Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Thierry Blanchon

Réunion du 26 mai 2010 à 16h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Thierry Blanchon :

Pour ce qui est du retour d'expérience de l'hémisphère Sud, beaucoup d'articles ont été publiés, un colloque a été organisé dès septembre par l'Institut de veille sanitaire. Le problème est que l'on n'a jamais pu écarter totalement l'hypothèse de la dangerosité de cette pandémie avec des cas particulièrement graves, difficiles à pronostiquer. Nous avons très vite compris dans les groupes régionaux d'observation de la grippe et le réseau Sentinelles que l'épidémie était modérée, ce qui ne signifie pas que cette grippe n'était pas grave. Le nombre de patients hospitalisés, en réanimation ou en service de maladies infectieuses, et dont les prélèvements étaient positifs, était important, sans que l'on puisse toutefois faire de comparaisons avec les années précédentes puisqu'il n'existait pas antérieurement de dispositif hospitalier pérenne de surveillance du nombre de patients hospitalisés pour grippe, ni d'organisation systématique de prélèvements. Cela n'a été mis en place qu'à l'occasion de cette pandémie, pour laquelle il y avait obligation de déclaration. Le nombre de prélèvements effectués a été bien supérieur à ce qu'il est d'habitude, ce qui rend hasardeuse toute comparaison. Nous sommes incapables, encore aujourd'hui, de dire s'il y a eu ou non davantage de cas graves de grippe ayant exigé une hospitalisation que les autres années. Il nous est également très difficile de dire à partir de quel moment on a su que cela n'était pas si grave que cela – si cela a jamais été le cas. Le même biais vaut pour la mortalité. On entend encore dire dans les médias que la grippe H1N1 a été beaucoup moins meurtrière que la grippe saisonnière, ce qui n'a aucun sens car on ne dispose d'aucun élément de comparaison. Cette grippe a été à l'origine directe de la mort de quelque 400 personnes, ce qui est très supérieur à la mortalité directe observée d'habitude. De ce seul fait, personne ne pouvait assurer que nous n'avions pas affaire à une grippe grave. Cela étant, le virus de la grippe était aussi plus systématiquement recherché, ce qui a pu biaiser les données.

Pour ce qui est des vaccins, nous n'avons pas le sentiment qu'ils ont été livrés avec retard par rapport à ce qui avait été annoncé par les pouvoirs publics, même s'ils l'ont été trop tard par rapport à la vague épidémique qui avait démarré en septembre et avait déjà fortement grossi fin octobre, quand la vaccination a commencé.

Celle-ci a-t-elle cassé le pic épidémique ? Très sincèrement, non, car on n'a pas réussi à obtenir assez tôt une couverture vaccinale suffisante.

Enfin, quel pourcentage et quelles catégories de la population faut-il vacciner pour escompter une protection de l'ensemble ? La réponse à cette question relève du Comité de lutte contre la grippe qui compte parmi ses membres des épidémiologistes, des statisticiens, des mathématiciens, capables de modéliser les épidémies. Ces experts, notamment monsieur Fabrice Carrat, membre du Comité et qui fait partie de la même unité de l'institut national de la santé et de la recherche médicale que nous, s'apprêtent à adapter les paramètres des modèles en fonction des connaissances acquises sur la pandémie. C'est en améliorant encore les modèles disponibles qu'on parviendra à déterminer qui il faut vacciner et à quel moment pour « casser » l'épidémie. Pour le reste, je partage votre avis qu'il était aberrant de penser vacciner 47 millions de personnes par deux injections à trois semaines d'intervalle, alors que la pandémie était déjà bien installée quand les vaccins ont été livrés et que les médecins et infirmiers libéraux avaient été exclus de l'opération.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion