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Intervention de Marc Girard

Réunion du 9 juin 2010 à 19h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Marc Girard :

S'agit-il de danger ou de risque ? Quand on saute par la fenêtre du troisième étage, il y a danger. Le risque, c'est ce qui est inclus dans le rapport bénéficerisque. Je vous renvoie à la législation sur les produits de santé : le niveau de sécurité auquel on peut légitimement s'attendre présuppose que des études aient été faites. Ce qui est ennuyeux avec la pharmacovigilance, c'est qu'on ne fait pas les études adéquates chaque fois qu'il y a une alerte. Je ne connais pas aujourd'hui d'étude sérieuse sur le risque de mort subite après vaccination, alors qu'à l'évidence un certain nombre de cas nous obligent à nous poser la question.

C'est aussi pour cela que je dis que la pharmacovigilance ne fonctionne pas. Elle repose sur des notifications spontanées, marquées par un énorme taux de sous-notification. Vient un moment où, au vu de la situation, on se dit qu'il faudrait faire des études – et c'est là que ça bloque.

Ce problème est typiquement celui qui s'est posé lors de la multiplication des cas de scléroses en plaques qui a alarmé les neurologues de la Pitié, après la vaccination contre l'hépatite B. Le 15 septembre 1994, la première réunion de la commission de pharmacovigilance concluait que les soupçons appelaient des études épidémiologiques – études qui n'ont pas été faites. En 1998, M. Bernard Kouchner a tapé du poing sur la table en réclamant ces études. Or, dans l'intervalle, 30 millions de Français avaient été vaccinés et, à l'évidence, il était trop tard pour dire qu'il y avait un risque. On a donc lancé – je pourrais vous en parler longuement – des études conçues pour ne pas conclure, c'est-à-dire ne disposant pas de la puissance statistique suffisante, et on a annoncé qu'il n'y avait pas de risque démontré. Peut-être ai-je dit, un soir de fatigue, quelque chose qui dépassait ma pensée, mais, je le répète, ma position figure dans les centaines de pages que j'ai écrites, ainsi que les milliers de pages rédigées pour le pôle santé.

Autrefois, on ne prenait pas de médicaments si on n'était pas malade – pas d'anticancéreux si on n'avait pas de cancer, pas d'antimigraineux si on n'avait pas la migraine. Sous prétexte de prévention, on a réussi à faire tomber les limites naturelles du marché pharmaceutique et désormais, tous les gens en bonne santé, comme vous et moi, doivent prendre des médicaments. Le problème se pose en termes de rapport risquebénéfice, et non pas de danger.

La chose est facile à comprendre : dans les procès auxquels donne lieu le vaccin contre l'hépatite B, on nous dit qu'à défaut de bénéfice individuel, il y aurait un bénéfice collectif. Or, le seul niveau de risque qu'on puisse admettre pour un bénéfice collectif est un risque zéro. C'est bien là que le bât blesse : avec des vaccins qui tendent à couvrir de plus en plus de maladies dites bénignes de l'enfance – j'ai d'ailleurs écrit récemment que l'Institut de veille sanitaire devrait nous dire quelles sont les maladies bénignes qu'on a encore droit de contracter ! –, le bénéfice tend asymptotiquement vers zéro, ce qui n'est pas le cas pour le risque. Tout médicament comporte en effet des impuretés, un risque allergique, ou un risque auto-immun, etc. In fine, le rapport bénéficerisque de ces produits à usage préventif – car le propos pourrait s'élargir bien au-delà des vaccins – devient inacceptable. Le bénéfice individuel est proche de zéro. Quel est votre risque d'attraper une hépatite B grave, ou qui d'entre vous en a déjà vu un cas ? En revanche, même si on peut chipoter sur le chiffre, le risque n'est pas incompressible. Multipliez cela par le nombre de personnes vaccinées… J'attends encore une explication décente du fait que, tandis qu'on comptait en 1991, avant la campagne vaccinale, 25 000 scléroses en plaques dans ce pays, tout le monde s'accorde à dire qu'il y en a maintenant 80 000.

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