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Intervention de Étienne Pinte

Réunion du 19 octobre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉtienne Pinte :

Monsieur le président, madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, mes chers collègues, une dette publique de 1 692 milliards d'euros représentant plus de 45,4 milliards d'euros de remboursement annuel, soit davantage que le produit de l'impôt sur le revenu, autant que les budgets de la défense et de l'emploi, un déficit budgétaire de plus de 95 milliards d'euros, un déficit du commerce extérieur qui devrait atteindre malheureusement 75 milliards d'euros fin 2011, enfin plus de 2 750 000 chômeurs en France métropolitaine, tel est le constat de l'état notre pays en ce mois d'octobre.

Devant de tels chiffres, aucun parlementaire de la majorité ou de l'opposition ne peut rester insensible. Ce serait irresponsable et inconscient de ne rien faire et de laisser notre situation économique et financière dériver au fil de l'eau. Il faut prendre les dispositions indispensables au redressement de nos comptes publics et prouver à nos concitoyens, à nos partenaires européens et aux marchés internationaux notre crédibilité.

Le Gouvernement nous propose 12 milliards pour faire face aux difficultés économiques et financières, que nous vivons depuis plusieurs années. J'adhère à l'objectif d'un déficit budgétaire de 5,7 % du produit intérieur brut pour cette année et de 4,5 % pour 2012 pour arriver à 3 % en 2013.

Ces mesures sont-elles suffisantes dans l'environnement européen et mondial qui se caractérise par une instabilité très préoccupante ? Personnellement, je pense qu'il faut aller beaucoup plus loin et envisager des recettes supplémentaires de 15 à 20 milliards d'euros pour faire face non seulement à nos déficits, mais aussi pour créer des marges de manoeuvre en faveur de l'emploi.

J'ai la conviction que l'effort fiscal des plus hauts revenus doit aller plus loin que celui proposé initialement par le Gouvernement dans ce projet de loi, d'autant qu'un certain nombre de nos concitoyens très bien pourvus sont prêts à participer au redressement de nos déficits. Faut-il, au nom de la solidarité générale, relever tous les produits et prestations bénéficiant du taux de TVA réduit à 2,1 % ou 5,5 % ? Faut-il raboter de 10 % toutes les niches fiscales, comme le suggère notre rapporteur général du budget Gilles Carrez ? Le projet de loi de finances pour 2012 doit en tout cas nous permettre de prendre conscience des efforts supplémentaires à réaliser pour redresser nos comptes publics. Mais toutes les mesures ponctuelles qui nous sont proposées ne suffisent pas.

Je propose une augmentation d'au moins un point de la TVA engendrant 10 milliards d'euros de recettes. Cette mesure ne devrait pas empêcher une consommation soutenue indispensable, mais insuffisante, pour relancer la croissance. Cette suggestion a pour objectif de maintenir mais surtout de créer des emplois grâce à une baisse des prélèvements sociaux sur les entreprises. Elle devrait permettre une maîtrise des importations, en particulier en provenance de nos partenaires européens, à qui, actuellement, nous offrons des points de croissance. Je préfère la relance de la croissance et de la consommation par la création d'emplois. Ce sont d'ailleurs des décisions qui ont donné de très bons résultats chez nos amis danois.

En matière de diminution des dépenses, il faut aussi aller plus loin. Depuis plusieurs années, le Gouvernement a engagé des réformes courageuses pour diminuer les dépenses de l'État – réforme générale des politiques publiques, remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite –, mais les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances. Il faut analyser les raisons de ces déceptions et affiner l'évaluation des besoins des services publics. Tous les secteurs ne doivent pas être traités de la même manière. Il y a des priorités à redéfinir. La situation économique et financière de la France est, en fait, à mes yeux, beaucoup plus grave que ce que nous voulons faire croire à nos concitoyens, et ils en sont convaincus. La preuve : le taux d'épargne de précaution n'a jamais été aussi élevé.

Les Français ont compris l'enjeu : essayer de nous sauver tout de suite, tous ensemble. À cet égard, nos concitoyens semblent ne pas être particulièrement offusqués, ni choqués par la réflexion de François Fillon sur la convergence, à terme, avec l'Allemagne en matière de retraites.

Le décalage entre notre peuple et nos dirigeants s'accroît, à mes yeux, de façon très inquiétante, accéléré par la médiatisation, en temps réel, des informations provenant des quatre coins du monde. Je rappelle que la campagne du Premier ministre Cameron, en Grande-Bretagne, annonçant « du sang et des larmes » à ses concitoyens ne l'a pas empêché de gagner les élections législatives. Les propositions budgétaires sur les parcs d'attraction, les jus de fruits sucrés, le tabac ou les nuits d'hôtels ne sont pas, à mes yeux, à la hauteur de notre situation. Nous sommes ridicules et nous ne donnons pas l'exemple à nos partenaires européens de s'engager plus fermement dans la voie de la vertu. Pourtant, les Français sont prêts aux efforts. Encore faut-il les considérer comme des adultes responsables.

Alors, soyons conscients, soyons courageux, en un mot, soyons responsables, « prenons le taureau par les cornes » et décidons des mesures à la hauteur d'une situation actuellement très inquiétante et qui peut s'aggraver dans les semaines et les mois à venir. Si nous n'allons pas dès maintenant plus loin dans les économies et les recettes, nous risquons de voir la note AAA de la France se dégrader. Personne ne le souhaite. Alors, prenons les mesures supplémentaires nécessaires et indispensables pour éviter le pire. Je compte sur vous, madame la ministre, dès maintenant, puisque le Premier ministre nous laisse entrevoir de nouveaux efforts. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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