Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Valérie Pecresse

Réunion du 9 novembre 2009 à 15h00
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des affaires culturelles et de l'éducation, commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, commission des affaires

Valérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche :

Je commencerai par le crédit d'impôt-recherche en balayant toutes les questions qui ont été posées.

Ce dispositif est destiné, je vous le rappelle, à éviter les délocalisations des centres de recherche privés, attirés par une parité euro-dollar défavorable à notre pays ou par la qualité du personnel scientifique, en Asie notamment ; et, symétriquement, à ancrer sur le sol français les centres de recherche des groupes internationaux, notamment leurs centres européens. Ils ne s'implantaient plus en France depuis des années. Il s'agit également de stimuler la création d'entreprises innovantes.

Les premiers résultats quantitatifs de la réforme de 2008 montrent que le crédit d'impôt-recherche a été un amortisseur dès le démarrage de la crise, et qu'il servira de tremplin quand elle s'achèvera.

Tout d'abord, la réforme, qui correspond à un triplement du crédit d'impôt-recherche, est plébiscitée par les entreprises. Le nombre d'entreprises déclarantes a très fortement augmenté : plus 24 %. En 2009, le nombre de nouveaux déclarants a même doublé par rapport à 2008, ce qui signifie que le crédit d'impôt-recherche bénéficie à toutes les entreprises, et pas seulement aux plus grandes. La réforme a provoqué une accélération sans précédent de l'utilisation du crédit d'impôt-recherche. C'est un résultat tangible de la simplification du mécanisme. Nous avons supprimé la part liée à l'accroissement de l'effort, ce qui rend l'outil beaucoup plus facile à utiliser pour les petites entreprises qui ont du mal à faire de l'optimisation fiscale.

Deuxième enseignement, la réforme a incité les entreprises à investir en recherche-développement malgré la crise. En effet, l'effort privé de recherche-développement s'est maintenu en 2008 à 15 milliards. C'est vraiment un très bon résultat alors que le dernier trimestre de l'année 2008 a été calamiteux pour les entreprises et que les dépenses de recherche-développement sont très procycliques. Comme elles sont les premières à être amputées en cas de difficultés de trésorerie, elles amplifient l'évolution de la croissance.

Derrière la stabilité globale se cache une très grande diversité de situations. La moitié des entreprises ont augmenté leurs dépenses de recherche-développement grâce au levier que représente le crédit d'impôt–recherche. L'ensemble des entreprises a augmenté son effort de 2 %, à l'exception de deux secteurs qui ont été particulièrement touchés dès 2008 : l'automobile et l'aéronautique, dont les dépenses de recherche ont diminué de 20 %. Parmi les secteurs les plus dynamiques se trouvent les services de recherche-développement, qui ont accru leur effort de 11 %. Il s'agit d'une nébuleuse qui comprend notamment les services en informatique et la sous-traitance pour les grands groupes.

Selon un récent sondage commandé par le ministère, 90 % des entreprises considèrent qu'elles doivent innover, particulièrement dans le contexte économique actuel. Par ailleurs, 61 % d'entre elles trouvent que le crédit d'impôt-recherche les incite à investir dans les nouveaux projets de recherche, en cohérence avec les 58 % mentionnés dans l'étude précédente.

Elles sont 34 % à trouver que le crédit d'impôt-recherche les incite à collaborer davantage avec les laboratoires publics, grâce au doublement de l'avantage fiscal, qui est passé de 30 % à 60 % lorsqu'un investissement de recherche privée est fait dans un laboratoire public. J'en profite pour répondre à l'ensemble des orateurs qui se sont exprimés à ce sujet que c'est une très bonne chose.

Le jour anniversaire de la chute du mur de Berlin, je vous affirme qu'il subsiste d'autres murs, en particulier entre la recherche publique et la recherche privée. Faire de la recherche partenariale est un objectif d'intérêt général. Il s'agit non pas d'assujettir la recherche publique aux intérêts privés, mais de faire travailler ensemble la recherche appliquée et la recherche fondamentale en balayant une dichotomie artificielle et arbitraire.

Le crédit d'impôt-recherche doit avant tout accompagner les entreprises dans leur préparation de l'après-crise. Un bilan complet et une évaluation quantitative seront réalisés en 2010 sur la base des déclarations fiscales au titre de 2009.

De nouveaux projets de partenariat ont été annoncés, et c'est une excellente nouvelle pour notre pays. Je pense notamment à la poursuite du partenariat entre l'Institut national de recherche en informatique et en automatique et Microsoft, qui porte sur de la recherche ultra-fondamentale, contrairement à ce qu'on dit ici ou là. Microsoft investit dans les modèles mathématiques. Je me réjouis également du partenariat entre Sanofi et l'INSERM, de même que de l'engagement pris par une dizaine de laboratoires pharmaceutiques de doubler d'ici à 2012 leur budget de recherche partenariale avec l'Alliance des sciences de la vie et de la santé. L'accord a été signé au palais de l'Élysée. Ce sont des décisions de bon augure pour la recherche publique française.

La représentation nationale ne peut pas déplorer les difficultés qu'éprouve la recherche publique française à valoriser ses découvertes et, en même temps, critiquer les contrats passés avec la recherche privée.

Une dernière chose : le crédit d'impôt-recherche ne bénéficie pas particulièrement au secteur bancaire. Dans son rapport, Gilles Carrez dénonce la part croissante des banques et des assurances parmi les bénéficiaires du CIR. En réalité, cette évolution résulte d'un changement de traitement statistique par l'INSEE qui, en 2008, a revu ses nomenclatures d'activité et fait passer toutes les holdings des grands groupes industriels dans la catégorie « secteur bancaire, assurance, assistance et conseil ». Or les groupes industriels consolident leurs bénéfices au niveau de leur holding, qui bénéficie de ce fait du crédit d'impôt-recherche. Ainsi, si l'on retraite les chiffres de 2007, les holdings récupèrent 29,3 % du CIR et le secteur banques-assurances seulement 2,3 %. Autrement dit, le CIR profite à 60 % aux groupes industriels, à 29 % aux holdings, et à 2,3 % au secteur bancaire. Le reste se concentre sur des activités de services de R&D. J'insiste vraiment sur le fait que c'est le changement de nomenclature qui explique le phénomène mis en évidence dans le rapport. En aucun cas le CIR ne paie les bonus des traders ! Ainsi, Renault est une holding de groupe industriel classée par l'INSEE dans la nomenclature parmi les « banques et services financiers ». Le rapport sur le CIR a circulé puisque la Cour des comptes en fait état.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion