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Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion d'un projet de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, en pleine crise économique et financière, agir en faveur du consommateur apparaît encore plus nécessaire qu'en temps normal : c'est tout l'objet du texte que nous allons examiner et dont la genèse mérite d'être rappelée. La démarche que vous avez adoptée, monsieur le secrétaire d'État, est en effet, à bien des égards, nouvelle et originale.

À l'heure où nombreux sont ceux qui se défient de la politique, trop souvent accusée d'être éloignée de leurs préoccupations, je veux souligner tout l'intérêt de votre méthode, qui a consisté à vous appuyer sur des faits et sur les problèmes rencontrés par les consommateurs dans leur vie quotidienne.

Si l'on se réfère au baromètre des réclamations des consommateurs établi chaque armée par la DGCCRF, on relève que celle-ci a enregistré 92 253 réclamations en 2010. Sans entrer dans le détail, ces plaintes concernent essentiellement quatre secteurs qui, à eux seuls, concentrent plus de 70 % des réclamations. Il s'agit respectivement de la commercialisation des produits non alimentaires – notamment dans le cadre de la vente à distance et du commerce électronique –, de la communication-téléphonie, des travaux et réparations à domicile et, enfin, du secteur transports-véhicules.

Ce constat fait, vous avez donc décidé, monsieur le secrétaire d'État, de prendre à bras le corps les problèmes soulevés par nos concitoyens, au travers des onze articles initiaux de ce projet de loi, répondant ainsi directement à de nombreuses préoccupations concrètes et quotidiennes des Français.

Votre démarche mérite également d'être soulignée, dans la mesure où votre texte est par ailleurs le fruit de discussions et de consultations avec les consommateurs, les professionnels et les acteurs de l'économie française. Ainsi l'article 1er du projet de loi, en instaurant un nouveau titre relatif aux réseaux de distribution dans le livre III du code de commerce, constitue-t-il en vérité une réponse largement inspirée d'un avis rendu par l'Autorité de la concurrence au mois de décembre dernier.

Dialogue avec des autorités administratives donc, mais aussi – et chacun s'en félicitera ici – dialogue avec les parlementaires. Je me réjouis donc de voir que l'article 8 du projet de loi, principalement relatif à la sécurité du consommateur dans le cadre des ventes à distance, est en partie une reprise de la proposition de loi qui avait été déposée par plusieurs de nos collègues, dont Jean-Pierre Nicolas, qui en avait été le rapporteur, Laure de La Raudière et Bernard Gérard.

Enfin, votre texte, contrairement aux reproches parfois adressés au législateur, accusé de voter des lois les unes à la suite des autres sans se préoccuper de ce qui a été voté auparavant vient, lui, en complément de lois précédentes, car il vise davantage à faciliter leur mise en oeuvre qu'à bouleverser des dispositifs qui n'ont pas encore eu le temps de produire tous leurs effets.

Notre assemblée a voté la loi Chatel en janvier 2008, la loi de modernisation de l'économie au début du mois d'août 2008, la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche en juillet 2010 et la loi NOME en décembre 2010. Ce projet de loi devrait permettre de rendre leur application plus effective, et donc plus efficace, en répondant – j'y insiste encore – à des problèmes rencontrés quotidiennement par l'ensemble de nos concitoyens.

Cependant, ce projet de loi ne vise pas à rouvrir l'ensemble des débats qui ont pu avoir lieu précédemment. Il nous faut examiner tout le texte – et, en tant que rapporteur, je serai particulièrement attentif à vos amendements et à vos remarques, comme je l'ai été en commission –, mais rien que le texte, car c'est la seule ligne de conduite qui nous permettra de faire aboutir un projet de loi attendu par les associations de consommateurs et nos concitoyens.

À travers votre démarche originale, monsieur le secrétaire d'État, quels sont les objectifs poursuivis par ce projet de loi ? J'en distinguerai pour ma part de deux sortes : certains techniques, d'autres plus politiques.

Tout d'abord, ce projet de loi poursuit des objectifs d'ordre purement technique, en prenant trois directions différentes.

En premier lieu, ce texte souhaite adapter le droit aux nouvelles technologies et aux nouveaux modes de consommation, qui évoluent en permanence.

Je prendrai d'abord l'exemple du commerce électronique, concerné par plusieurs articles. Selon la FEVAD, la fédération du e-commerce et de la vente à distance, plus de 27,3 millions de nos concitoyens ont effectué des achats sur internet en 2010, ce qui correspond à un chiffre d'affaires total de près de 31 milliards d'euros, en hausse de 24 % par rapport à 2009. Signalons également le développement du m-commerce, c'est-à-dire du commerce effectué à partir d'un téléphone portable.

Il est évident qu'il faut prendre en considération ces nouvelles formes de commerce, tout en renforçant la lutte contre certaines pratiques commerciales abusives, et c'est ce que fait ce projet de loi au travers de deux articles. L'article 6, tout d'abord, vise notamment à encadrer la vente de lentilles correctrices sur internet. Il étend également le droit de rétraction pour l'achat à distance de dispositifs médicaux tels que les lunettes. L'article 8 vise, pour sa part, à instaurer davantage de sécurité au bénéfice du consommateur à distance. Cet article a d'ailleurs été considérablement enrichi par la commission en juillet dernier, à l'initiative de nos collègues Jean-Pierre Nicolas et Gérard.

En second lieu, ce projet de loi souhaite mettre en conformité le droit français avec le droit européen, domaine dans lequel la France se fait souvent tirer les oreilles. C'est notamment l'objet de l'article 6, réponse à la jurisprudence européenne et à l'arrêt Ker Optika de décembre 2010, et celui de l'article 10 qui, sur le sujet des clauses abusives, met notre droit en conformité avec un arrêt de la Cour de justice du 4 juin 2009. C'est enfin l'objet de l'article 11, sur la monnaie électronique, et celui de la proposition de notre collègue Catherine Vautrin, qui vise à transposer dans notre droit une directive européenne qui vient d'être adoptée, sur les délais de paiement.

En troisième et dernier lieu, ce projet de loi souhaite rendre effectives les règles juridiques existantes, les manquements à l'application du droit de la concurrence et du droit de la consommation n'étant, à l'heure actuelle, pas toujours sanctionnés.

Je me réjouis donc de voir l'article 2 prévoir plusieurs mesures destinées à améliorer les rapports locatifs, premier domaine dans lequel on constate que le droit n'est pas toujours appliqué.

Afin d'inciter les bailleurs à restituer le dépôt de garantie en fin de bail, il est ainsi proposé de majorer le montant du solde de ce dépôt de 10 % par mois de retard. Cette mesure devrait améliorer considérablement le pouvoir d'achat des candidats à la location.

Le projet de loi étend également à toutes les locations l'obligation de mentionner la surface habitable du logement dans le bail et prévoit une sanction adaptée.

En termes d'effectivité du droit, je salue tout particulièrement, comme vous l'avez fait monsieur le secrétaire d'État, la rédaction de l'article 10 du projet de loi ? qui tend à confier davantage de pouvoirs au juge et à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF.

J'en viens à présent aux finalités politiques de ce texte.

Il vise tout d'abord à protéger le consommateur contre les abus et les mauvaises surprises qui peuvent naître de certains dispositifs actuels. Le abus sont encore nombreux dans certains secteurs comme celui du logement – le retard avec lequel les dépôts de garantie sont rendus au locataire en est un exemple –, de la téléphonie, où les opérateurs imposent des conditions d'abonnement et surtout de résiliation trop complexes pour le consommateur, ou encore de l'énergie, secteur où il est très difficile de contester le montant des factures alors même que le consommateur serait dans son bon droit.

Je citerai enfin un dernier exemple, malheureusement parmi tant d'autres : il est très difficile d'obtenir des informations sur les tarifs des péages autoroutiers, qui manquent de clarté.

Je signalerai par ailleurs deux innovations issues de nos travaux en commission.

Tout d'abord, à l'initiative de nos collègues de l'opposition, nous avons adopté un amendement devenu le nouvel article 10 quinquies qui vise à lutter efficacement contre les pratiques d'exonération de garantie qu'imposent certains professionnels de l'automobile. Ce faisant, il va dans le sens d'une concurrence plus libre et moins faussée.

A ensuite été adopté un dispositif, figurant désormais au nouvel article 8 ter, pour lutter efficacement contre le démarchage téléphonique, qui peut facilement devenir un véritable harcèlement.

Il est par ailleurs un point sur lequel nous n'avons peut-être pas suffisamment insisté : ce projet de loi vise à aider l'ensemble des consommateurs, en particulier les plus modestes, en les accompagnant dans la maîtrise de leurs dépenses essentielles.

Il permet à cet égard une avancée sociale particulièrement importante. Le 7 mars dernier, le Gouvernement a signé, sur la base d'une disposition existante du code des postes et des communications électroniques, avec neuf opérateurs, une convention visant à appliquer un tarif social en matière de téléphonie mobile. L'article 5 du projet de loi permet au Gouvernement de mettre en oeuvre un dispositif similaire en matière d'accès à internet haut débit, ce qui permettra d'adapter le tarif social existant actuellement dans le cadre du service universel pour le seul téléphone fixe aux nouveaux usages ainsi que de généraliser les offres d'abonnement couplant téléphone, internet et télévision.

Le projet de loi propose également des avancées significatives dans le domaine des communications électroniques, qui s'appuient sur les travaux approfondis conduits depuis un an par le Gouvernement, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – l'ARCEP – et les opérateurs. Ces dispositions vont, là encore, dans le sens d'une plus grande sécurité du consommateur.

Les rapports entre les consommateurs et les opérateurs de communications électroniques ont longtemps été difficiles. La situation s'est nettement améliorée depuis l'adoption de la loi Chatel en 2008 et l'ordonnance de transposition du troisième paquet télécoms européen, entrée en vigueur le 26 août dernier.

Des difficultés subsistent néanmoins, auxquelles l'article 3 du projet de loi apporte des réponses que les nombreux amendements déposés à cet article permettront d'améliorer.

Des dispositions de même inspiration sont prévues à l'article 4, en matière de contrats d'énergie, afin d'améliorer la transparence des factures de clôture, de permettre au consommateur de relever lui-même, sans frais, sa consommation, de bénéficier de conseils personnalisés et de faire face à une augmentation importante de sa consommation.

Insistons à présent sur les apports indéniables de l'article 2 qui tend à mieux protéger les personnes âgées et dépendantes bénéficiant de services à domicile ou hébergées en maison de retraite.

S'agissant des services d'aide et d'accompagnement à domicile, le texte précise les exigences en matière de contrat et permet à la DGCCRF d'appliquer des sanctions administratives en cas d'abus.

Pour ce qui est de l'hébergement en maison de retraite, l'article 2 vise à éviter que ces établissements perçoivent des sommes forfaitaires pour la remise en état des lieux et ne facturent un mois complet d'hébergement, voire plus, en cas de décès. Ce texte devrait mettre fin à de tels comportements aussi absurdes qu'indécents – on me rapportait encore un cas, la semaine dernière, dans ma circonscription.

Enfin, ce projet tend à renforcer la confiance du consommateur dans les institutions compétentes en la matière.

Vous avez ainsi choisi, monsieur le secrétaire d'État, d'accroître les pouvoirs de la DGCCRF, et j'ai déjà évoqué ce sujet.

De même, l'article 7 vise à offrir une plus grande lisibilité au consommateur en instaurant une protection spécifique sur l'indication géographique pour les produits non alimentaires. Notre texte pourra être amélioré sur ce point. M. Chassaigne a déposé des amendements qui pourront retenir toute notre attention.

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