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Intervention de Jacques Pélissard

Réunion du 2 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Écologie développement et aménagement durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Pélissard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour la prévention des risques et la conduite et le pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer :

Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, monsieur le ministre chargé des transports, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j'interviens, au nom de la commission des finances, à propos de deux programmes de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Les crédits de paiement s'élèvent à 3,9 milliards d'euros sur les 9,7 milliards d'euros de la mission.

Le premier programme, le plus important pour nous, est le programme « Prévention des risques ». Il s'articule autour de quatre priorités environnementales : la sûreté nucléaire, la prévention des risques technologiques et des pollutions, la prévention des risques naturels et hydrauliques, et enfin la gestion de l'après-mine.

Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit de porter les crédits de ce programme à 417 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 312 millions d'euros en crédits de paiement. Ceux-ci connaissent ainsi une progression de 2,9 %, et les autorisations d'engagement de 11,8 %, par rapport à 2011.

Ces dotations budgétaires ne représentent qu'une partie de l'éventail des moyens mis au service de la politique de prévention des risques ; j'ai identifié quatre autres sources de financement.

Le programme bénéficie en effet de crédits de soutien en provenance du programme support du ministère à hauteur de 345 millions d'euros et de 19 millions d'euros en provenance de la mission « Agriculture ».

L'ADEME bénéficie de 498 millions d'euros de la taxe générale sur les activités polluantes.

Les recettes du Fonds Barnier sont évaluées à 165 millions d'euros pour 2012.

Enfin, le montant de la taxe sur les installations nucléaires de base instituée au profit de l'IRSN, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, au titre de l'appui technique à l'ASN, l'Autorité de sûreté nucléaire, est évalué à 48 millions d'euros pour 2012.

L'ensemble de ces moyens traduit la volonté de l'État de mettre au premier rang de ses priorités la protection contre les risques naturels et technologiques et l'engagement du Gouvernement à poursuivre le financement des actions du Grenelle de l'environnement.

Je tiens à souligner l'importance de cet engagement dans un contexte mondial où le nombre et l'ampleur des catastrophes naturelles, ainsi que leurs conséquences économiques et sociales, s'accroissent, de même que la sensibilité de la société face à des risques qui menacent la sécurité des personnes et l'environnement.

Parmi les priorités que je voudrais évoquer, figure tout d'abord la sûreté nucléaire après la catastrophe de Fukushima, conséquence du séisme et du tsunami qui ont touché le Japon le 11 mars 2011. Cette catastrophe soulève la question des risques naturels et de leur interaction avec les risques technologiques, et rappelle que les approches des différents domaines de risques doivent être croisées.

Le présent projet de loi de finances augmente significativement les moyens financiers et humains de l'Autorité de sûreté nucléaire et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Chargés des expertises et des audits post-Fukushima, ils bénéficieront de quarante-quatre emplois supplémentaires et de moyens financiers accrus de près de 20 millions d'euros. Leur mobilisation a été remarquable. Depuis le début de la crise, l'ASN comme l'IRSN sont intervenus en appui des pouvoirs publics et ont mis à la disposition des citoyens une information fiable sur cet accident et ses conséquences.

Tout en continuant à assurer un contrôle exigeant des installations nucléaires vieillissantes, il est fondamental que les deux organismes puissent tirer toutes les leçons de l'accident survenu à la centrale de Fukushima. La conduite du retour d'expérience sera un processus long s'étalant sur plusieurs années. Il faudra la conduire avec vigilance.

L'ASN va mener des évaluations complémentaires de sûreté de l'ensemble des installations nucléaires de base au regard des thématiques identifiées à la lumière de l'accident. Les inspecteurs de l'ASN seront également impliqués dans le contrôle du recours aux entreprises sous-traitantes, ce dont je me félicite.

Face à l'inquiétude de la population, l'Agence devra accroître sa participation aux commissions locales d'information et de surveillance et multiplier les actions d'information.

Pour mener à bien ces nouvelles actions, elle bénéficiera en 2012 d'une augmentation de ses crédits de fonctionnement à hauteur de 4 millions d'euros pour les besoins d'expertise et d'un renfort de vingt-deux agents de l'IRSN qui seront mis à disposition auprès de l'ASN. Je souhaite vivement, madame la ministre, que l'ASN puisse bénéficier au plus vite de ces renforts. À moins brève échéance, je souhaiterais, sans toucher au plafond d'emplois global du ministère, un mouvement de bascule entre le plafond d'emplois de l'IRSN et celui de l'ASN pour permettre à l'ASN d'intégrer ces renforts dans ses effectifs et d'en avoir ainsi une meilleure maîtrise.

Les moyens déployés par le présent projet de loi de finances sont significatifs d'un réel engagement, mais devront être confortés pour répondre aux enjeux fondamentaux de la sûreté nucléaire.

La deuxième priorité concerne la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques. Je me félicite de la forte augmentation des autorisations d'engagement – 37 millions d'euros pour 2012 – destinés au financement des mesures foncières et à l'accélération du rythme des prescriptions.

En septembre 2011, sur un objectif de 420 plans, 390 sont prescrits, soit 90 %, et 110 approuvés, c'est-à-dire 25 %. Mais dix-huit nécessitent des mesures foncières et seules trois conventions ont été signées. Deux difficultés principales freinent encore la mise en oeuvre de ces plans.

La première porte sur le financement des mesures foncières. Le Gouvernement propose, je crois, un amendement visant à accélérer la signature des conventions quand l'enjeu ne dépasse pas 30 millions, imposant, en cas de blocage, une répartition égale d'un tiers entre l'État, les collectivités et les exploitants à l'origine du risque. Le mécanisme est intéressant puisque le plafonnement est fixé à 15 % du montant annuel de la contribution économique territoriale qu'elles perçoivent.

La seconde difficulté concerne le financement des travaux prescrits par les plans de prévention des risques technologiques. Si elle a étendu le dispositif du crédit d'impôt aux propriétaires bailleurs, la loi de finances pour 2011 a aussi ramené le taux de ce crédit d'impôt à 30 % et surtout abaissé le plafond de ce dernier, en le portant à 10 000 euros pour un couple au lieu de 30 000 euros. Ces dispositions ont eu pour effet collatéral grave de mettre en difficulté les particuliers qui veulent investir. L'association nationale des communes pour la maîtrise des risques technologiques majeurs est d'accord avec l'analyse que je porte, dénonçant un sentiment d'injustice profond ressenti par les habitants situés en zone Seveso.

En accord avec votre cabinet, madame la ministre, je déposerai un amendement qui, sans toucher au taux du crédit d'impôt, vise à remonter le plafond de 10 000 euros à 20 000 euros. Le coût de cette disposition, qui concerne en grande partie des ménages à faibles revenus, représente une somme modeste comparée à une dépense fiscale de l'ordre de 4,5 millions d'euros par an et permettrait de satisfaire la très grande partie des cas qui se présentent dans les zones Seveso. Cet amendement sera discuté dans le cadre de l'examen des articles non rattachés, lundi 14 novembre.

Dix ans après l'accident d'AZF, je souhaiterais que ces blocages soient levés.

La poursuite des actions de mise en oeuvre du Grenelle, en particulier du deuxième plan national santé environnement se déroule de manière satisfaisante. Dans le domaine de la qualité de l'air, du règlement REACH et de la cohorte ELFE, les choses ont avancé, et c'est tant mieux.

S'agissant des points noirs environnementaux, 64 millions d'euros seront consacrés à la résorption des points noirs du bruit et les actions relatives à la prévention des risques émergents – nanomatériaux, ondes électromagnétiques – se mettent en place. Là encore, nous avançons convenablement.

En ce qui concerne les déchets, la politique de prévention sur le terrain commence à prendre son essor et va dans le sens de la réduction des déchets incinérés et stockés fixée par le Grenelle.

Mon troisième point concerne la prévention des risques naturels. Les dotations permettront de poursuivre en priorité les plans stratégiques relevant de la prévention des inondations : plan national submersions rapides, nouvel appel à projets pour les PAPI, les plans d'action de prévention des inondations, mais aussi mise en oeuvre de la directive cadre sur les inondations, élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles et plan séisme Antilles. Tout ceci avance dans de bonnes conditions.

Je me félicite de la montée en puissance du plan submersions rapides que vous avez présenté, madame la ministre, le 17 février dernier. Il propose, pour la période 2011-2016, des projets d'investissement liés aux ouvrages de protection des populations sur les territoires les plus vulnérables et porte sur trois types d'aléas naturels : les submersions marines, les inondations par ruissellement ou crues soudaines et les ruptures de digues fluviales ou maritimes. Il sera complété par le nouvel appel à projets du programme d'action de prévention des inondations.

Je veux vous sensibiliser sur un point qui me paraît inquiétant, la situation du Fonds Barnier, acteur majeur en matière de prévention des risques naturels. Après avoir été longtemps excédentaire, ses dépenses devraient atteindre 285 millions d'euros en 2011, pour des recettes de 257 millions. Même si l'équilibre est préservé en 2012, il existe toute une série de nouvelles opérations de financement : la fin du programme de délocalisation de biens engagés après la tempête Xynthia, le financement des plans de prévention des inondations pour la période 2011-2015, le plan national submersions rapides d'ici à 2016 et l'achèvement de la couverture des territoires à risques par les PPRN.

Je terminerai en évoquant rapidement le programme support « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer ». Ce programme est important puisqu'il s'établit à 3,56 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 3,57 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une économie de 6 % en autorisations d'engagement.

Le schéma d'emplois fait état d'une réduction de 1 309 emplois, soit plus de 2 % des effectifs du ministère. À cet égard, madame la ministre, je tiens à saluer l'effort de modération de la dépense, en ce qui concerne en particulier les dépenses de personnels qui a pu être conduit grâce à la réorganisation en profondeur de votre ministère.

Enfin, je souhaite appeler votre attention sur la nécessité d'un accompagnement des personnels dans la lisibilité de leur mission et des structures dans lesquelles ils vont exercer.

Au vu de ces observations, la commission des finances a adopté les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », et j'invite notre assemblée à faire de même.

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