00
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

étienne Guyot, président du directoire de la Société du Grand Paris :

Pour accompagner mon propos, je vous ai apporté une plaquette, publiée hier, qui est consacrée aux gares de métro dans le monde – nous nous en inspirons pour les travaux du Grand Paris –, et un flyer sur le réseau que nous allons construire.

Cette audition présente un caractère assez particulier pour moi, car elle intervient un an, jour pour jour, après la signature du protocole d'accord entre l'État et la région sur les transports en Île-de-France.

Ce protocole a pris acte du souhait, formulé lors des réunions publiques, dans les « cahiers d'acteurs » et dans les contributions au débat, que les infrastructures de transport existantes, en particulier les réseaux RER, soient rapidement améliorées et que l'on réalise un projet en rocade qui soit structurant à l'échelle régionale, qui marque une vraie rupture dans les conditions de mobilité, et qui apporte une réponse structurelle sur le long terme.

L'État et le conseil régional d'Île-de-France ont constaté le rapprochement de leurs points de vue en signant ce protocole qui prévoit la réalisation d'un réseau de transport en rocade, dit « Grand Paris Express », et qui règle aussi la question du financement des investissements dans le domaine des transports publics.

Le total des opérations correspondant au plan de mobilisation pour les transports en Île-de-France et à la réalisation du réseau du Grand Paris représente un montant global d'investissements évalué à 32,4 milliards d'euros.

Le premier objectif a été de trouver un équilibre entre les investissements de long terme, qui doivent permettre de réaliser un réseau puissant et disposant de réserves de capacités importantes, et la nécessité de remédier à la situation d'urgence actuelle, qui exige des mesures rapides et d'effet immédiat.

L'accord du 26 janvier 2011 réaffirme ainsi la nécessité d'effectuer un investissement profond, structurant et dimensionnant, tout en assurant le financement des opérations urgentes qui s'imposent en attendant que ce projet soit mené à bien.

Parmi ces mesures, il y a notamment le schéma directeur du RER D et celui du RER C, tous deux d'un montant de 500 millions d'euros, la construction du RER B Nord +, pour 220 millions d'euros, le prolongement d'Éole à l'Ouest pour 2,5 milliards d'euros, le renouvellement du matériel roulant du RER A, pour 1,3 milliard, et les matériels roulants du plan de mobilisation, pour deux milliards.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? La phase des études préalables, qui a démarré au début de l'année 2011, s'est achevée en octobre et en novembre, puis nous avons ensuite lancé les études préliminaires. Le calendrier initial a donc été entièrement respecté.

En 2011, la SGP a également conduit de nombreuses études transversales, notamment des études de trafic qui vont servir aux équipes « projet » pour le dimensionnement des gares et qui vont fournir les données d'entrée nécessaires pour les études d'impact. Nous avons aussi réalisé des études socio-économiques et des études fonctionnelles pour les gares.

De plus, nous avons commencé à constituer un dossier de définition de la sécurité qui couvrira l'ensemble du réseau, et nous avons effectué des études environnementales, après avoir élaboré un calculateur spécifiquement conçu pour établir le bilan carbone du métro du Grand Paris. Nous avons ainsi réalisé une étude sur les possibilités d'élimination, de traitement ou de valorisation des déchets, ainsi qu'une étude d'incidences au titre de Natura 2000, partie intégrante de l'étude d'impact environnementale qui a été lancée en février 2011 et dont le rapport final a été remis il y a quelques jours.

En ce qui concerne les études socio-économiques, je tiens à préciser que nous avons constitué un conseil scientifique réunissant dix des meilleurs économistes mondiaux, dont cinq experts étrangers, afin de nous appuyer sur les meilleures expertises possibles.

Les résultats de ces études, qui sont indispensables pour la mise en oeuvre du projet, serviront de base technique pour la constitution du dossier d'enquête publique et pour la préparation des phases d'avant-projet et de projet que nous allons lancer à partir du mois de juin.

À l'automne dernier, nous avons également engagé une procédure d'évaluation préalable qui doit permettre d'établir une comparaison entre un éventuel contrat de partenariat et une maîtrise d'ouvrage publique sur la ligne verte, entre Orly et Versailles. Le titulaire du marché sera très prochainement choisi.

Nous avons aussi lancé une consultation visant à déterminer la charte architecturale et les lignes de design des gares. Les offres, qui viennent de nous être remises, sont en cours d'analyse. Conformément au règlement de la consultation, nous allons retenir les plus intéressantes – sept au maximum –, puis nous engagerons une discussion avec l'appui d'une commission consultative de haut niveau, afin de choisir l'équipe lauréate à la fin du premier trimestre.

Les prochaines étapes du processus vont nous conduire sur le terrain en 2012, avant le début des travaux à la fin de l'année 2013.

Cet ancrage sur le territoire se concrétisera, dans un premier temps, par le lancement d'enquêtes publiques pour un certain nombre de tronçons. Cette procédure sera engagée dès l'été prochain pour le tronçon le plus avancé, à savoir le Sud de la ligne rouge, entre Pont de Sèvres et Noisy-Champs. Ce tronçon, qui mesure 33 kilomètres, comprend 16 gares et traverse les départements des Hauts-de-Seine, du Val-de-Marne, de la Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne. La procédure commencera en juillet avec l'envoi du dossier d'enquête publique au préfet de région, qui saisira ensuite l'autorité environnementale – elle aura trois mois pour se prononcer. Pendant ce temps, nous reviendrons devant les habitants, les entreprises et les associations en organisant, à compter de septembre 2012, des réunions publiques de concertation et d'information.

Nous engagerons ensuite la communication en « mode projet » sur le terrain, pour expliquer comment nous allons opérer. La phase de l'enquête publique, proprement dite, sera pilotée par un commissaire enquêteur, et elle se traduira par l'ouverture de cahiers d'enquête dans les mairies en novembre ou en décembre.

Puis la procédure d'enquête sera engagée entre décembre 2012 et avril 2013 pour les tronçons restants, qui pourraient être répartis de la manière suivante : la ligne verte entre Orly et Versailles, desservant le plateau de Saclay, la ligne rouge entre Noisy-Champs et Le Bourget, la ligne rouge entre les Grésillons et Le Mesnil-Amelot, au-delà de Roissy, la ligne rouge entre Les Grésillons et Saint-Cloud, et la ligne bleue entre Olympiades et Orly.

Vous le voyez, la Société du Grand Paris se met en ordre de bataille pour lancer de façon presque simultanée les procédures d'enquête. Notre objectif est qu'elles soient toutes réalisées avant la fin de l'année 2013, et que nous puissions obtenir dans la foulée les déclarations d'utilité publique. Ces décrets en Conseil d'État seront nécessaires pour procéder à des expropriations là où nous n'aurons pas réussi à acquérir les parcelles à l'amiable.

Le rythme des enquêtes publiques sera très dense, mais il ne préjuge en rien de l'ordre des travaux. Sur ce point, nous commencerons à préparer le choix de la maîtrise d'oeuvre à compter d'octobre 2012. Comme je l'ai indiqué hier, la SGP travaille sur des scénarios utilisant simultanément entre sept et dix tunneliers – chaque tunnelier permet de creuser 300 mètres par mois, soit environ 3 kilomètres par an, alors que la SGP doit construire, en maîtrise d'ouvrage, 144 kilomètres avant 2025. Je rappelle que la réalisation des 22 kilomètres restants, entre Versailles et Nanterre, a été effectivement repoussée après 2025.

J'en viens à la question des gares, dont nous allons arrêter l'emplacement cette année de manière définitive. Notre travail, qui concerne la partie souterraine, la « boîte », mais aussi les « émergences », c'est-à-dire les bâtiments des gares, se déroule dans un cadre original : celui des comités de pilotage partenariaux, les COPILS, qui réunissent la SGP, les élus et le STIF.

A ce jour, 18 COPILS ont déjà atteint le niveau 2 : pour presque toutes les gares du premier tronçon de la ligne rouge, l'emplacement des gares a été arrêté ou bien il le sera avant la fin du mois de février. Si nous avons pu avancer dans des temps record, c'est grâce à la mobilisation de nos partenaires. Les COPILS de niveau 3 se réuniront ensuite pour déterminer, avant le mois de juin pour le premier tronçon, l'emplacement des émergences, et pour aborder les questions de valorisation foncière autour des gares.

Puis nous lancerons les premières consultations de maîtrise d'oeuvre, en octobre et en novembre 2012, autour des gares de la ligne rouge, entre Pont de Sèvres et Noisy-Champs, sur le fondement des études de fonctionnalité et des résultats de la mission de conseil en architecture et en design.

J'en viens au lien étroit entre le réseau du Grand Paris et les cinq lignes de RER d'Île-de-France. Ce maillage est intrinsèque à la conception du réseau et à son ambition. Le maillage entre les trois lignes du Grand Paris et le réseau actuel du RER sera assuré par 19 gares, sur un total de 57 : Noisy-Champs, Saint Maur-Créteil, Nanterre et La Défense sur le RER A ; Le Bourget, Sevran-Beaudottes, Sevran-Livry, Arcueil Cachan, Parc des Expositions et Aéroport CDG 2 sur le RER B ; Les Ardoines, Issy-les-Moulineaux, Les Grésillons, Versailles Chantiers, Pont de Rungis sur le RER C ; Le Vert de Maisons, Stade de France (Pleyel) sur le RER D ; Chelles sur le RER E ; et enfin Massy Palaiseau sur les RER B et C.

En outre, des études visant à créer une nouvelle gare sur le RER E en correspondance avec la future gare de Bry Villiers Champigny, sur la ligne rouge, sont en cours. Sur cette même ligne, la gare de Gonesse sera en correspondance avec la liaison ferroviaire dite du « barreau de Gonesse », raccordée au RER D. Ces projets compléteront le maillage pour permettre une correspondance avec l'ensemble des branches du RER dont le Grand Paris croise le tracé.

À cela s'ajouteront les possibilités de correspondance offertes par la ligne orange, qui sera réalisée sous maîtrise d'ouvrage du STIF et à laquelle nous contribuerons à concurrence de deux milliards d'euros. Le maillage avec les lignes B et E du RER sera assuré par cinq gares.

Il va de soi que les tracés et les gares qui ont été arrêtés dans le cadre du schéma d'ensemble du Grand Paris doivent lui permettre de jouer pleinement son rôle dans la recomposition des déplacements des Franciliens et dans leur amélioration. Grâce à ses lignes, qui seront majoritairement en rocade – la ligne rouge, mais aussi la ligne verte, une fois qu'elle aura été prolongée jusqu'à Nanterre –, et qui seront connectées aux lignes radiales des RER, le Grand Paris Express permettra des déplacements de banlieue à banlieue sans transit par Paris, comme c'est aujourd'hui le cas.

Les catégories de voyageurs qui bénéficieront directement de cette amélioration des transports effectuent aujourd'hui près de la moitié des déplacements quotidiens en Île-de-France, soit 17 millions de déplacement sur un total de 35 millions. Il s'agira, en particulier, des déplacements en rocade, de banlieue à banlieue, qui représentent entre 30 et 35% du total et qui trouveront, grâce au réseau du Grand Paris, un mode de transport direct et performant qui fait aujourd'hui défaut. Les déplacements radiaux entre Paris et ses différentes couronnes bénéficieront aussi d'un allégement significatif de la charge sur la partie centrale du réseau, en particulier le RER – entre 20 et 25% des déplacements actuels seront ainsi concernés.

Les études prévisionnelles réalisées dans le cadre du débat public et du schéma d'ensemble permettent de mieux apprécier les effets du réseau du Grand Paris : l'utilisation de l'ensemble du RER le matin, à l'heure de pointe, devrait se réduire de 10 %. Les lignes qui en bénéficieront le plus seront les RER A et B, où les gains dépasseront 15 % par rapport à ce que serait la situation sans la construction du réseau du Grand Paris. La réduction de l'utilisation des RER C et D devrait être comprise entre 5 et 10 %, et celle du RER E entre 10 et 15 %.

Il y aura également une amélioration de la situation sur les tronçons centraux, lesquels subissent la charge la plus lourde. Elle devrait être allégée d'au moins 20 % pour les RER A et B, de 10 ou 15 % pour les RER C et D, et de plus de 20 % pour le RER E sur les deux branches Est de Tournan et de Chelles.

Pour toutes ces raisons, le réseau du Grand Paris contribuera significativement à l'amélioration du fonctionnement des lignes de RER. L'un des objectifs était précisément de remédier à la saturation du réseau francilien actuel.

Cela dit, le Grand Paris ne se résume pas à un projet de transport. Plusieurs auditions réalisées par votre commission ont ainsi montré que la maîtrise insuffisante du développement urbain était manifestement une des causes de la saturation progressive du réseau RER. Le RER A pâtit ainsi du déséquilibre entre l'Est et l'Ouest de l'agglomération en matière d'habitat et d'emploi, qui conduit à multiplier les navettes entre le domicile et le travail.

Sur ce point, le réseau du Grand Paris a pour vertu de s'inscrire dans une réflexion globale sur l'aménagement et l'urbanisation, grâce à l'outil stratégique que sont les contrats de développement territorial. Le rééquilibrage des territoires et la création de bassins de vie plurifonctionnels permettront de démultiplier l'effet du réseau du Grand Paris sur les transports en commun régionaux, dans une vision d'ensemble croisant transport et urbanisation.

J'ajoute que la SGP a bien conscience que son action s'inscrit dans l'avenir. L'une des conclusions majeures du débat public de la fin de l'année 2010, qui sous-tend le protocole d'accord conclu entre l'État et la région Île-de-France, est qu'il faudra mener de front l'amélioration du réseau à court terme et les actions d'investissement à moyen et long terme.

Comme l'a indiqué Pierre Mongin, la mise en service du nouveau matériel roulant à deux étages procurera quinze ans d'oxygène à la ligne A, ce qui coïncide avec l'horizon de réalisation du schéma d'ensemble du réseau. Il y a donc une cohérence dans le temps des actions à mener. Avec la mise en service progressive du réseau du Grand Paris, entre 2018 et 2025, nous absorberons la hausse naturelle du trafic associée à la croissance démographique et au développement de l'usage des transports en commun, tout en redonnant une marge de capacité aux lignes du réseau existant, notamment le RER.

J'en viens aux aspects financiers. En matière de maîtrise d'ouvrage, le budget de la Société du Grand Paris devrait s'élever à 20,5 milliards d'euros, dont 17,5 milliards pour la réalisation de la ligne rouge et de la ligne verte, ainsi que pour la prolongation de la ligne bleue entre Mairie de Saint Ouen et Saint Denis Pleyel au Nord, et entre Olympiades et Orly au Sud. La différence correspond à la contribution de la SGP au financement de l'arc proche, la ligne orange, à hauteur de deux milliards d'euros, et à sa participation à la prolongation de la ligne bleue entre Saint-Lazare et Mairie de Saint Ouen, sous maîtrise conjointe du STIF et de la RATP.

Pendant la phase de conception et de travaux, qui va de 2010 à 2025, la SGP engagera les dépenses nécessaires pour la mise en service du réseau, tout en contribuant au financement du prolongement de la ligne 14 et de la réalisation de l'arc Est proche, grâce à des ressources principalement constituées de recettes fiscales affectées, d'une dotation de l'État, de contributions des collectivités locales, pour un montant de 900 millions d'euros, et d'un recours à l'emprunt à compter de 2016.

À partir de 2026, la SGP consacrera ses recettes à l'amortissement de la dette accumulée au cours de la phase de construction, étant entendu que l'entretien et le renouvellement du réseau ne seront pas à sa charge. Les recettes fiscales continueront d'être affectées à la SGP et elles seront complétées par des recettes commerciales, essentiellement liées aux gares, et par la redevance d'occupation des infrastructures dont la SGP est propriétaire.

Ces deux phases se superposeront peu : le début de la mise en service, à partir de 2018, marquera l'entrée dans une phase intermédiaire, caractérisée par une diversification des ressources de la SGP, qui percevra alors ses premières recettes commerciales et des redevances d'occupation. Cela étant, la SGP ne pourra pas commencer à amortir sa dette avant la fin des travaux. Notre objectif est de réaliser son amortissement sur une période cohérente avec la durée de vie des infrastructures, soit environ quarante ans.

Entre 2010 et 2025, les coûts à la charge de la Société du Grand Paris sont estimés à environ 20 milliards d'euros aux conditions économiques de 2008, hors matériel roulant. Cette estimation inclut une provision pour les acquisitions foncières, une provision pour les travaux préparatoires, tels que la déviation de certains réseaux concessionnaires, le coût des travaux de génie civil pour les tunnels, les gares, les ouvrages annexes et les ouvrages en ligne, une provision pour certains ouvrages de correspondance, les coûts liés à l'aménagement des gares, aux systèmes de contrôle et de supervision, ainsi qu'aux ateliers et à leur équipement, les frais d'études pour la maîtrise d'ouvrage et les maîtrises d'oeuvre, et enfin la prise en compte des aléas classiques dans la phase de définition du projet.

La SGP bénéficie de trois recettes fiscales affectées : une fraction de la taxe locale sur les bureaux, qui représente 155 millions d'euros en 2011, une taxe spéciale d'équipement additionnelle aux « quatre vieilles », pour environ 118 millions d'euros, et une fraction de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), assise sur les matériels roulants utilisés par le réseau de la RATP, pour 60 millions d'euros. L'ensemble devrait nous procurer entre 300 et 350 millions d'euros par an de 2011 à 2013, puis entre 400 et 450 millions d'euros à partir de 2014 – nous récupérerons alors 95 millions d'euros prélevés pour abonder l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU.

À partir de 2014, l'État versera, en outre, une dotation en capital en fonction des besoins : le rythme de montée en puissance des dépenses par rapport aux recettes nous permet de nous en passer jusqu'à cette date.

Quant aux dépenses du Grand Paris, elles se sont élevées à 8,5 millions d'euros en 2010 et à 33 millions en 2011. Pour 2012, nous prévoyons un montant de 171 millions d'euros. La montée en puissance de la SGP est très importante et conforme au rythme initialement prévu.

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