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Intervention de Jean-Claude Volot

Réunion du 8 juin 2011 à 16h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Jean-Claude Volot, médiateur des relations interentreprises industrielles et de la sous-traitance :

Je présenterai un rapport d'étape de ma mission, qui correspond au douzième des 23 points dégagés par les États généraux de l'industrie. Le poste de médiateur a été réclamé, dans toute la France, par les 5 000 personnes qui y ont participé. Mon équipe et moi-même travaillons depuis quatorze mois à améliorer les relations entre les entreprises. Compte tenu du « frottement » constaté entre les entreprises, c'est là un facteur d'amélioration de la compétitivité et de la productivité globales.

Malgré la peur de recourir au médiateur dans un pays où « l'omerta » reste très forte, une véritable bonne volonté se manifeste dans les états-majors des groupes, grands ou moins grands, pour changer les choses. Nous effectuons, je le rappelle, des médiations individuelles, collectives ou de branche, de telle sorte qu'au cours de cette première année, nos actions ont concerné 13 000 entreprises, soit environ 450 000 salariés, avec un taux de succès de plus de 86 %.

Le Gouvernement nous avait également demandé de procéder à un état des lieux des mauvaises pratiques : nous en avons identifié d'abord 35, puis 38 et avons constaté qu'elles étaient toutes illégales. Mais je rappelle la phrase de Churchill : « En Angleterre, tout est permis sauf ce qui est interdit ; en Allemagne, tout est interdit sauf ce qui est permis ; en France, tout est permis, même ce qui est interdit »… Il faudra du temps pour effacer les mauvais plis et faire en sorte que l'intelligence et la créativité soient pleinement utilisées dans l'intérêt de notre pays.

La médiation entraîne de nombreux effets induits, notamment un regain de confiance de la part des fournisseurs. La fonction de médiation, née dans l'industrie, s'étend désormais à tous les domaines des relations entre les entreprises, y compris commerciales et de services, l'industrie représentant aujourd'hui à peine la moitié des missions que nous effectuons. Mon équipe et moi sommes assez fiers de nos performances au service de l'économie française.

Pourquoi notre économie n'a-t-elle pas la compétitivité qu'elle pourrait avoir ? Les entreprises françaises sont très compétitives : 34 grands groupes industriels sont des leaders mondiaux. Mais la compétitivité de la France ne dépend pas seulement des entreprises ; il faut tenir compte de l'ensemble de leur environnement, notamment de l'État. À cet égard, nous attendons du Parlement qu'il remédie à l'insécurité fiscale : les règles changent sans cesse, plus encore qu'en matière sociale. L'insécurité entraîne un manque de confiance qui se traduit, chez les entrepreneurs comme chez l'ensemble des Français, par un comportement d'épargne, préjudiciable à l'investissement.

Ainsi l'exit tax, condamnée par Bruxelles à l'époque du gouvernement de M. Lionel Jospin, est à nouveau évoquée par des parlementaires de tous bords : il n'y a rien de mieux pour effrayer l'entrepreneur français ! De même, il est dramatique que l'on parle, à l'approche des élections, de remettre déjà en cause l'excellent dispositif « Dutreil », qui avait enfin mis la France, en matière de coût des successions, au niveau de l'Allemagne – où nombre d'entreprises du Mittelstand sont dirigées par la troisième génération d'une même famille… Quant au retour à la retraite à 60 ans, même s'il n'a pas lieu, son évocation ne contribue pas non plus à instaurer un climat de confiance.

Il faut savoir aussi, même si personne n'en parle, que les jugements des chambres sociales des cours d'appel sont rendus quasi systématiquement contre les entreprises, même si les tribunaux de prud'hommes leur avaient donné raison. Ce sont malheureusement des statistiques secrètes…

Des décisions assassines de la Cour de cassation, comme celle qui a été rendue voilà deux semaines à propos du délit de marchandage, contribuent à la même insécurité. La pénalisation du délit de marchandage a été instaurée en 1848 pour lutter contre l'esclavage. Et aujourd'hui on sanctionne pénalement le sous-traitant et le donneur d'ordre.

Le fait de revisiter en permanence l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et ses constituants est également un facteur de grande insécurité, qui ne permet pas à l'entreprise d'être performante.

Quant à la réglementation applicable aux jeunes entreprises innovantes, elle a été entièrement modifiée au bout d'un an : comment avoir confiance ? Il en va de même du crédit impôt recherche, modifié et réduit dès l'année suivant sa création. Le dispositif de l'ISF-PME qui, quels que soient ses défauts, a permis d'investir un milliard d'euros au cours des dernières années, n'a pas cessé, lui aussi, de faire l'objet de réductions.

On ne saurait pourtant imaginer que les parlementaires ne disposent pas de la capacité d'anticiper les conséquences de leurs décisions, ni qu'ils regrettent d'avoir permis aux entreprises d'être plus performantes dans la compétition mondiale !

Sur le terrain, je ne fais qu'entendre des témoignages qui corroborent ce qui est exposé dans les 7 000 pages du rapport des États généraux de l'industrie. Le républicain que je suis vous demande d'établir une politique durable en matière de fiscalité et, secondairement, de cotisations sociales.

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