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Intervention de éric Gissler

Réunion du 9 novembre 2011 à 18h00
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

éric Gissler, inspecteur général des finances, médiateur désigné par le Premier ministre :

Sur ce point, j'ai en partie répondu en rappelant que, sur le moment, la définition du contrat spéculatif était moins évidente qu'on essaie de le faire croire aujourd'hui. La Compagnie nationale des commissaires aux comptes explique, dans le cas de SA d'HLM soumises à la comptabilité commerciale, comment on comptabilise les prêts structurés ou les swaps. La partie spéculative est très faible, et l'indexation sur le franc suisse ne suffit pas pour classer un swap comme spéculatif. Considérer comme spéculatif tout swap qui ne serait pas simple ou binaire serait inexact sur le plan juridique et comptable. Du reste, une circulaire n'est pas un texte législatif. À mon sens, on se tromperait en considérant que, la plupart des swaps étant spéculatifs, il aurait été interdit de les conclure et en pointant à ce titre un défaut de vigilance.

Monsieur Plagnol, j'ai commencé à travailler sur la situation des collectivités locales à partir du dossier délicat d'Angoulême. Dans la matrice de l'État, le cas des collectivités locales en difficulté obéit à une certaine logique. Angoulême n'est pas un cas isolé. Songeons aux collectivités de la région parisienne aux prises avec la géothermie, à celles dont le parc d'animation n'a pas fonctionné, ou encore à cette malheureuse commune attaquée au civil par un promoteur. Le nouveau maire n'ayant pas tenu les engagements du précédent, elle avait été condamnée à payer une amende représentant deux fois son budget annuel. La politique du Gouvernement, quelle que soit la majorité politique, a toujours été de traiter ces problèmes par exception. On regarde ce que peut financer une collectivité, dans des conditions difficiles et pas seulement en supprimant les dépenses de confort. Les maires successifs ont assumé une partie des folies dépensières de leurs prédécesseurs, mais une autre partie, non négligeable, a été assurée par les banques, et une autre encore par l'État, grâce à des subventions d'équilibre payées pendant cinq ans sur le budget communal. Des subventions exceptionnelles ont été versées pour des investissements qui semblaient nécessaires, l'État intervenant de manière presque dérogatoire. Il faut conserver cette philosophie pour respecter l'équilibre entre l'autonomie des collectivités locales, le refus de l'aléa moral, et le fait que, comme le disait le premier président de la Cour des comptes, on ne peut pas tondre un oeuf, c'est-à-dire qu'il y a un moment où il faut bien que d'autres paient.

Monsieur Calméjane, au-delà même du sujet des emprunts à risque, les statistiques concernant les collectivités locales sont très peu prédictives. On se trompe lourdement et fréquemment, dans ce domaine. On croit parfois repérer une situation dramatique qui se redresse, alors qu'on n'a pas vu venir une catastrophe. Une des raisons pour lesquelles on a tant de mal à apprécier les enjeux est que, pendant la période bonifiée, les collectivités ont tranquillement classé leurs prêts en taux fixe. Je ne crois guère à la mise en place de ratios nationaux, tant qu'on ne dispose pas d'une sécurité absolue sur la manière dont les dossiers sont remplis, avec la meilleure volonté du monde, par des gens qui n'ont pas toujours la compétence pour le faire.

Il va de soi, monsieur Gagnaire, que certaines banques étaient plus désintéressées que d'autres. Cela dit, même si certains élus peuvent avoir du mal à saisir des problèmes d'écart de taux, on n'a pas besoin d'être financier pour comprendre qu'on prend un risque quand on souscrit un prêt indexé sur le cours du franc suisse par rapport à l'euro. L'élu, même de base, a changé depuis le XIXe siècle. Avant l'euro, tout le monde avait franchi une frontière et s'était rendu compte que, d'une année sur l'autre, pour une même quantité de francs français, on n'obtenait pas, la même quantité de francs suisses, de pesetas ou de lires. Même sur les conseils de Dexia, il me semble incompréhensible qu'on ait pu prendre un risque pareil, surtout sur trente ans.

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