Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Thierry Mariani

Réunion du 28 septembre 2011 à 15h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Thierry Mariani, ministre chargé des transports :

Je souhaite à présent vous présenter les actions de la France et faire un point sur les négociations internationales.

Au niveau national, nous sommes mobilisés dans deux directions : l'atténuation des émissions de gaz à effet de serre, pour limiter le réchauffement climatique, et l'adaptation à celui-ci.

L'atténuation est la réduction des émissions de gaz à effet de serre, que la France veut diviser par quatre à l'horizon 2050. Les engagements du Grenelle doivent permettre de les réduire déjà de 23 % en 2020 par rapport à 1990. Dans l'intervalle, nous espérons des ruptures technologiques qui nous aideront à tenir nos objectifs à plus long terme.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Dans le bâtiment, 6 millions de ménages ont fait réaliser des travaux de rénovation de leur logement depuis 2005. Dès 2010, près de 100 000 logements neufs étaient labellisés bâtiment basse consommation, ce qui traduit une anticipation de la réglementation thermique de 2012. Dans les transports, le dispositif du bonus-malus permet à la France d'être le pays où le nouveau parc de véhicules est le moins émetteur. En outre, deux appels à projets ont été lancés par l'État pour les transports en commun en site propre en milieu urbain. Enfin, la part des énergies renouvelables est passée de 10 à 13 % ; l'objectif étant de 23 % en 2020, nous avons publié les appels d'offre sur l'éolien off shore et le photovoltaïque.

Ces actions doivent être renforcées. Si l'ensemble des dispositions du Grenelle était mis en oeuvre, l'efficacité énergétique augmenterait de 17 % en 2020 – l'objectif étant de 20 %. Dans la suite de la table ronde nationale pour l'efficacité énergétique que j'ai installée en juin, le projet de loi de finances présenté ce matin en conseil des ministres prévoit la réforme du crédit d'impôt développement durable et de l'éco-prêt à taux zéro, avec un nouveau dispositif plus efficace, orienté sur les rénovations lourdes, et qui permettra d'empêcher les effets d'aubaine.

L'adaptation consiste à faire en sorte que les changements qui auront lieu à l'échelle de la planète ne nous affectent pas trop. Nous prenons acte que les phénomènes climatiques en cours nous concerneront à travers la hausse des températures, la montée du niveau de la mer, l'intensification des sécheresses et des événements climatiques extrêmes.

Le 20 juillet dernier, j'ai présenté un plan d'adaptation au changement climatique qui comprend 230 mesures. La France est ainsi le premier pays à disposer d'un plan d'adaptation global. Pour l'eau, le plan fixe un objectif de réduction de 20 % des consommations d'ici à 2020. Dans le domaine de la santé, il vise à anticiper l'émergence de certaines pathologies liées au changement climatique, la remontée des aires de déploiement de certaines pathologies, la venue d'insectes vecteurs d'épidémies. En matière d'aménagement du territoire, il prévoit de s'assurer de la durabilité de l'urbanisme et des infrastructures de transport.

En outre, le plan met un accent particulier sur le secteur des forêts, en privilégiant la plantation d'essences qui répondent aux enjeux climatiques des décennies à venir, certaines régions étant menacées par l'augmentation des incendies.

Enfin, nous nous tournons vers la prospective avec le « comité Trajectoires 2020-2050 » dont les conclusions, rendues publiques d'ici à quelques semaines, permettront d'orienter les stratégies de réduction des émissions.

Au niveau international, les choses sont difficiles. Nous préparons la Conférence des Parties, la COP 17, qui se tiendra à Durban au mois de décembre. La conférence de Copenhague, en décembre 2009, n'a pas été à la hauteur des espoirs ; l'an dernier, celle de Cancun, dont on n'attendait rien, est apparue comme un succès, mais n'a pas abouti à l'accord global que nous souhaitions.

La conférence de Durban se prépare dans un climat de grande incertitude : certains souhaitent qu'elle soit un simple début de mise en oeuvre des accords de Cancun – que nous considérons insuffisants – ; d'autres voudraient, comme nous, qu'elle traite non seulement de la mise en oeuvre de ces accords, mais aussi qu'elle apporte l'esquisse d'un accord global – dans un environnement économique mondial très difficile et un contexte pré-électoral aux États-Unis.

Que peut-on dès lors espérer ? D'abord, crédibiliser la démarche Bottom-Up définie à Copenhague, c'est-à-dire non pas des engagements juridiquement contraignants, mais des démarches volontaires des États en vue de modérer leurs émissions de gaz à effet de serre. Cette démarche fonctionne à condition de mettre en place des dispositifs de contrôle.

Ensuite, régler la question du cadre juridique des engagements pour l'après-2012. Les pays en développement tiennent à la prolongation du protocole de Kyoto et souhaitent que les pays développés poursuivent leurs efforts. Le Canada, le Japon et la Russie ont fait savoir leur désaccord – considérant qu'ils représentent désormais une faible partie des émissions mondiales face à celles, en augmentation, des pays émergents – et souhaitent la recherche d'un accord global. L'Europe craint d'être la seule à devoir faire preuve de bonne volonté. Dans ce contexte, la France soutient le principe d'une deuxième période d'engagements pour continuer à faire vivre les outils et les acquis du protocole, pourvu qu'elle s'inscrive dans une négociation en vue d'un accord global juridiquement contraignant. Cette « ligne de crête » pourrait être celle d'un accord à Durban. Pour l'heure, les termes de « mandat » et de « négociation » font bondir certains de nos partenaires. Mais que signifierait de poursuivre le protocole de Kyoto sans l'annonce d'une « négociation » ?

Dans ce contexte, nous cherchons activement des alliés. Je me suis rendue en Chine à cette fin au début du mois de novembre. L'une des clés est à chercher dans les financements, car il y a un problème de crédibilité des pays du Nord sur cette question. À Copenhague, nous nous sommes mis d'accord sur la somme de 120 milliards de dollars par an à partir de 2020 pour organiser la transition énergétique dans les pays du Sud et lutter contre le changement climatique avec eux. À Cancun, nous nous sommes mis d'accord sur le « fonds vert » dont la gouvernance est en cours de négociation. Néanmoins, si nous sommes d'accord sur le chiffre et le contenant, l'argent manque : il faut trouver une centaine de milliards par an.

La France milite pour des financements innovants, et il me semble que l'on progresse depuis six mois : aucun pays ne conteste désormais la nécessité de lever des financements pour la lutte contre le changement climatique ; les pays du Nord, dont les contextes budgétaires sont très tendus, sont favorables au concept de financement innovant ; les pays du Sud soutiennent également cette idée qui garantirait un financement pérenne et transparent. Des travaux internationaux portés par un certain nombre de personnalités, à la demande du Président de la République comme président du G20, ont facilité les choses. Plusieurs rapports – du FMI, de la Banque mondiale, de Bill Gates – engagent de plus en plus de partenaires sur cette voie.

Pour moi, les financements innovants sont porteurs de sens. Ils permettent de s'appuyer sur la dynamique même de la mondialisation pour résoudre des problèmes nés de celle-ci. Cela est vrai quels que soient les financements innovants envisagés – taxe sur les transactions financières ou taxe sur les carburants de soute dans les secteurs aérien et maritime.

Reste à lever une dernière hypothèque : la bonne utilisation de ces fonds. Il se trouve que la possibilité de lever des financements innovants et de les rendre efficaces a été démontrée. L'association UNITAID, que de plus en plus de pays rejoignent, a déjà récolté 2,2 milliards de dollars qui lui permettent aujourd'hui de traiter huit enfants malades du sida sur dix dans le monde grâce à des médicaments qu'elle a développés. Le partenariat REDD + contre la déforestation, et le partenariat Paris-Nairobi sur les énergies propres ont permis d'identifier des projets de lutte contre le changement climatique dans les pays du Sud, immédiatement finançables et validés au niveau international. Initié par la France avec le Premier ministre kenyan, le partenariat Paris-Nairobi permet de mobiliser les États africains sur l'intérêt des financements innovants et sur l'utilité d'un accord dans la suite du protocole de Kyoto.

Bien évidemment, je serai présente à Durban pour défendre cette position, que j'aimerais partager avec vous.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion