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Intervention de Christian Coigné

Réunion du 5 octobre 2011 à 16h30
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

Christian Coigné, maire de Sassenage, Isère :

Nous avons signé en 2006 avec Dexia une convention officielle de partenariat pour « favoriser l'investissement et le développement durable dans un contexte de maîtrise des frais de fonctionnement et de prélèvement. » Je la cite : « Cette analyse et ce suivi s'effectueront chaque année à l'occasion de plusieurs rendez-vous. En début d'année, une réunion sera organisée avec la ville de Sassenage et Dexia afin de définir les objectifs que se fixe la ville de Sassenage pour la gestion de la dette. » Malgré cette convention, nous n'avons jamais été alertés sur les risques auxquels nous exposaient nos emprunts et n'avons jamais rencontré Dexia autrement qu'à notre initiative, alors même que Dexia local devait, aux termes du contrat, assurer « un suivi des marchés financiers, afin d'aider la ville de Sassenage à atteindre ses objectifs. ». Il y a donc eu défaut de conseil.

Le contrat que nous avons signé pour lisser la dette comprend une courbe précise accompagnée de ce commentaire : « La valeur de 1,44 franc suisse pour un euro n'a jamais été atteinte, même lors des attentats du 11 septembre 2001. La Banque nationale suisse conduit une politique durable de stabilité du change du franc suisse contre l'euro. Son objectif est le maintien du cours de change à 1,55 franc suisse pour un euro. La Suisse a comme premier partenaire commercial la zone euro. Son économie est donc fortement dépendante d'une parité de change favorable aux exportations. Le franc suisse est une valeur refuge. Les fortes tensions géopolitiques liées à l'Iran n'ont pas affecté le franc suisse ». La suite du document évoque la mise en place d'un taux fixe. Considérant qu'il y a tromperie dans les deux contrats, nous nous sommes entourés d'un expert juridique et d'un expert technique, pour envisager la possibilité d'un recours.

J'ai consulté le préfet pour savoir comment s'exercerait le contrôle de légalité, dès lors que, cette année, nous n'avions pas provisionné le surplus correspondant aux intérêts. Il m'a répondu que, le cas échéant, il ordonnerait un prélèvement d'office. On m'a conseillé de renégocier avec Dexia, et de remonter de l'échelon régional au niveau national, ce que je n'ai pas pu obtenir. La seule proposition que j'aie reçue visait à allonger l'emprunt de deux ans, en passant à un taux fixe de 8,2 %, après versement d'une indemnité de 9,8 millions.

Les contrats des banques doivent être plus lisibles, sincères et honnêtes, et leur contenu devrait être préalablement validé par l'Autorité des marchés financiers, peut-être avec l'aide de l'Association des maires de France, selon la procédure en vigueur pour l'information donnée aux particuliers par les sociétés cotées. Les banques doivent fournir des simulations extrêmes, notamment des tests de sensibilité, ce qu'elles ne font pas aujourd'hui. Enfin, il faut créer une instance de conseil en gestion de dette, composée de représentants détachés de la Caisse des dépôts et consignations, des anciennes missions d'expertise économique et financière du Trésor public et de fonctionnaires des autres fonctions publiques.

Aujourd'hui, la confiance est perdue. Pour nous financer, allons-nous nous tourner vers l'État, vers des conseils indépendants ou vers d'autres banques ? Pour l'instant, nous nous enfonçons, faute de pouvoir payer, et nous cherchons tous les moyens de nous en sortir. L'expertise dont nous devons faire preuve augmente sans cesse. Quand j'ai pris la mairie, en 2001, nous étions sous contrôle de la tutelle. J'en suis sorti en 2006, au prix de beaucoup d'efforts, et voilà que nous retombons dans les difficultés. Je gère une commune de 11 000 habitants avec quelques cadres. Tous étaient favorables, à l'époque, à la signature du contrat, et nul n'éprouvait le moindre doute. Le maire d'une commune voisine, qui présidait alors la Commission des finances à l'Assemblée nationale, a signé un contrat comparable tant pour sa commune que pour la communauté d'agglomération qu'il présidait. À qui pourrons-nous faire confiance, si une instance ne peut nous aider et interdire les dérives ? Les élus que nous sommes doivent, sans être techniciens, prendre des décisions importantes en termes de gestion. De ce fait, ils doivent pouvoir s'appuyer sur d'autres instances, notamment l'État. Je sais que les préfectures emploient des experts de la finance. Ceux-ci devraient pouvoir intervenir dans de tels dossiers, quitte à les bloquer, comme c'est le cas dans d'autres pays.

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