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Intervention de Jean-Claude Manuguerra

Réunion du 2 juin 2010 à 18h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Jean-Claude Manuguerra, président du Comité de lutte contre la grippe :

Monsieur le président, je vais commencer, si vous le voulez bien, par planter le décor en présentant le rôle du comité, qui ne concerne pas les aspects logistiques de la stratégie de vaccination.

La grippe est une maladie imprévisible extrêmement contagieuse, contre laquelle on peut malgré tout lutter par des moyens comme le vaccin, et plus récemment des médicaments antiviraux. Pour tous les membres de notre comité, il n'est pas inéluctable que nous subissions des épidémies ; nous anticipons ces épidémies pour diminuer leur impact sur la santé des populations, notamment la population qui vit sur le territoire français. Les plans de lutte sont des « boîtes à outils » disponibles, à utiliser en fonction de la situation. L'expertise scientifique est là pour aider les décideurs à prendre des décisions. Le Comité de lutte contre la grippe fait partie de cette expertise. Il résulte des recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis très longtemps, depuis que celle-ci a préparé son premier plan en 1999. Mais la France a commencé à se doter d'une instance d'expertise dès 1995 à travers l'ancêtre de l'Institut national de veille sanitaire qu'était le réseau national de santé publique.

Notre cellule est coordonnée depuis 1995 par la direction générale de la santé : elle a pour mission de conseiller le directeur général de la santé sur les moyens à mettre en oeuvre face à une épidémie de grippe en France, que ce soit la grippe H3N2 en 1997-1998 ou le virus H3N2, saisonnier, en 2000. Mais nous avons joué bien sûr en 2003 un rôle technique relativement substantiel dans la lutte contre le syndrome respiratoire aigu sévère, le SRAS. Depuis, la cellule de lutte a continué de jouer son rôle d'expertise sur les mesures à mettre en oeuvre, et à partir de janvier 2003, la cellule est devenue un groupe de travail non permanent du Conseil supérieur d'hygiène publique de France. C'est à partir du 1er janvier 2003 que M. Lucien Bénaïm, à l'époque directeur général de la santé, m'a demandé d'en assurer la présidence. Entre la disparition du Conseil supérieur d'hygiène public de France et son remplacement par le Haut conseil de la santé publique, la cellule était « dans l'air », il n'y avait plus de groupe de travail. Nous avons néanmoins continué à nous réunir au minimum une fois par mois, et même beaucoup plus. Afin de stabiliser les choses, le Comité de lutte contre la grippe a finalement été créé et officialisé par un décret du Premier ministre, suivi ensuite par des arrêtés de nomination. La mission du Comité de lutte contre la grippe est donc aujourd'hui d'apporter au ministre chargé de la santé une expertise collective, médicale et scientifique sur l'ensemble des mesures à mettre en oeuvre pour contrôler et réduire l'impact d'une épidémie ou d'une pandémie. Jusqu'à présent, les avis du comité ont été fournis à partir d'un consensus de ses membres. C'est une discussion collégiale et franche qui permet de dégager la meilleure solution et d'asseoir l'expertise. Lorsque les avis portent sur les vaccins et la vaccination – c'est assez important pour comprendre son fonctionnement – , le Comité de lutte contre la grippe a travaillé comme groupe de travail du Haut comité de la santé publique ou du Comité technique des vaccinations, et tous les avis que nous avons émis sur les vaccins ont été présentés au Comité technique des vaccinations, qui l'a approuvé après en avoir amendé ou non les termes, puis au Haut comité de la santé publique. Tous nos avis sur les vaccins sont donc publics, pas directement, mais par l'intermédiaire de l'avis abouti du Haut conseil.

Sur le fonctionnement du Comité de lutte contre la grippe, je rappellerai qu'il est composé de dix-sept personnes. Nous nous sommes réunis à de nombreuses reprises puisque nous avons, depuis le début de la pandémie, émis quarante-trois avis du 25 avril 2009 au 31 janvier 2010. Nous nous sommes ainsi réunis le lendemain de l'alerte mondiale le 24 avril 2009 et nous avons, dans les cent cinquante premiers jours, émis des avis tous les cinq jours, week-ends et jours fériés compris, en mai et juin. C'était donc un groupe extrêmement mobilisé, extrêmement attentif à pouvoir répondre aux questions qui lui étaient posées. S'agissant de l'organisation du groupe, je vous ai dit que pendant un certain temps, jusqu'à août 2008, nous n'avions plus d'existence légale mais que nous continuions à travailler. À partir du moment où le comité a été officiellement créé, un certain nombre d'outils ont dû être mis en place, notamment l'adoption d'un règlement intérieur que nous avons mis un certain temps à élaborer, puis à adopter. Il y avait sans doute aussi, comme me l'a fait remarquer le sénateur François Autain, à appliquer la loi qui régit les déclarations publiques d'intérêts. Celles-ci avaient d'ores et déjà été faite en grande partie par les membres du comité, du fait de leur appartenance à des structures qui l'exigeaient. La question de ces déclarations publiques d'intérêts est une affaire administrative qui ne concerne pas le président du comité. Pour ce qui me concerne, les liens que j'ai déclarés étaient, au cours de ces cinq dernières années, une participation à un congrès payée par le laboratoire Roche au Portugal – rencontre européenne qui a lieu tous les deux ans et qui s'intitule Options pour le contrôle sur la grippe – et une participation rémunérée à un séminaire organisé par les services de santé publique du Canada, également soutenu financièrement par le laboratoire Roche. Je précise que je n'ai ni actions, ni contrat de travail, ni contrat de consultant avec une des sociétés pharmaceutiques impliquées dans la fabrication ou la vente d'antiviraux, de vaccins ou de masques. J'ajoute enfin que je suis totalement solidaire des membres du comité et de toutes les décisions de celui-ci.

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