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Intervention de Marie-Luce Penchard

Réunion du 26 octobre 2011 à 16h00
Commission des affaires économiques

Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités territoriales, chargée de l'Outre-Mer :

Je commencerai par répondre aux questions du rapporteur. S'agissant du calendrier de mise en place du SMA avec 6 000 volontaires, le délai a été fixé à 2014, en décalage de deux ans par rapport au délai initial comme je l'avais indiqué lors du débat de l'année dernière ; ce calendrier devrait être tenu.

Sur le logement, vous avez fait un certain nombre d'observations, concernant notamment la possibilité de mieux utiliser la LBU pour les projets en accession sociale. Je voudrais vous indiquer à ce propos qu'un groupe de travail va être mis en place le 29 novembre sur ces questions avec les bailleurs et l'Union sociale pour l'habitat (USH), sachant que, pour l'affectation des crédits par zone, un recensement est réalisé sur la base des outils existants et les enveloppes budgétaires déterminées sur ce fondement en concertation avec les bailleurs sociaux. Concernant le logement insalubre, vous savez que j'ai soutenu la proposition de loi portée par votre collège Serge Letchimy. Ce texte va dans le bon sens en permettant en complément de la réalisation de logements sociaux neufs de prendre en compte la situation particulière de certains territoires dans lesquels l'habitat est fortement dégradé. Les arrêtés sont en cours de préparation et j'espère qu'ils pourront être publiés avant la fin du mois de novembre 2011.

Vous avez noté, monsieur le rapporteur, l'existence d'inégalités en matière de continuité territoriale : à ce propos, nous nous étions demandés s'il fallait assouplir les critères pour l'attribution des bons de voyages en Polynésie, Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna, en raison de l'éloignement de ces territoires. J'ai commandé une étude sur la question et nous serons en capacité de faire des propositions dès le début de l'année 2012. Je constate, par ailleurs, que lorsque nous conventionnons avec certains territoires, comme nous l'avons fait à la Réunion ou en Martinique, cela nous permet de démultiplier notre intervention et de faire en sorte qu'un plus grand nombre de nos compatriotes bénéficient de l'aide à la continuité territoriale. S'agissant de la Guyane, le choix a été fait de consacrer une partie des crédits à la desserte intérieure.

Bien évidemment, le budget est l'expression politique d'une politique. C'est évident. Mais le budget de l'État n'a pas vocation à régler tous les problèmes qui se posent en outre-mer. Mme Taubira disait que nous n'avons pas la même calculette ! J'aurais envie de dire que nous ne lisons pas la même chose. Même s'il est vrai que l'on peut faire parler les chiffres, il y a quand même une réalité dans le soutien qui a été apporté à l'outre mer. Je peux vous donner des chiffres : dans le cadre du CIOM, avec le small business act, ce sont près de 80 millions d'euros de garanties de prêt à court terme qui ont été apportées à 280 entreprises, permettant de préserver 10 000 emplois. Dans le cadre de la médiation, nous avons pu sauver 6 404 emplois – vous voyez que je donne des chiffres très précis. Même si je ne peux pas me satisfaire du taux de chômage des jeunes, je me félicite que nous ayons eu le souci d'en proposer un traitement social, avec 52 271 contrats aidés contre 46 223 contrats en 2010, la Réunion mobilisant d'ailleurs 67,8 % des contrats aidés affectés à l'outre-mer. Ce qui me permet de dire que la situation particulière qui prévaut à la Réunion, avec la fin d'un grand chantier qui n'avait pas été préparé et a conduit à une augmentation du chômage, a bien été prise en compte : je rappelle que l'État a conservé le milliard d'euros qui était prévu pour le tramtrain et j'ai entendu aujourd'hui le président de la région annoncer qu'il y aurait 8 000 emplois pour la Réunion.

S'agissant des questions fiscales, notamment l'abattement de 30 % sur l'impôt sur les sociétés, on sait aujourd'hui que 60 % de cet abattement bénéficiait à seulement 7 % des entreprises. Le périmètre était celui de la défiscalisation et ne concernait pas le secteur du commerce. J'ai entendu que la suppression de cet abattement remettrait en cause les zones franches globales d'activité. Je voudrais vous donner un chiffre : une entreprise qui avait un bénéfice de 100 000 euros, sans l'abattement ni la zone franche globale d'activité, devrait payer 22 000 euros d'impôt sur les sociétés ; en supprimant l'abattement, au lieu de payer 4 000 euros, elle devra payer 6 000 euros. Si on me dit qu'une telle entreprise ne peut pas supporter cet effort de 2000 euros, je dis qu'il faut cesser de soutenir cette activité et porter notre effort sur une autre activité, et c'est ce que nous faisons pour le développement endogène. Le développement endogène n'est pas pour nous seulement un moyen de soutenir des projets venant de l'extérieur des territoires mais aussi des initiatives locales : j'en veux pour preuve ce que nous avons fait à la Martinique avec l'agroalimentaire notamment pour la transformation de la banane ainsi qu'à la Réunion pour soutenir les filières de la viande et des fruits et légumes et j'ajoute qu'en Guyane, cinq projets de biomasse sont soutenus par le gouvernement.

