Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de élisabeth Avril

Réunion du 16 février 2011 à 16h00
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

élisabeth Avril, directrice de Gaïa Paris :

Je suis médecin généraliste et directrice de l'association Gaïa Paris, membre du Collectif du 19 mai pour l'expérimentation d'une salle de consommation à moindres risques à Paris. Mon association gère un centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie et un centre d'accueil et d'accompagnement à la réduction de risques pour usagers de drogues. Depuis quinze ans, j'ai travaillé dans différents services, notamment à l'hôpital, sur le VIH et les hépatites. En 1998, nous avons créé le « Bus méthadone bas seuil » de Paris – centre de soins spécialisés aux toxicomanes, à bas seuil d'exigences –, qui reçoit une population d'usagers dont une partie est très marginalisée.

Notre action relève de la prévention dite « secondaire » : elle s'adresse à des usagers de drogues dépendants qui cumulent les facteurs de vulnérabilité et de précarité. Nous privilégions le travail de proximité et dispensons des soins tant somatiques que psychiatriques, socio-éducatifs et d'addictologie, et intervenons aussi dans la prévention du SIDA, des hépatites et d'autres infections. Il importe d'éviter d'opposer les soins et la réduction des risques : bien au contraire, il conviendrait d'assurer des passerelles entre ces deux approches.

Le débat doit reposer sur des publications scientifiques et non sur le discours moral qui se fait jour depuis un an. La réduction des risques est une politique de santé publique qui a eu dans les années 1990 des résultats très importants pour lutter contre le VIH. En effet, alors que la prévalence du SIDA était de 40 % chez les usagers de drogues, elle est aujourd'hui de 10 % à 12 %. Sans doute n'avons-nous pas su assez valoriser ce résultat, car la démarche qui l'a rendu possible est aujourd'hui remise en question. Sur le terrain, nous sommes confrontés à des populations vulnérables qui cumulent précarité sociale, affective et économique. Ces usagers peuvent être aussi bien jeunes que vieillissants, étrangers ou usagers de crack – et sans doute cette diversité observée à Paris se rencontre-t-elle également partout ailleurs. Ils sont, pour 60 % d'entre eux, atteints par l'hépatite C qui provoque chaque année quatre mille nouvelles contaminations. C'est là un désastre économique autant que sanitaire : dans sa version la plus simple, le traitement de l'hépatite C coûte au moins 10 000 euros et un tiers des patients en attente de greffe de foie sont des usagers de drogues. La morbidité, les décès, les cirrhoses et les hémorragies qui touchent ces populations sont le quotidien de nos associations.

Nous souhaitons stabiliser l'état de santé de ces personnes et réduire les risques sanitaires et les conséquences sociales de cette situation pour les usagers de drogues et pour la société, tout en réglant sur un plan égal les différents problèmes qui se posent – situation médicale, addictions, hébergement et insertion professionnelle. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes engagés dans le combat pour la réduction des risques par l'ouverture de salles de consommation à moindres risques pour les usagers les plus vulnérables, de centres de traitement par l'héroïne médicalisée et de centres d'hébergement pour les usagers de crack.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion