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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 8 mars 2011 à 10h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances :

Je remercie la Cour des comptes pour ce travail très intéressant et très riche qui ne manquera pas de donner lieu à débat. Sur certains points, d'ailleurs, je ne partage pas l'analyse du président de la commission des finances.

Une des grandes qualités de l'approche de la Cour est l'exhaustivité. Elle fait notamment ressortir que, avant de se livrer à des comparaisons, il faut avoir à l'esprit des différences à caractère historique entre nos deux systèmes. Premièrement, la compétitivité hors prix a toujours été meilleure en Allemagne qu'en France, compte tenu du type de biens que nos voisins produisent et des pays où ils exportent. Deuxièmement, la protection sociale française est plus étendue que la protection sociale allemande. Troisièmement, les Allemands ont constamment donné la priorité à l'assainissement des finances publiques et à la lutte contre l'inflation : dès qu'ils sont en situation de redresser les comptes et de revenir à l'équilibre, ils le font.

Lorsque je m'étais rendu en Allemagne avec le précédent président de la commission des finances, peu de temps avant qu'il ne soit nommé Premier président de la Cour des comptes, et alors que l'on ne disposait pas encore des données de sortie de crise, nous avions été frappés par la dureté des mesures de réduction des dépenses sociales – et notamment des allocations parentales, malgré le problème démographique que l'on sait. Je suis retourné en Allemagne au printemps 2010 avec le nouveau président de la commission des finances, puis en septembre avec le président de la commission des affaires sociales, Pierre Méhaignerie : en dépit de l'amélioration de la situation économique, nos interlocuteurs n'envisageaient nullement de revenir sur les mesures prises en matière de réduction de la dépense. C'est dire combien l'assainissement des comptes publics est une préoccupation forte.

Au-delà, il faut souligner une certaine constance dans les choix opérés ces dix dernières années. Ceux-ci respectent les lignes directrices fixées sous le gouvernement Schröder.

La première est une augmentation de la fiscalité sur la consommation et en matière d'environnement.

La deuxième concerne la fiscalité des entreprises et, plus généralement, la fiscalité du patrimoine, dont le taux moyen, très faible – 23,1 % d'imposition du capital, contre 38,8 % en France et 26,5 % de moyenne européenne –, vise à permettre le développement autofinancé et la transmission des entreprises dans les meilleures conditions.

La troisième est de maîtriser les coûts salariaux par la politique salariale beaucoup plus que par des diminutions de cotisations sociales.

Au regard de cette constance, on ne peut qu'être frappé par un certain désordre dans nos choix fiscaux et financiers.

Désordre budgétaire en matière de TVA, par exemple. En Allemagne, la TVA est regardée comme une ressource, dont on affirme clairement qu'elle doit financer des dépenses ; ce n'est pas un outil d'interventionnisme fiscal au profit de certains secteurs professionnels comme la restauration, n'est-ce pas, Monsieur Novelli.

Désordre également en termes de justice fiscale. Comme les Allemands, nous avons amorcé, dès 2000 – le rapporteur général de l'époque se souvient certainement de la réduction « Fabius » de 2003 – une politique de baisse du taux marginal de l'IR. Mais, parallèlement, nous avons continué à développer les niches fiscales.

Désordre, aussi, par allers et retours : aujourd'hui on réfléchit à la suppression du bouclier fiscal, considéré il y a quatre ans comme un point essentiel. On trouverait des exemples analogues lorsque l'opposition actuelle était aux commandes.

Enfin, l'Allemagne fait preuve d'un souci constant de donner aux entreprises une visibilité fiscale. Contrairement au président Cahuzac, je pense que l'on ne peut appréhender le niveau de la fiscalité sur le patrimoine sans tenir compte des effets pervers que celle-ci peut avoir sur le contrôle national des entreprises. L'Allemagne est capable de conserver ce contrôle ; la France, à cause de la fiscalité en général et de l'ISF en particulier, l'a perdu sur beaucoup de ses entreprises, en particulier les entreprises familiales de taille intermédiaire.

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