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Intervention de Claude Bartolone

Réunion du 16 novembre 2011 à 16h00
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Bartolone, président :

Permettez-moi de prendre moi aussi l'exemple d'une collectivité que je connais bien. L'emprunt total de cette collectivité s'élève aujourd'hui à environ 750 millions d'euros, dont les deux tiers ont été souscrits à taux fixe et un tiers à taux variable. À la demande expresse du président de la collectivité, un emprunt structuré, de 20 à 30 millions d'euros, a été souscrit. L'administration était plutôt réticente, mais le président, qui est très informé et très impliqué dans la gestion de sa collectivité, a expliqué qu'ainsi, il gagnerait un point environ sur les taux d'intérêt – en empruntant à 2 % au lieu de 3 %. Il avait calculé que si ce gain se maintenait pendant cinq ou six ans, la collectivité serait toujours gagnante, même si un effet de cliquet venait à jouer. Le taux d'intérêt moyen de l'ensemble de la dette s'établit aujourd'hui à 3,09 %. Nous voyons donc qu'un élu, il est vrai très au fait des questions financières, a fait un choix politique qui permettrait, selon lui, d'obtenir globalement un meilleur taux. Celle-ci aurait certes pu y gagner plus si les taux n'étaient pas remontés, mais le taux d'intérêt moyen – emprunt structuré compris – reste tout à fait acceptable. Bref, les banques n'ont pas systématiquement eu la démarche commerciale offensive qu'on leur prête : nous avons ici le choix politique d'un élu informé, qui a décidé, malgré les alertes qui pouvaient être données ici ou là. J'assume ce choix politique ; en l'occurrence, l'État n'avait pas à se prononcer.

Je vous rejoins en partie sur le deuxième point. À titre personnel, je serais particulièrement choqué si l'État venait aujourd'hui donner des leçons à ceux qui n'ont pas eu la capacité – ou les moyens – de se montrer vigilants, ou n'ont pas été alertés de cette nécessité. J'étais président de conseil général pendant cette période. Nous avons été démarchés comme d'autres, mais le conseil général du Bas-Rhin n'a souscrit aucun emprunt structuré : la responsable des finances préférait s'en tenir à des produits plus sûrs, et je me suis rangé à son avis. Il ne faudrait pas donner le sentiment que les responsables politiques n'avaient d'autre solution que de se laisser faire. Mais comme je vous l'ai dit, une autre collectivité que je connais a fait, elle, le choix politique de souscrire un emprunt structuré. Je conçois que des élus mal informés aient pu prendre des décisions sans avoir les compétences nécessaires pour agir en pleine connaissance de cause, ou que les responsables financiers de certaines collectivités – je parle ici des services – n'aient pas eu les capacités d'apprécier ce qui leur était proposé, ou n'aient pas transmis aux élus toutes les informations nécessaires. Pour autant, il ne me semble pas qu'il faille crier haro sur l'État.

Cela étant, je serais particulièrement peiné que les grandes institutions de contrôle de l'État viennent aujourd'hui donner des leçons car elles n'ont pas averti les élus qu'il fallait être plus vigilant. En tout cas, elles auraient pu le faire plus et mieux, surtout au regard de la conjoncture. À l'époque, chacun s'efforçait de diminuer au maximum l'impact de sa dette, et personne ne parlait d'emprunts toxiques ! Il ne s'agissait que d'une façon d'emprunter parmi d'autres, dont on pouvait penser qu'elle serait plus avantageuse. Certains élus disposaient des capacités d'analyse nécessaires pour se déterminer en toute connaissance de cause, d'autres non – et c'est dommage. Mais n'accréditons pas l'idée que, d'une manière générale, l'État n'aurait pas été à la hauteur. Les propos du secrétaire général de l'AMF – que j'estime personnellement beaucoup et qui sait ce qui se passe dans les collectivités – suffisent en effet à montrer que celles-ci ne veulent pas d'un renforcement des contrôles de l'État.

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