Je veux aussi répondre, à propos du logement social, sur les interrogations de M. Jean-Charles Taugourdeau au sujet de l'articulation entre la LBU et la défiscalisation. Le démarrage a été difficile, je n'en disconviens pas. J'ai été la première à dire qu'il fallait revoir la circulaire, ce que j'ai fait. Par ailleurs, j'ai rencontré les opérateurs et j'ai pu constater, lors du dernier congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH), que les bailleurs sont plutôt aujourd'hui satisfaits par la montée en charge des opérations financées. C'est parce que nous avions mis en place à la fois le dispositif LBU et la défiscalisation que nous avons pu obtenir un nombre beaucoup plus important de logements financés. Dans un contexte difficile, nous avons ainsi soutenu la commande publique et sauvé des emplois dans le bâtiment, même si j'aurais préféré sauvegarder tous les emplois qui ont été perdus à La Réunion.

Vous avez également parlé de Mayotte. Le gouvernement a accompagné ce territoire pour aller vers la départementalisation, respectant ainsi la parole donnée vis-à-vis des Mahorais. Nous avons organisé la consultation et beaucoup d'entre vous ont participé au débat. Vous avez eu connaissance du Pacte pour la départementalisation. Le président de la République a reçu les élus, très en amont, nous en avons débattu au Parlement. Un texte de loi a été voté. Nous avons alors indiqué les conditions dans lesquelles la départementalisation allait se faire, c'est-à-dire de manière progressive et adaptée. Progressive ne signifie pas que nous ne souhaitons pas aller vers l'égalité sociale, de même que nous n'avons jamais considéré que Mayotte doit être un département au rabais. Nous avons bien le souci d'accompagner les Mahorais pour qu'ils obtiennent à la fois un statut garant de l'égalité de leurs droits mais nous devions aussi prendre garde à préserver le tissu économique de Mayotte, particulièrement fragile. Au vu des informations dont je dispose – et je ne veux pas que mes propos soient interprétés comme une quelconque forme de chantage – le conflit actuellement en cours menace près de 2 800 emplois. On peut ainsi craindre que Mayotte ne se relève pas économiquement d'une telle crise, si celle-ci se poursuit. C'est pourquoi nous devons rapidement retrouver les chemins du dialogue. C'est à ma demande, que le préfet de Mayotte a engagé des négociations en vue de la conclusion d'un protocole de sortie de crise. La distribution a accepté de baisser de plus de 10 % les prix de 8 produits de première nécessité identifiés par les syndicats. Cette baisse est aujourd'hui effective même si le protocole n'est pas signé par la distribution. Il existe en effet une négociation qui se poursuit sur d'autres produits, pour lesquels nous devons encore analyser la manière dont les prix sont fixés. Une délégation est même venue de la Réunion pour essayer de faire par comparaison un point sur les modalités de fixation des prix. Ce travail n'ayant pu aboutir, c'est tout le rôle du médiateur sur place de voir quels moyens peuvent encore être mis en oeuvre pour venir en aide aux familles modestes. J'ai personnellement proposé de venir en aide à ces familles par le biais d'une convention avec la caisse d'allocations familiales, cela n'est pas une formule choquante car elle existe partout ailleurs. Seulement, l'État s'est substitué car la collectivité, qui pourrait le faire dans le cadre de sa politique sociale – elle dispose de la compétence – mais elle n'en a pas la capacité financière, du fait de son déficit. Nous devons impérativement prendre en compte la situation de cette collectivité, qui consacre actuellement 7 millions d'euros à la politique sociale, sur les 330 millions d'euros de son budget. Elle doit pouvoir retrouver les moyens d'exercer cette compétence.

J'espère avoir répondu globalement à l'ensemble des questions qui m'ont été posées. Au travers de la LODEOM et des décisions prises dans le cadre du CIOM, nous avons voulu tenir un discours de vérité et dire exactement où nous en sommes, sachant que bien des mesures ne sont aujourd'hui pas toujours perceptibles par la population mais qui ont été bien engagées. Le conseil des ministres de ce matin a d'ailleurs fait un point sur l'état d'avancement de ces décisions.

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