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Intervention de Alexandre de Juniac

Réunion du 25 janvier 2012 à 9h30
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Alexandre de Juniac :

En matière de charges, les différences entre les deux compagnies du groupe et Lufthansa portent principalement soit sur le financement des retraites, soit sur le financement de la branche famille – 300 millions pour KLM, 700 millions pour Lufthansa –, le mode de financement étant assis chez nous sur les salaires.

Nous avons commandé un nombre équivalent de Boeing 787, dit dreamliner, et d'Airbus A 350. Le contrat Boeing est signé, et celui pour l'A350, en cours de négociation, le sera dans les prochaines semaines. Cet Airbus est équipé de moteurs Rolls-Royce, pour la maintenance desquels nous sommes en négociation avec le motoriste. Les Boeing n'arriveront dans la flotte Air France qu'à partir de 2016, et les A 350 à partir de 2018.

Si je parle de « plan de transformation », c'est parce qu'il s'agit de transformer la maison pour l'adapter aux nouvelles réalités économiques – il ne s'agit pas simplement d'une restructuration sociale.

Le réseau des courts et des moyens courriers est censé revenir à l'équilibre à l'horizon du plan 2014. Il faut distinguer, d'une part, le réseau dit « point à point », principalement animé par les bases de province et par Orly, et, d'autre part, le réseau d'alimentation du hub qui, depuis la France ou l'Europe, ramène les passagers sur le hub de Roissy pour qu'ils prennent un long courrier. Le réseau d'alimentation du hub est très déficitaire, tandis que le réseau point à point est déficitaire, mais à un moindre degré – le rapport est d'environ 1 à 5. Or si l'on peut tolérer une légère perte sur le premier – puisque nous gagnons de l'argent sur le long courrier, l'investissement étant de type commercial –, on ne le peut pas pour le second. Par conséquent, notre objectif est de ramener le réseau point à point à l'équilibre à la fin de l'année 2013, et l'ensemble du réseau court et moyen-courrier à l'équilibre en 2014 afin qu'il dégage des profits en 2015.

En ce qui concerne les low cost, personne dans les compagnies historiques, que ce soit British Airways, Lufthansa ou Delta, n'a trouvé la solution miracle. J'observe en effet deux comportements différents. British Airways a vendu l'ensemble de son réseau court et moyen-courrier – si bien que de première compagnie européenne, elle est devenue la troisième, nettement après Lufthansa et Air France-KLM –, ce qu'elle semble avoir regretté puisqu'elle a racheté récemment British Midland (BMI). Cette stratégie n'est donc pas convaincante de notre point de vue.

Inversement, Lufthansa et Iberia ont des filiales low cost – Germanwings pour la première, Vueling et une autre en cours de création pour la seconde. Toutefois, cela ne les a cependant pas empêchées de rencontrer des difficultés sur le réseau court et moyen-courrier, au point que Lufthansa a lancé un plan d'économie de 1,5 milliard et demi.

En outre, les opérations des low cost filiales des grandes compagnies historiques sont toujours réalisées sous une marque différente. Pour notre part, nous avons nos propres opérations low cost, limitées j'en conviens, sous la marque Transavia. Notre conviction est qu'Air France ne sera pas une low cost. Opérer une compagnie low cost sous la marque Air France nous paraît en effet contreproductif en tirant la marque vers le bas. En revanche, développer des opérations low cost sur la base de compagnies opérant sous une autre marque filiale d'Air France est tout à fait possible.

Aux États-Unis, Delta a mis en place des lignes face à son concurrent historique Southwest, compagnie low cost, en parvenant à maintenir une prestation importante et à ne plus perdre de parts de marché sur ces lignes. Inversement, KLM met avec Transavia des avions de cette dernière sur les lignes opérées par ses propres avions, d'où un risque de cannibalisation ; certes, pour l'instant, cette stratégie a empêché les low cost de prendre des parts de marché sur les lignes en question, mais combien de temps cela va-t-il durer ? Il s'agit d'un sujet difficile : les solutions sont très variées – elles font d'ailleurs l'objet de notre groupe de travail court et moyen-courrier qui rendra ses conclusions au printemps.

Le fret représente 12 % de nos revenus, soit 2,7 milliards. Cette activité est extrêmement sensible à la conjoncture : elle s'est effondrée en 2008, puis s'est très nettement redressée en 2010, avant de redevenir déficitaire en 2011 en raison du ralentissement de la conjoncture dans la deuxième partie de l'année.

À ce sujet, il est très surprenant de constater que les lignes de fret dans le sens Chine Europe sont déficitaires alors qu'elles sont relativement bien équilibrées dans le sens Europe Chine. Paradoxalement, en effet, l'importation en provenance de l'Asie s'est effondrée, tandis que l'exportation en provenance de l'Europe est restée assez dynamique dans nos soutes. Le fret fait l'objet d'un plan spécifique dans le cadre du plan transformation afin qu'il restaure ses profits.

Air France-KLM fait partie de l'alliance internationale Sky Team, au sein de laquelle figurent notamment Delta Air Lines, China Eastern et China Southern et Korean Air. Notre joint venture avec Delta nous a permis d'avoir la plus grosse offre de sièges sur l'Atlantique nord et, ainsi, d'occuper une part de marché importante. Nous nous fixons le même objectif sur la Chine, marché immense qui se développe très rapidement et que nous ne pourrons capter sans les alliances avec China Southern ou China Eastern. Selon nous, il est donc fondamental de développer ces alliances ; il est également souhaitable d'y ajouter des membres. À cet égard, nous sommes en négociation avec diverses compagnies du sud-est asiatique et d'Amérique latine pour essayer d'ajouter de nouvelles compagnies à l'alliance Sky Team qui est pour nous un très important facteur d'alimentation de nos avions et de nos hubs.

Nous avons avec les gestionnaires d'aéroport des relations de clients à fournisseurs. Nous sommes le premier client des plateformes de Roissy et d'Orly. Il est vrai que la confusion est assez souvent entretenue entre qui fait quoi. Sachez que les bagages relèvent de la responsabilité d'Air France – et non d'Aéroports de Paris, comme beaucoup le pensent. En revanche, le fonctionnement du trieur à bagages est sous la responsabilité d'Aéroports de Paris. Les relations avec ce dernier sont très bonnes. L'infrastructure n'est pas optimale, mais Aéroports de Paris s'emploie à l'améliorer avec la construction du terminal S4. Air France opérera donc sur les terminaux S3, S4, E et F, ce dernier terminal étant dédié aux liaisons internes à l'espace Schengen. De gros efforts ont été faits, et nous finançons une partie des travaux par le biais des redevances. Nous finançons également la rénovation des salons et des espaces d'accueil.

S'agissant de la flotte, la livraison de deux A 380 a été retardée – ils arriveront au sein de la compagnie en 2016 au lieu de 2014 –, ainsi que celles d'un Boeing 777 et de trois A 320. De même, les options sur deux Boeing 777 ont été annulées. Au total, la flotte Air France-KLM restera globalement stable, conformément au scénario économique qui se base sur une croissance de trafic de 5 % sur la période de trois ans – notre croissance était auparavant de 5 % par an. Le scénario est donc prudent ; une amélioration de la conjoncture permettrait d'atténuer les effets négatifs de la situation économique sur la maison Air France.

Le plan de transformation n'est pas incompatible avec une desserte du territoire. Par contre, il est faux de dire que toutes les destinations sont rentables. Nous nous efforçons de négocier avec les collectivités territoriales, comme c'est le cas avec la Haute-Vienne ou la Corse. Pour l'outre-mer, la desserte est plutôt bonne pour la maison sur le plan économique.

La concurrence du rail est une difficulté pour notre compagnie, même si nous essayons d'impulser des partenariats avec la SNCF. Toute création de ligne TGV aboutit à un effondrement du trafic passager sur nos lignes – c'est le cas pour la desserte Lyon-Paris. La création de lignes TGV est un choix que je respecte, mais dont il faut mesurer les conséquences. De la même manière, la prolongation du TGV en Bretagne amènera inéluctablement une baisse du trafic passager pour cette région.

S'agissant de la proposition de loi sur le service dans les transports aériens, Air France s'est exprimée : elle respecte bien évidemment le droit de grève, mais estime que toute disposition visant à améliorer la prévisibilité du trafic ne peut qu'être favorable aux usagers. Une déclaration 48 heures à l'avance permettra à la compagnie de mettre en place une planification de ses vols et d'informer suffisamment tôt les passagers des vols maintenus ou annulés. Des dispositifs allant dans ce sens existent, mais ils sont très imparfaits – nous ne savons « gréer » nos avions en pilotes et en PNC que le matin. Les nouvelles dispositions que vous avez votées hier soir nous permettront de fixer le programme et d'informer les passagers 24 heures à l'avance. Le dispositif d'alarme social, qui existe depuis plusieurs années et qui fonctionne grâce à un dialogue permanent avec les organisations syndicales, n'a malheureusement pas empêché les conflits sociaux et les grèves.

Le conflit des personnels navigants commerciaux de cet automne a coûté à la compagnie un peu plus de 20 millions d'euros. Toute grève des personnels qui immobilise nos avions représente un coût très élevé pour la maison.

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