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Intervention de Jean-Michel Clément

Réunion du 25 juin 2008 à 21h30
Contrats de partenariat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons ce soir tend à développer davantage le recours aux contrats de partenariat créés par l'ordonnance du 17 juin 2004, aux effets encore incertains.

L'objectif est d'en faire un outil de droit commun de la commande publique à côté des marchés publics et autres délégations de services publics, comme le précise explicitement le compte rendu du conseil des ministres du 13 février 2008, qui a adopté ce projet de loi : « Il s'agit de faire du contrat de partenariat un instrument qui trouve sa place dans la commande publique, et non plus un simple outil d'exception. »

Le message est clair, le projet de loi élargit les possibilités de recours aux contrats de partenariat, jusqu'alors limitées conformément à la décision du Conseil constitutionnel, à des situations spécifiques telles que l'urgence ou la complexité du projet.

Avec ce texte, l'exception devient la règle ! Deux nouveaux cas sont ainsi prévus.

Le premier lorsque le recours à un tel contrat présente un bilan entre les avantages et les inconvénients plus favorable que ceux d'autres contrats de la commande publique. C'est l'article 1er. Le caractère large de ce nouveau critère d'éligibilité, d'une nature différente de celle des deux autres critères posés par le Conseil constitutionnel, contribue à banaliser le recours aux contrats de partenariat, contrairement à l'esprit de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui a fait du recours au contrat de partenariat une procédure subsidiaire. Démontrer le caractère le « plus favorable » du recours au contrat de partenariat n'est pas un nouveau critère en soi, mais la condition minimale pour la passation de tout marché public et a fortiori du contrat de partenariat.

Le deuxième cas prévu consiste en la généralisation des contrats de partenariat jusqu'au 31 décembre 2012, dans un grand nombre de domaines jugés prioritaires – enseignement supérieur, justice, police, gendarmerie, santé, etc. –, où les besoins en investissements sont réputés présenter « un caractère d'urgence ». C'est l'article 2.

Aujourd'hui, on passe d'une étude au cas par cas de chaque projet à la validation de principe de projets s'inscrivant dans un programme national d'investissement, pour lesquels on a instauré « l'urgence légale ». Les résultats de l'évaluation, pourtant obligatoire et clé de voûte du contrat de partenariat, sont quasiment écartés ; ils ne seront pris en compte que s'ils sont manifestement défavorables.

Cette nouvelle « voie d'accès sectorielle », même limitée à 2012, est, compte tenu de l'ampleur des secteurs concernés et de l'importance des marchés, contraire à l'esprit de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Celui-ci a estimé qu'on ne saurait infléchir les règles garantissant l'égalité d'accès à la commande publique que pour des motifs tenant à l'urgence ou à la complexité démontrées par l'évaluation préalable. De subsidiaire, le contrat de partenariat est en train de devenir un mode de passation de marchés publics de droit commun !

En outre, le critère de l'urgence est précisé a priori, en des termes plus extensifs que ceux retenus par la décision du Conseil constitutionnel du 2 décembre 2004, ce qui reviendrait alors à étendre aussi par ce biais les possibilités de recours aux contrats de partenariat.

En d'autres termes, la loi, en l'état, veut contourner la décision du Conseil constitutionnel. En faisant de l'exception la règle, ce projet encourt l'inconstitutionnalité.

Un examen approfondi préalable des effets de l'ordonnance du 17 juin 2004 s'imposait. De l'avis même du rapporteur au Sénat, « après trois années d'application de l'ordonnance, les avis sont partagés sur l'efficacité des contrats de partenariat pour réduire les délais et les coûts de construction des ouvrages. » La raison appelait la mesure du temps.

Avec ce texte, le recours à cette technique contractuelle masque la dette publique qu'il faut contenir !

Curieuse dénomination que ce « partenariat public-privé » qui laisse croire qu'une entreprise privée ne peut être partenaire, par contrat, d'un client public. L'appellation britannique du PFI – Private Finance Initiative – a l'avantage de la franchise, car le problème est bien celui du financement des projets publics.

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