Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du 22 novembre 2011 à 15h00
Sécurité du transport aérien civil — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les députés communistes, républicains et du parti de gauche partagent l'objectif de cette proposition de loi, qui est de renforcer la sécurité du transport aérien civil. De récentes tragédies prouvent que, en la matière, les efforts fournis ne suffisent jamais à écarter les risques, puisque la libéralisation effrénée du secteur, entraînant une concurrence impitoyable, pousse certaines compagnies à en prendre. Il n'est pas rare que les stratégies de réduction des coûts, destinées à maintenir les marges des transporteurs, conduisent à une détérioration des conditions de sécurité.

La dérégulation du secteur suscite l'accroissement du trafic aérien : il est donc important de se pencher sur la question de la sécurité aérienne civile, afin d'éviter un accroissement concomitant du nombre des accidents.

Il a été rappelé à plusieurs reprises au cours de nos débats que la question de la sécurité aérienne est une prérogative régalienne de l'État. Il est dommage que les zélateurs de l'intervention publique n'aient pas donné de la voix plus tôt, par exemple lorsqu'il s'est agi d'enrayer les privatisations à tous crins, ou de défendre une harmonisation par le haut des normes sociales et techniques en matière de transport aérien.

La proposition de loi de notre collègue Odile Saugues avance deux pistes. Premièrement, elle propose la création d'une Haute Autorité de sécurité aérienne, sorte d'autorité morale permettant de certifier la transparence et l'impartialité des autorités d'enquêtes et d'analyses. Deuxièmement, elle vise à transformer le Bureau d'enquêtes et d'analyses, dont le statut est actuellement peu sécurisé du point de vue juridique, en établissement public à caractère administratif.

L'amélioration de la transparence des informations communiquées lors des catastrophes aériennes, qui est une mission essentielle du BEA, doit être confortée. Faciliter l'accès aux éléments des enquêtes est un objectif qui fait consensus. Un accès plus rapide aux boîtes noires et, plus généralement, un raccourcissement des délais d'accès aux données techniques ne peuvent que contribuer à l'amélioration des conditions de sécurité pour tous.

La piste de la création d'une autorité administrative indépendante telle qu'une Haute Autorité de la sécurité aérienne peut être explorée. Si nous ne sommes pas partisans du remplacement systématique des services de l'État par des entités indépendantes, la neutralisation des pressions des acteurs privés ou du Gouvernement peut avoir un intérêt dans le cadre des procédures d'enquête qui mettent parfois en cause des « gros » du secteur.

Mais, comme nous l'avons rappelé en séance, la création d'un tel organisme ne saurait avoir pour conséquence le démantèlement de la Direction générale de l'aviation civile et de ses missions. Le maintien de cette administration, qui est une pièce essentielle du dispositif de contrôle et de sécurité aériens, est indispensable.

C'est la même question que pose le changement de statut du BEA. Si le statut d'établissement public à caractère administratif présente l'avantage de permettre une autonomie budgétaire, il porte aussi en germe un possible affaiblissement de l'intervention de l'État.

On peut comprendre les polémiques suscitées par l'enquête sur la catastrophe du vol AF 447 Rio-Paris, tout en étant attentif aux inquiétudes des personnels du BEA. Ceux-ci ne sont pas favorables à un changement de statut qui pourrait ouvrir la voie à une précarisation de leurs conditions de travail.

Plus qu'une évolution statutaire, l'essentiel est de donner au BEA les moyens financiers, humains et techniques suffisants pour poursuivre ses missions dans les meilleures conditions et les meilleurs délais. En matière de sécurité, et tout particulièrement de sécurité aérienne, les politiques d'austérité doivent être rejetées : il en va de la vie des usagers, donc de nos concitoyens. À ce titre, on ne peut que déplorer l'amputation de 500 emplois en trois ans de la DGAC : cela ne présage rien de bon.

La course aux économies porte un double coup à la sécurité : d'une part, en ce qui concerne les pratiques des compagnies, qui restreignent la présence humaine dans les appareils, accélèrent le turn-over et cherchent à grappiller du temps et de l'argent partout où c'est possible ; d'autre part, du côté des autorités de contrôle, auxquelles les États demandent de faire plus avec moins pour répondre aux injonctions européennes de libéralisation et de mise en concurrence. Dans un secteur où la concurrence qui fait rage a abouti à des plans sociaux et à des destructions d'emploi – les conflits qui ont récemment opposé les salariés d'Air France à leur direction en témoignent – il faut défendre coûte que coûte la sécurité face aux appétits financiers.

Les députés communistes, républicains, citoyens et du parti de gauche voteront cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion