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Intervention de Frédéric Lefèbvre

Réunion du 29 septembre 2011 à 9h30
Protection des consommateurs — Discussion d'un projet de loi

Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation :

Il était important de le dire au début de cette discussion.

J'ai opté pour une méthodologie d'entretiens constants avec les partenaires. Ce dialogue constructif, le Gouvernement a décidé de le poursuivre tout au long des débats qui s'ouvrent aujourd'hui. La nouvelle configuration du Sénat ne nous a pas empêchés de choisir un débat approfondi, sans procédure accélérée. Nous avons choisi de parier sur le sens de l'intérêt général qui a été, je veux le souligner ici une nouvelle fois, la règle en commission., Je ne doute pas que chacun aura à coeur de défendre l'intérêt des consommateurs, loin des affrontements politiciens.

Vous en conviendrez, la protection des consommateurs est au coeur de l'action du Gouvernement depuis le début du quinquennat. Ce texte s'inscrit donc dans le prolongement du travail déjà accompli par mes collègues : je pense notamment à la loi Chatel pour le pouvoir d'achat de février 2008, à la discussion de laquelle nous sommes nombreux à avoir pris part, à la loi de modernisation de l'économie dite LME d'août 2008, ou encore à la loi NOME, nouvelle organisation du marché de l'électricité, de décembre 2010.

En renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs, nous n'oeuvrons pas seulement au rééquilibrage des relations en faveur du consommateur partout où elles se font à son détriment, nous restaurons également une relation de confiance entre les consommateurs et les professionnels. C'est le meilleur moyen d'encourager et de soutenir la consommation qui, chacun le sait bien ici, est le principal moteur de notre économie et de notre croissance.

Défendre le consommateur, c'est soutenir la consommation et c'est donc garantir la croissance et l'emploi.

Ce texte prend en compte les évolutions contemporaines des comportements de consommation de nos compatriotes : pour nous adapter aux mutations rapides de la société française, nous avons accordé une large place aux dépenses liées aux télécommunications, notamment l'internet et la téléphonie mobile. L'omniprésence de ces outils, désormais indispensables dans notre quotidien – lors de la recherche d'un emploi, par exemple – exige de mieux armer les consommateurs et de renforcer la transparence et la mobilité de ce secteur.

Il en va de même des grands défis énergétiques ou encore des problématiques liées à l'allongement de la vie, avec les questions de la dépendance que cela implique.

Il est de notre devoir et de notre responsabilité de poursuivre l'adaptation de notre droit à ces évolutions de société. Le droit de la consommation est, plus que tout autre, un droit vivant. Ce texte devra être suivi de nombreux autres pour s'adapter et faire preuve de réactivité, car notre devoir est, évidemment, d'être dans la réalité.

Pour élaborer ce projet de loi, je me suis placé résolument, vous le savez, du côté des consommateurs, pour coller au mieux à leurs attentes et à leurs demandes. Je suis en effet parti d'un « baromètre des plaintes », grâce à un travail en profondeur sur les préoccupations des Français, passant notamment par l'examen des 92 500 réclamations adressées à la DGCCRF. Je salue d'ailleurs Mme Homobono qui, ici, la représente.

C'est la réalité que vivent ces consommateurs au quotidien qui m'intéresse. J'ai réalisé des entretiens sur le terrain avec des acteurs locaux. J'ai effectué des rencontres publiques, chaque semaine, avec les acteurs économiques et engagé un véritable dialogue avec tous les partenaires, notamment les associations de défense des consommateurs.

Au regard de ces éléments structurants, actualisés, pétris de réalité, j'ai construit vingt-cinq mesures concrètes sur des sujets aussi divers que le logement, l'énergie, la santé et les télécommunications.

Le logement, l'énergie, la santé et les télécommunications correspondent en effet aux dépenses contraintes de nos concitoyens. On peut aussi les appeler dépenses vitales ou dépenses essentielles. Ces dépenses contraintes représentent désormais dans notre pays plus d'un tiers des dépenses des ménages, contre seulement 13 % il y a cinquante ans. J'ai vu que le CREDOC publiait une étude sur cette question. Quand je dis que c'est plus d'un tiers aujourd'hui, c'est une moyenne, bien sûr ; pour les ménages modestes, la proportion peut aller jusqu'à 80 %. Il est donc indispensable d'agir.

Les dépenses de télécommunications, dont je soulignais l'importance, se sont notamment invitées dans le budget des Français alors qu'elles en étaient quasi absentes il y a encore vingt ans. J'ajoute que beaucoup de ces dépenses ne se voient pas, car elles se font par prélèvement automatique ou par virement. Elles sont pour certains quasiment indolores, sauf à la fin du mois quand ce qui reste du budget devient nécessaire pour des dépenses essentielles.

Ces dépenses contribuent à nourrir le sentiment d'une stagnation, voire d'une baisse du pouvoir d'achat, alors même que les statistiques de INSEE ou la récente étude de la Commission européenne publiée au printemps montrent au contraire une augmentation continue depuis 2007, d'ailleurs plus forte en France que dans tous les autres grands pays de la zone euro.

J'ai l'honneur et la fierté de défendre ce projet de loi pour apporter des solutions concrètes à l'impact direct qu'ont ces évolutions économiques et sociales sur le quotidien de tous les Français et donner à tous les consommateurs, et surtout à nos concitoyens aux revenus modestes, la possibilité concrète de retrouver une maîtrise de leurs dépenses et de gérer plus aisément leur budget. Je veux aider les Français à reprendre le dessus sur les dépenses contraintes.

L'objectif peut paraître à certains modeste, il me paraît au contraire incontournable. J'ai entendu parler de « fourre-tout » dans les critiques qui ont pu être formulées à l'encontre de ce texte. À mon sens, ce sont les dépenses contraintes et les problèmes que rencontrent les consommateurs qui sont eux-mêmes fourre-tout. Notre devoir est, là encore, d'agir.

Certains dispositifs ont déjà reçu quelques échos encourageants de la part de nos concitoyens, nombreux à approuver notre volonté d'empêcher les appels intempestifs sur les portables et sur les fixes. Plusieurs centaines de milliers de Français ont déjà plébiscité cette mesure. Les jeunes générations, surtout, ont fait part de leur enthousiasme, dans nos enquêtes et sur internet.

Dès à présent, sans décrire de manière exhaustive les articles du projet de loi, je voudrais détailler quelques mesures, dont certaines résultent directement des améliorations souvent consensuelles apportées lors de l'examen du texte par la commission des affaires économiques.

Je vous le disais à l'instant, les télécommunications, et en particulier la téléphonie mobile, sont devenues en quelques années les outils incontournables et omniprésents de notre quotidien. Ils ne sont pas de simples gadgets technologiques destinés à améliorer le confort des citoyens, ils sont devenus indispensables dans la vie professionnelle, lors de la recherche d'un emploi, pour accéder à l'information, pour faciliter l'intégration sociale et même pour la vie familiale.

S'adapter à cette omniprésence des télécommunications, c'est comprendre son époque, avoir les pieds dans le réel et être à l'écoute de la société, un rôle que les pouvoirs publics doivent assumer.

Un chiffre illustre à lui seul cette emprise croissante, Laure de La Raudière et Lionel Tardy le savent bien : le taux de pénétration mobile, selon l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, a atteint 100 %. En moyenne, chaque Français dispose désormais d'un téléphone portable.

Avec plus de 16 800 réclamations en 2010, soit 18 % des réclamations, les télécommunications restent toujours le deuxième secteur en termes de réclamations client, selon le baromètre de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Grâce aux actions entreprises en 2008 dans la loi Chatel, ce pourcentage est en baisse. Il convient cependant d'aller plus loin. Nous sommes déterminés à montrer notre volonté et notre goût de vaincre. La transparence et la mobilité de ce secteur doivent encore être considérablement améliorées.

Pour dynamiser la concurrence, le projet de loi prévoit ainsi que le déverrouillage des téléphones soit gratuit trois mois après leur achat. De même, une offre mobile sans engagement devra être proposée aux consommateurs. Il ne s'agit pas d'abîmer le modèle français, qui est d'ailleurs copié aujourd'hui par de nombreux pays étrangers, il s'agit simplement d'offrir plus de transparence.

Pour renforcer cette transparence et la confiance des consommateurs, le projet de loi prévoit également de demander aux opérateurs de fournir à leurs clients des informations sur l'existence d'offres plus adaptées à leur profil de consommation, si celles-ci existent. Les offres sont en effet trop souvent déconnectées des besoins réels de nos concitoyens. Les clients sont amenés à faire des choix par défaut, sans savoir si leur forfait est adapté, et, surtout, quels services ils payent vraiment. Cela peut expliquer des forfaits mal calibrés et des notes salées.

J'ai également tenu à renforcer la défense des publics vulnérables, qui sont en général les moins armés face à certains professionnels.

Le projet de loi prévoit ainsi, sur le modèle du conventionnement retenu pour la téléphonie mobile en mars dernier – un conventionnement que j'avais défendu, M. Brottes s'en souvient, en tant que parlementaire et qui avait été voté à l'unanimité à l'époque –, la signature de conventions entre l'État et les opérateurs pour promouvoir des offres d'accès à l'internet haut débit à bas prix à destination des plus démunis. Ce tarif social de l'internet est une réponse indispensable aux inégalités d'accès aux nouvelles technologies et à la fracture numérique qui subsistent en partie dans notre pays. Grâce à cette impulsion, grâce à la fermeté partagée que vous avez affichée en commission sur ce sujet, nous avons obtenu la semaine dernière avec Éric Besson qu'un premier opérateur propose dans les six mois un tarif social. C'est essentiel puisque, vous le savez, l'Europe ne nous autorise pas, en la matière, le service universel.

S'agissant du logement, vous le savez, les dépenses afférentes constituent près de 30 % des dépenses des ménages et, surtout, près de 80 % de leurs dépenses contraintes. Notre priorité doit être de protéger les Français contre toute forme d'abus et de garantir fermement leurs droits dans ce domaine. L'enjeu n'est pas simplement la maîtrise du budget et des dépenses, la problématique sociale du logement doit plus que jamais appeler notre vigilance quant à l'existence de certaines dérives.

Je tiens à évoquer ici devant vous quatre mesures, mais le projet de loi en contient davantage et je ne doute pas que nos discussions permettront d'apporter encore des améliorations.

Concernant les dépôts de garantie, la loi pour le pouvoir d'achat de 2008 avait prévu que leur niveau passe de deux mois à un mois de loyer. C'était une avancée très forte. Le projet de loi étend cette mesure au logement social non conventionné, pour qu'elle profite dorénavant à tous les Français.

Le projet de loi prévoit également de rendre possible l'ajustement du loyer au profit du locataire si la surface louée est fausse ou manquante. Le système de la loi Carrez, qui concerne la propriété, doit être aujourd'hui étendu aux locataires. La procédure de contestation de la surface est d'ailleurs calquée sur ce qui existe déjà pour les copropriétés.

Cette nécessité de mieux protéger les locataires a particulièrement retenu l'attention de la commission des affaires économiques, qui a souhaité que l'on renforce la présomption d'innocence du locataire si un état des lieux n'a pas été remis à l'entrée. Droite et gauche ont déposé et voté le même amendement, prévoyant que si cet état des lieux n'est pas effectué, le dépôt de garantie devra être automatiquement et intégralement remboursé aux locataires.

De même, il est prévu de ramener le délai de préavis des locataires de trois mois à deux mois dans les zones tendues, là où la demande de logements est plus forte que l'offre.

Dans le domaine de l'énergie, les dépenses représentent 7,5 % des dépenses des ménages. Néanmoins, plus de 17 500 réclamations ont été reçues dans ce secteur par le Médiateur de l'énergie en 2010, soit 25 % de plus qu'en 2009. Ce chiffre élevé doit attirer notre attention et nous conduire à prendre les mesures nécessaires. En effet, à l'instar du secteur des télécommunications, de nombreuses aberrations demeurent quant à la facturation de certaines prestations énergétiques.

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