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Intervention de Didier Jourdan

Réunion du 24 novembre 2011 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Didier Jourdan, vice-président de la commission Prévention, éducation et promotion de la santé du Haut conseil de la santé publique :

J'insiste d'emblée sur la complexité et les enjeux du pilotage national de la prévention. Les propos que nous avons entendus jusqu'à présent sont restés centrés sur la seule optimisation de la prévention médicalisée. Or la puissance publique se doit de construire un pilotage national structuré autour de l'autre volet, à savoir la mobilisation de l'ensemble des acteurs en faveur de la prévention. Traiter la question de la gouvernance et du pilotage de la prévention sous le seul angle de la prévention sanitaire, c'est prendre le risque de passer à côté de nos meilleures chances en termes de gains de santé. L'histoire de la santé publique démontre en effet que ce sont les dispositifs permettant d'agir sur les déterminants de la santé qui ont permis d'obtenir l'essentiel de ces gains. La question posée est donc de savoir comment mobiliser l'ensemble des acteurs, notamment le milieu scolaire où travaillent un million de personnes qui peuvent être – et sont déjà – des acteurs de prévention.

Nous reprenons à notre compte la première recommandation de la Cour des comptes sur le développement d'une politique transversale. Celle-ci ne peut cependant être pertinente qu'à la condition de permettre aux structures concernées, et notamment aux différentes institutions, d'acculturer la prévention dans leur propre gouvernance. Là réside sans doute l'enjeu clef. Nous ne manquons pas d'injonctions en direction de l'Éducation nationale – la « sur-prescription » d'objectifs est devenue effarante, à tel point qu'on peut se demander ce qui ne relève pas du champ de l'école. Faut-il pour autant abandonner l'idée selon laquelle le système éducatif doit être un acteur de prévention ? Nous devons trouver les moyens de construire une politique de santé scolaire adaptée à la culture, aux missions et à l'identité professionnelle des acteurs de l'école. Tout l'enjeu est d'avoir à la fois des dispositifs médicalisés extrêmement centrés sur la prévention et la capacité de développer des politiques adaptées. La prévention dans le système éducatif existe déjà, mais il faut encore progresser sur un certain nombre de points : sur la redéfinition du rôle du système éducatif – qui doit être centrée sur ce que sont les missions de l'école, notamment sa mission émancipatrice, comme la réussite des élèves – et surtout sur l'environnement scolaire – François Bourdillon a évoqué la cantine – et psychosocial.

La politique de santé de l'Éducation nationale doit être axée sur les trois grands pôles classiques : prévention, protection et éducation. Un deuxième élément aujourd'hui déterminant est la création d'un curriculum. Il existe, selon les pays européens, des disciplines d'éducation à la santé ou de santé à l'école. Ce n'est pas nécessairement pertinent en France, mais il existe un véritable enjeu à structurer un curriculum santé – de la maternelle au lycée – centré sur le développement de compétences qui sont d'abord des compétences scolaires. Prenons l'exemple de la sexualité : pour pouvoir faire passer le moment venu des messages de prévention, il faudra d'abord avoir travaillé en maternelle sur le schéma corporel et l'estime de soi. Nous sommes donc dans une dynamique qui doit se construire en référence aux missions de l'école, dans le cadre d'un curriculum.

En termes de prévention, c'est la mise en cohérence des stratégies de prévention à l'échelon régional qui fait le plus défaut. Cela s'explique par l'absence de culture commune aux différents acteurs. La question de l'accompagnement et de la formation de ces acteurs est un enjeu déterminant pour des progrès en ce domaine.

La France est l'un des seuls pays à ne pas disposer d'un réseau des écoles en santé. La volonté de ne pas introduire de différence entre les établissements est ici une limite. Pour agir sur les inégalités de santé, sans doute faut-il permettre aux établissements qui le souhaitent de progresser sur cette question – à condition bien sûr qu'ils respectent un cahier des charges ou une charte –, surtout lorsqu'ils scolarisent de nombreux enfants vulnérables.

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