Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 3 juillet 2008 à 9h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Article 16

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

À ce stade du débat, je crois qu'il serait utile que le Gouvernement et la majorité s'expriment sur les objectifs de ce texte de loi.

Au fond, on nous présente une mécanique mais, sauf erreur de ma part, nous n'avons pas eu d'étude d'impact. Qu'attendez-vous de l'application de ce texte ? Espérez-vous des créations d'emplois, une amélioration de la compétitivité ? Dans cette dernière hypothèse, quel ratio de redistribution des richesses envisagez-vous ? Sur tout cela, vous êtes extrêmement silencieux.

Pourtant, c'est le coeur du problème. On ne modifie pas impunément autant d'articles du code du travail sans dire clairement quels sont les objectifs visés. Vous nous donnez quelques explications sur un besoin accru de flexibilité à l'intérieur des entreprises.

Pourtant, au vu des réactions, on constate que votre initiative ne reçoit aucun soutien de la part des très petites entreprises. Les représentants de l'UPA, de la CAPEB, mais aussi ceux de l'Union des professionnels libéraux ont considéré que le fait d'avoir des négociations au niveau de l'entreprise ne présentait strictement aucun intérêt pour eux, et que leur référence – comme nous le soutenons – devait être l'accord de branche.

De leur côté, les plus grandes entreprises se situaient plutôt dans une dynamique du respect de l'accord. Vous avez pu constater qu'après les négociations et la présentation du projet de loi, vous avez réussi à constituer une sorte de front uni regroupant toutes les organisations syndicales, mais aussi tous les signataires de l'accord, qui se sont étonnés : pourquoi ce texte, pourquoi maintenant, alors qu'avec la rédaction de l'article 17 nous avions répondu aux préoccupations des entreprises en obtenant l'accord des syndicats ?

Vous êtes passés outre et, depuis trois jours, nous attendons avec impatience que vous nous expliquiez pourquoi. Évidemment, il existe bien un cadrage idéologique dans lequel vous poursuivez votre travail mais, s'il présente probablement un grand intérêt pour l'UMP, il n'en a strictement aucun pour la France. Nous attendons vainement que vous nous indiquiez quelles sont vos attentes.

Lorsque vous débattez de la situation de la France, vous vous arc-boutez sur des statistiques. Pourtant, monsieur le ministre, comme on a pu le constater mardi soir lors de votre échange avec notre collègue Pierre-Alain Muet, vous êtes extrêmement gêné lorsque vous êtes confronté à la réalité. Pour pouvoir mener votre démarche à bien, vous devez surfer sur des idées reçues dont vous avez parfois réussi à convaincre l'opinion publique, mais qui ne reposent sur aucune réalité. La principale consiste à prétendre que la mauvaise situation de l'emploi en France serait due aux rigidités auxquelles serait confrontée la société.

Tout cela est totalement inexact. Pierre-Alain Muet vous a donné des statistiques, issues d'Eurostat, qui ne vous font pas plaisir – je le comprends bien – mais dont vous disposez aussi, pour vous montrer que cela ne sert strictement à rien de continuer à raconter partout que la durée du travail en France serait désastreuse comparée à celle de nos partenaires, tout simplement parce que les modes de calculs diffèrent. Lorsqu'on divise le nombre d'heures effectuées par le nombre de salariés qui travaillent à temps plein, les chiffres que tout le monde peut consulter sur Eurostat montrent bien que la France se situe plutôt au-dessus de ses partenaires.

Le débat politique, celui que nous devrions avoir si vous dépassiez cette affirmation idéologique, porte bien sur le contrat social et sur un choix de société. Cela ne revient pas au même de focaliser l'activité sur les gens qui travaillent à temps plein et, d'une certaine façon, se désintéresser des autres – ce qui est le modèle social actuellement en vigueur dans divers pays et notamment en Grande-Bretagne, et qui explique la contradiction des statistiques – ou de viser à ne laisser personne au bord de la route.

Chaque salarié a droit à cette considération. Surtout, au moment où les statistiques font apparaître une augmentation des maladies professionnelles, où le stress au travail devient l'une des préoccupations majeures pour l'avenir et dont les partenaires sociaux se sont saisis, on ne peut pas continuer à organiser la société autour de la précarité, de la flexibilité. On ne peut pas constater que beaucoup de salariés, cadres ou non cadres, sont harassés et rencontrent de plus en plus de difficultés au travail, et venir ici, sans aucune considération pour cette situation, proposer encore plus de flexibilité, d'insécurité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion