Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Xavier Timbeau

Réunion du 11 mai 2011 à 16h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Xavier Timbeau, directeur du département études et prévisions de l'Observatoire français des conjonctures économiques :

Les entreprises ont toujours avantage à la flexibilité, variable qui détermine le partage du risque entre le capital et le travail, et même au-delà entre l'entreprise et ses fournisseurs, voire ses clients. Tout est affaire d'équilibre.

Je m'inscris en faux contre la croyance selon laquelle La France serait un pays rigide. L'Organisation de coopération et de développement économiques établit des indicateurs de protection de l'emploi. Selon ces derniers, la protection que procure un contrat à durée indéterminée fait de la France un pays peu rigide où la législation du travail autorise le licenciement à des coûts qui sont bas par rapport aux autres pays développés. En revanche, le contrat à durée déterminée (CDD) révèle un degré de protection élevé. De manière paradoxale, le CDD est conçu et utilisé en France comme un instrument de flexibilité, alors qu'il apparaît comme un facteur de rigidité dans les comparaisons internationales. Sur le papier, le CDD peut être utilisé si et seulement si le poste à pourvoir est temporaire. La pratique prouve le contraire, et aucune jurisprudence n'est venue la sanctionner. L'application dément la lettre de la loi. Ainsi, en France, depuis une vingtaine d'années, le développement de l'intérim ou des CDD a largement permis d'augmenter la flexibilité.

M. Pierre Méhaignerie vient d'évoquer le cas d'une entreprise qui doit faire face à une chute de 30 % de l'activité. Par bonheur, les chocs d'une telle ampleur sont rares même si la question s'est posée avec la crise de 2008. Le cas est tellement exceptionnel qu'il est difficilement concevable d'adapter la législation en conséquence. Il vaut mieux se demander comment éviter de pareils à-coups. À cet égard, la comparaison avec l'Allemagne est instructive. Face à un choc plus brutal, l'Allemagne a fait preuve d'une plus grande capacité d'adaptation que la France grâce à un chômage partiel largement financé par le Gouvernement et à des mécanismes d'évolution des salaires qui ont permis aux entreprises de reporter une partie du prix de la flexibilité sur les salariés qui ont accepté des baisses de salaire. Ces mesures ont été prises en vue de ne pas porter atteinte au contrat de travail. La conclusion à en tirer pour nous, c'est que la flexibilité peut ne pas être synonyme de précarité. Certains théoriciens de l'économie du travail ont démontré que des contrats fragiles entre une entreprise et ses salariés provoquent des dysfonctionnements. Aucune des deux parties ne s'investit : l'entreprise ne forme pas le salarié et le salarié ne s'implique pas, si bien que la synergie escomptée et qui constitue l'essence même de l'entreprise ne se produit pas. Le débat sur la flexibilité a pris, en France, une mauvaise direction en faisant le choix d'une précarisation destructrice pour les salariés, mais qui, finalement, ne profite pas non plus à l'entreprise.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion