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Intervention de Premier président de la Cour des comptes

Réunion du 8 mars 2011 à 10h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Premier président de la Cour des comptes :

M. Méhaignerie a relevé le paradoxe français : notre modèle social est le plus développé des pays d'Europe et, dans le même temps, l'imposition progressive sur le revenu y est la plus faible. Il faut cependant ajouter que les autres pays dans lesquels la protection sociale est forte, les pays nordiques notamment, ont aussi une TVA élevée – compensée par d'autres dispositions. Autrement dit, un dispositif de protection sociale très fort ne peut reposer exclusivement sur l'impôt sur le revenu, qui prendrait, sinon, un tour confiscatoire. De plus, en France, la redistribution est assurée pour un tiers par la fiscalité, mais pour deux tiers par le biais de prestations.

L'enquête que nous avons menée ne confirme pas ce qui vient d'être dit au sujet de l'imposition du patrimoine. Celle-ci n'est pas, selon nous, un élément de compétitivité déterminant. De surcroît, la comparaison avec l'Allemagne sur ce seul point est peu pertinente, les deux pays ayant à cet égard des positions atypiques en Europe – l'Allemagne parce qu'elle taxe peu la détention du patrimoine, la France parce qu'elle taxe plus. Il convient de s'intéresser aussi à des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou la Suisse, où il existe une imposition du patrimoine. En tout cas, le législateur que vous êtes a toute latitude pour réformer comme il le souhaite, la Cour ayant pour sa part formulé certaines observations sur l'assiette et les taux de l'ISF.

J'en viens à la question de la perte de compétitivité-coût. En réalité, l'évolution du coût du travail a été comparable en France à ce qu'elle a été dans de nombreux autres pays : c'est en Allemagne que la trajectoire a été différente. Il y a une dizaine d'années, l'Allemagne se considérait comme « l'homme malade » de l'Europe, parce que le coût du travail y était plus élevé qu'ailleurs, et notamment qu'en France. Ce n'est plus le cas : l'Allemagne a agi sur cette différence et désormais, même si l'observation doit être nuancée en fonction des secteurs d'activité, le coût du travail y est globalement le même qu'en France. Pour ce qui est de la compétitivité hors coût du travail, le décrochage s'explique par l'histoire ; la part de l'industrie est bien plus importante en Allemagne qu'en France.

Enfin, nous ne disons pas que la politique d'allègement des cotisations sociales sur les bas salaires a été inefficace mais nous constatons que la multiplication, dans le même temps, de taxes et prélèvements a pu en annuler les effets. À ces taxes et prélèvements multiples pesant sur les facteurs de production, qui n'existent pas en Allemagne, nous invitons le législateur à envisager de substituer des prélèvements plus universels, quitte à les assortir des dispositifs d'accompagnement nécessaires.

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