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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 17 octobre 2011 à 17h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2011

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Nous avons l'habitude des risques non chiffrables puisque, hélas, nous en avons débattu. J'invite ceux qui douteraient de cette qualification à se rapprocher des spécialistes de la Caisse des dépôts et des responsables de l'administration.

Sur ces 10 milliards, une partie bénéficiera d'une garantie spécifique. C'est d'ailleurs parce qu'ils représentent un risque non chiffrable qu'ils ont besoin d'une garantie supplémentaire des États.

Pour la première masse de 90 milliards d'euros, une garantie de refinancement est prévue jusqu'en 2021, dont un peu plus de 30 % pour l'État français et le solde pour la Belgique et le Luxembourg. Pour la partie de 77 milliards d'euros, dont les 10 milliards d'actifs toxiques, l'État assure une garantie supplémentaire, à hauteur de 70 % et pas au-delà. Étant entendu qu'une franchise de 500 millions d'euros a été consentie, cela signifie que, pour un temps illimité, l'État garantit 70 % de 9,5 milliards, d'où les 6,65 milliards présents dans le projet de loi.

Reste 3,35 milliards d'euros de risque non chiffrable qui ne sont pas garantis par l'État dans le cadre de cette garantie supplémentaire et qui le sont par conséquent dans le cadre de la première garantie, c'est-à-dire jusqu'en 2021. C'est là que réside une difficulté que beaucoup, sur tous les bancs, ont vue, notamment les parlementaires qui siègent au conseil de surveillance de la Caisse des dépôts.

À partir de 2021, cette dernière ne bénéficiera plus de la garantie de refinancement des États et n'aura plus pour seul interlocuteur, en cas de difficulté, que Dexia, ou ce qu'il en restera. Ce risque de 3,35 milliards d'euros risque donc de peser, à l'échéance de dix ans, sur la Caisse des dépôts. Or celle-ci ne doit pas l'assumer seule. Non que je préfère que l'État l'assume, mais la Caisse remplit des missions d'intérêt général, telles que le financement du logement social ou la rénovation des hôpitaux et des universités, qui justifient l'emploi d'une épargne populaire défiscalisée mais certainement pas le fait d'assumer des risques non chiffrables engendrés par les dirigeants d'une banque privée, dont j'ai déjà dit qu'ils s'étaient retirés fortune faite dans des conditions contestables.

Il faut donc, monsieur le ministre, que le Gouvernement évolue dans ce qu'il propose au Parlement, s'agissant de ces 3,35 milliards d'euros qui risquent d'échoir à la Caisse sans garantie d'État et alors même que Dexia ne serait plus un interlocuteur solvable. Cela me semble être le problème majeur que pose le projet de loi de finances rectificatives que vous nous proposez.

Mes chers collègues, nous connaissons ce que le ministre lui-même a appelé en commission « une réplique de la crise » – à supposer, dans le meilleur des cas, que celle-ci se soit jamais terminée. On peut regretter que, pendant trois ans, si des efforts et des tentatives ont été effectués pour régulariser un certain nombre de situations, pour réguler le capitalisme et pour que n'importe quoi cesse de faire norme, ils n'aient pas pleinement abouti, loin s'en faut puisque cette réplique existe. J'ai indiqué ce qu'il en était des rémunérations invraisemblables de certains dirigeants de grandes entreprises, notamment bancaires ; constatons au vu des errements, qu'il s'agisse des paradis fiscaux ou des risques pris par certains avec des sommes qui ne sont pas les leurs, que la régulation fut absente au point que, trois ans après, les États, encore eux, c'est-à-dire les contribuables, sont appelés à la rescousse d'un établissement mis en déconfiture par l'action totalement irresponsable de certains. Ceux qui sont responsables ne sont pas appelés à rendre des comptes. Ceux qui n'y sont pour rien, en revanche, devront contribuer par leurs impôts à apurer les dettes laissées par les premiers. Convenons, mes chers collègues, que dans ces conditions, on peut comprendre et l'exaspération, et l'incompréhension de nos concitoyens. Craignons cette exaspération et cette incompréhension. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(M. Jean-Christophe Lagarde remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)

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