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Intervention de Michel Buillard

Réunion du 30 juin 2011 à 10h30
Fonctionnement des institutions de la polynésie française — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Buillard :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ia ora na !

Depuis 2004, la Polynésie française connaît une certaine instabilité politique. Vous avez raison de le souligner, madame la ministre, cette instabilité est évidemment préjudiciable à notre développement, mais elle ne doit pas servir de prétexte à des décisions unilatérales prises sans concertation avec les élus de la Polynésie que nous sommes.

Il est symbolique que ce texte soit examiné un 29 juin pour la Polynésie – un 30 juin pour la métropole –, car le 29 juin est la date à laquelle la Polynésie célèbre son autonomie.

Je pense, chers collègues, que vous connaissez les conditions dans lesquelles la Polynésie a pu obtenir son autonomie, de même que vous connaissez les conditions dans lesquelles les expérimentations nucléaires ont été imposées en Polynésie française. Le choix s'est porté sur la Polynésie française, pour des raisons que nul n'ignore. La population a-t-elle été consultée ? Non. Faut-il considérer pour autant que nous avons pu obtenir notre autonomie grâce à la bombe ? Je n'ose imaginer que les hauts responsables de l'État aient eu de telles arrière-pensées.

Notre autonomie est unique dans la République française. L'entrée de la Polynésie dans le monde moderne, dans la société de consommation, correspond à une évolution récente que les Polynésiens ont dû assumer avec toutes les difficultés que l'on imagine. La France est devenue une grande puissance nucléaire et elle siège au conseil de sécurité de l'ONU, ce qui lui permet de jouer un rôle dans l'équilibre géopolitique de la région Pacifique. Je m'étonne donc que l'ancien Président de la République oublie de saluer, dans le deuxième tome de ses Mémoires, la contribution du fenua à la politique de dissuasion nucléaire de la France. Car ces essais ont soulevé des vagues de protestation contre la France, notamment en Nouvelle-Zélande et en Australie, ce qui a porté préjudice à nos relations avec nos cousins du Pacifique. Car qui a procédé à la normalisation des relations avec ces pays ? C'était un Tamarii du fenua, secrétaire d'État au Pacifique sud, « Gaston le Grand », pour reprendre une expression familière aux oreilles de celui que j'appelle simplement René Dosière, car je ne me permettrais pas, moi, de le nommer en faisant allusion à telle ou telle caractéristique morphologique.

Petit clin d'oeil de l'histoire, c'est samedi prochain, le 2 juillet, que sera dévoilé à Papeete une plaque commémorant le quarante-cinquième anniversaire du premier essai nucléaire aérien en Polynésie française, le 2 juillet 1966.

Certes, la Polynésie française a bénéficié des transferts financiers de la métropole, mais c'était plus dans le cadre d'une économie artificielle, fondée sur l'industrie de la bombe, que dans celui d'un véritable partenariat de développement. En quelques années, les Polynésiens ont dû subir une véritable révolution économique et sociale, passant d'une économie rurale et autosuffisante à une société moderne et artificielle de consommation.

C'est grâce à l'esprit de résilience et de tolérance des Polynésiens que cette véritable révolution a pu se mettre en place – sans trop de heurts, dirons-nous – mais le gouvernement central ne doit pas oublier son rôle déterminant dans le développement économique de notre Pays, pas plus que ses obligations d'accompagnement social envers chaque citoyen de la République française.

J'ai bien retenu les leçons de morale du professeur Dosière. On pourrait appeler cela Traité de la morale appliquée par les autochtones de Polynésie française.

Si j'ai bien compris votre raisonnement, monsieur Dosière, nous n'aurions pas la même manière d'appliquer la notion de morale en Polynésie qu'en République française, et ce serait d'autant plus grave que nous n'aurions pas la même lecture de l'évangile qu'en métropole ! Autrement dit, ce qui peut être considéré comme un comportement intègre en République ne l'est pas de la même manière qu'en Polynésie.

Je pense, cher ami René Dosière, qu'il faut se débarrasser de ses oeillères et ne pas se contenter d'un raisonnement manichéen et étriqué. La ficelle est grosse, et les choses sont plus compliquées que cela car, en métropole aussi, la morale universelle est régulièrement bafouée, on le voit à longueur d'articles de presse. Je n'aurai pas l'outrecuidance de citer les noms des plus éminentes personnalités de la vie politique française qui ont été condamnées en correctionnelle pour des emplois véritablement fictifs ou des abus de biens sociaux ; ils sont encore en fonction, à droite comme à gauche !

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