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Intervention de Gilles Leclair

Réunion du 25 mai 2011 à 16h00
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

Gilles Leclair, préfet délégué pour la défense et la sécurité auprès du préfet de la zone de défense Sud :

Il est évident que la répression n'est plus ce qu'elle était au début de ma carrière, quand la saisie de 5 kilogrammes de cannabis était une grosse affaire qui entraînait une réponse pénale. La loi du 31 décembre 1970 était sans doute inadaptée au traitement des toxicomanes car elle ciblait davantage les héroïnomanes que les consommateurs de haschich. C'est surtout parce que la justice est débordée que l'on observe ce laxisme dont vous avez fait état. Peu à peu, les magistrats ont renoncé à se faire présenter les personnes au-dessous d'un certain seuil de détention de produit et ont même renoncé à toute procédure à l'encontre des usagers de cannabis : au mieux, on les enregistre dans le fichier national des auteurs d'infraction à la législation sur les stupéfiants, mais il n'y a plus de réponse pénale et médicale. Or, dans le même temps, de nouvelles méthodes de trafic sont apparues et la teneur en tétrahydrocannabinol (THC) du cannabis, notamment produit en intérieur, a considérablement augmenté : outre que la loi française ne distingue pas drogues « dures » et « douces », les effets d'un cannabis dont la teneur en THC est de 35 % sont comparables à ceux de l'héroïne ou de la cocaïne…

Qui plus est, en dépit de ce laxisme, les « affaires » continuent : on peut acheter sur internet tout le matériel et toutes les graines que l'on veut et, avec un investissement de 15 000 euros, certains produisent une tonne de cannabis en intérieur en une année.

Il est paradoxal que, alors que la drogue sous-tend 70 % de la criminalité en France, on n'apporte pas de réponse suffisante face à l'usager de base, quand bien même c'est lui qui peut nous donner des informations importantes sur les trafiquants.

En trente ans de carrière, je ne puis que constater la chute vertigineuse des poursuites au « petit niveau », dont on voit aujourd'hui les effets négatifs sur le marché clandestin.

S'agissant du Maroc, j'ai été le premier à implanter un officier de liaison dans ce pays. Les choses ont été difficiles au début mais elles ont progressé et on est parvenu à monter des surveillances de livraisons. Récemment, nous avons réussi à remonter, à partir d'un individu qui n'avait aucune ressource en France, jusqu'à la maison d'une valeur de 750 000 euros qu'il possédait en fait au Maroc et à la faire saisir, car les autorités en ont désormais admis le principe. J'ignore si elles ont ratifié l'ensemble des conventions internationales et si elles les appliquent vraiment, mais l'on sent un frémissement sur cette question de la saisie des avoirs criminels.

Cela étant, si les trafiquants originaires du Maroc ou d'Algérie y investissent souvent leurs revenus illicites, ils le font aussi en Thaïlande, endroit « à la mode » en ce moment dans ce milieu. Cela confirme que si l'on veut lutter contre cette économie parallèle, on ne peut se contenter d'intervenir en France. En région Provence-Alpes-Côte d'Azur, cet aspect international est très important dans les enquêtes et j'incite les enquêteurs à en tenir le plus grand compte et à ne pas travailler en solitaire mais dans le cadre de coopérations, voire d'un système intégré.

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