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Intervention de Michel Heinrich

Réunion du 15 décembre 2011 à 10h00
Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Heinrich, rapporteur :

Je voudrais tout d'abord adresser mes remerciements aux administrateurs du CEC, qui nous ont accompagnés tout au long de cette mission, et à Régis Juanico avec lequel j'ai travaillé en parfaite collaboration.

Essentielle pour l'amélioration du pilotage de l'action publique, l'évaluation de la performance des politiques sociales en Europe n'en constituait pas moins un véritable défi, pour le moins ambitieux, sinon audacieux !

Compte tenu du champ très large de ces politiques, du nombre des pays concernés et des délais impartis, il convenait en effet de trouver les voies et moyens d'envisager cette question dans sa globalité, tout en approfondissant l'analyse dans certains domaines pour pouvoir identifier des bonnes pratiques. Lors de la réunion du CEC du 7 avril dernier, nous vous avions exposé la démarche et les angles d'étude que nous envisagions dans cette perspective.

Pour la préparation du rapport, nous avons souhaité mobiliser une très large palette d'outils d'investigation et d'évaluation. Tout d'abord, le groupe de travail a entendu plus de quatre-vingts personnes, au cours de quarante auditions et tables rondes. Avec mon collègue Régis Juanico, nous nous sommes également rendus à Stockholm, Bruxelles, Londres et Berlin, où nous avons rencontré une quarantaine de représentants des différentes parties prenantes. Parallèlement, des questionnaires ont été adressés aux ambassades et aux Parlements dans quinze pays européens. Enfin, nous avons souhaité, avec l'accord du CEC, ainsi que l'a rappelé le Président Bernard Accoyer, bénéficier du concours de prestataires extérieurs pour la réalisation de deux études comparées concernant les thèmes d'étude retenus.

À la lumière de ces éléments, nous formulons vingt préconisations dans notre rapport, que nous proposons d'intituler « S'inspirer des meilleures pratiques européennes pour améliorer nos performances sociales ».

Concernant les éléments d'analyse transversale, la performance a tout d'abord été définie comme la capacité à atteindre des objectifs fixés, en termes notamment d'efficacité socio-économique pour le citoyen, d'efficience pour le contribuable et de qualité de service pour l'usager.

Afin d'accroître durablement la performance des politiques sociales, il est apparu nécessaire d'inscrire son évaluation dans une temporalité suffisamment longue. Il fallait pouvoir prendre en compte, par exemple, les économies qu'une réforme peut générer à plus ou moins long terme. C'est notamment le cas pour certaines de nos propositions qui sont susceptibles d'avoir ensuite un impact positif sur les finances sociales – je pense par exemple à celles qui visent à favoriser l'accès ou le retour à l'emploi, qu'il s'agisse des mères, seules ou non, ou de l'ensemble des chômeurs.

En tout état de cause, la mesure et le suivi régulier de la performance constitue aujourd'hui un impératif pour la gestion publique, en éclairant le décideur sur la pertinence des choix opérés. C'est aussi une exigence qu'une démocratie moderne doit s'imposer.

Au cours de nos travaux, nous avons pu mesurer combien les comparaisons internationales doivent inviter à la prudence : il ne faut pas porter de jugement trop hâtif, voire erroné, en termes de performance comparée et d'interprétation des nombreux indicateurs disponibles. Par exemple, dans certains pays, les taux d'emploi des femmes sont élevés, mais il s'agit souvent d'emplois à temps partiel, tandis que dans d'autres le taux de chômage est « optiquement » plus faible, mais en réalité masqué pour partie par une proportion beaucoup plus importante de personnes relevant du régime de l'incapacité. De même, en Allemagne, les « mini-jobs » concernent près de 4,5 millions de salariés, qui ne sont quasiment pas inclus dans les chiffres du chômage.

Par rapport aux autres pays européens, la France se caractérise par un niveau particulièrement élevé de dépenses sociales, qui représentent plus de 31 % du PIB : près de 600 milliards d'euros y sont consacrés ! Au cours des dernières décennies, l'augmentation des dépenses sociales a également été sensiblement plus marquée en France que dans d'autres pays européens. Au cours des dernières décennies, cette progression a été plus de deux fois supérieure à celle de la moyenne des pays de l'OCDE.

Par ailleurs, un premier examen des principales évaluations réalisées par les organisations internationales montre que les performances françaises sont le plus souvent au-dessus de la moyenne de ces pays.

La société française connaît ainsi un réel dynamisme démographique : après l'Irlande et l'Islande, la France a le taux de fécondité le plus élevé des pays européens. L'espérance de vie à la naissance y est assez élevée : notre pays est situé au quatrième rang en Europe dans ce domaine.

Il se situe également au quatrième rang pour la durée de la vie en retraite, qui est de 26,5 années en moyenne.

L'efficacité redistributive du système fïscalo-social dans son ensemble est incontestable : le rapport entre le revenu moyen des 10 % aux revenus les plus élevés et des 10 % aux revenus les plus faibles est de 1 à 7 en France après impôts et transferts, contre 1 à 9 en moyenne dans l'OCDE.

Au-delà de ces points forts du modèle français, on enregistre d'autres résultats moins favorables, en particulier la faiblesse des taux d'emploi par rapport à d'autres pays et par rapport aux objectifs européens. Même dans les domaines où les performances françaises sont bonnes, les évaluations soulignent que des progrès sont possibles : par exemple, dans le domaine de la santé, l'OCDE a montré qu'il existe une marge de progrès s'agissant de la lutte contre les inégalités, de la coordination des soins et de la réduction des frais administratifs.

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