Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Catherine Vidal

Réunion du 8 novembre 2011 à 16h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Catherine Vidal, neurobiologiste, directrice de recherche à l'Institut Pasteur :

Une autre étude intéressante a été menée pour illustrer les différences de scores en mathématiques. La présence des filles dans les filières scientifiques et les mathématiques est un enjeu important pour notre société ; il faut donc les encourager à se diriger vers ces filières. En 1990, une enquête réalisée aux États-Unis, sur un échantillon de 10 millions d'élèves, montrait que les garçons avaient de meilleurs scores que les filles aux tests de mathématiques. La même étude a été réalisée en 2008 : les filles ont obtenu les mêmes scores que les garçons. En vingt ans, les écarts de performances en mathématiques entre filles et garçons ont disparu. Ce résultat permet d'évacuer toute éventuelle raison biologique car il n'est pas possible qu'en vingt ans une mutation se soit produite dans le cerveau des filles pour les rendre bonne en maths ! C'est donc bien l'éducation, et non la biologie, qui explique les différences de scores entre les sexes en mathématiques et dans les autres disciplines.

J'en viens aux hormones, en particulier à leur action sur le comportement sexuel. Chez les animaux, les hormones jouent un rôle très important sur le cerveau en déterminant de façon précise les périodes de rut et d'accouplement qui correspondent à l'ovulation, donc à la réceptivité de la femelle. Chez l'humain, la sexualité et la reproduction sont totalement dissociées : les hormones ne jouent aucun rôle dans le moment des rencontres ni dans le choix du partenaire. Par exemple, il est reconnu que les homosexuels, femmes ou hommes, ne présentent pas de problèmes hormonaux et que les délinquants sexuels ne fabriquent pas un taux excessif de testostérone.

Autre idée reçue : les hormones sexuelles seraient impliquées dans les réactions de nervosité, d'agressivité, de dépression. Il convient de distinguer deux situations très différentes : dans les cas de bouleversements physiologiques majeurs, comme la grossesse, la ménopause, les traitements hormonaux de cas pathologiques avec un taux très bas ou très élevé d'hormones, il peut exister des corrélations avec les fluctuations de l'humeur. En revanche, dans les conditions physiologiques normales, aucune étude scientifique rigoureusement menée n'a permis de montrer que les hormones jouent un rôle déterminant sur l'humeur.

Pourquoi l'être humain, à l'inverse de l'animal, n'est-il pas sensible à l'action des hormones ? La réponse vient de l'évolution, qui a doté l'être humain d'un cortex cérébral exceptionnellement développé. Celui-ci s'est tellement développé en surface qu'il a dû se plier en circonvolutions pour arriver à tenir à l'intérieur de la boîte crânienne. Grâce à l'informatique, nous pouvons désormais modéliser le cortex cérébral et le déplier virtuellement : sa surface est de 2 m2 sur 3 mm d'épaisseur.

Le cortex cérébral occupe les deux tiers de notre cerveau et concentre les trois quarts des synapses. Sa surface est dix fois plus importante que chez le singe. Selon les spécialistes de l'évolution, c'est cette extension de la surface du cortex cérébral qui a permis l'émergence du langage, de la pensée réflexive, de la conscience, de l'imagination qui confèrent à l'être humain la liberté de choix dans ses actions et ses comportements. Dans sa vie personnelle et sociale, l'être humain utilise des stratégies intelligentes, basées sur des représentations mentales indépendantes de l'influence des hormones et des gènes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion