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Intervention de Jean Mallot

Réunion du 22 juin 2011 à 11h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Mallot :

Nous avons été nombreux à participer activement aux travaux de la mission d'information. J'ai cependant un regret : la dernière réunion de celle-ci n'a pas donné lieu à l'établissement d'un compte rendu, ce qui aurait évité que ne soient de nouveau développés aujourd'hui certains arguments.

J'éprouve un sentiment mitigé à la lecture du rapport : j'y retrouve beaucoup de ce que nous avons entendu, dit ou échangé, mais aussi des omissions. Je comprends que le rapporteur n'ait pas souhaité reproduire les travaux déjà effectués par l'Inspection générale des affaires sociales, dont le rapport a été fort complet et passionnant. Mais j'observe aussi que l'introduction du rapport qui nous est présenté n'expose pas clairement le point de départ de « l'affaire » qui nous occupe, à savoir le dépôt d'une demande d'autorisation de mise sur le marché du Mediator pour une indication différente de celle pour laquelle il a en réalité été prescrit. Les Laboratoires Servier se sont ainsi placés en porte-à-faux et ont, pendant près de trente-cinq ans, « roulé les pouvoirs publics dans la farine ». Ce point n'a pas été suffisamment souligné alors qu'il est déterminant.

J'observe en outre que la partie de l'introduction du rapport traitant des dégâts causés par le Mediator fait, implicitement, la part belle à la thèse des Laboratoires Servier minorant le nombre de décès imputables à la prise de Mediator, alors que personne ne peut raisonnablement nier que ce nombre atteint probablement plusieurs centaines, voire plusieurs milliers, de victimes.

Sans trancher sur la nature chimique du benfluorex, le rapport aurait aussi gagné à être plus clair quant à son caractère anorexigène ; il a été prescrit en tant que tel pendant des années, et c'est bien de là que vient le problème.

Je comprends que le rapporteur ait souhaité expliquer ce qui s'est produit au cours des années 1995, 1997 et 1999, au cours desquelles les alertes auraient déjà dû susciter des réactions. Mais je regrette qu'il ne soit pas fait mention des années 2003, où le Mediator a été retiré du marché espagnol, 2004, où a été détecté un cas d'insuffisance mitrale et d'hypertension artérielle pulmonaire à Toulouse, et 2006, où a été signalé un cas de valvulopathie, toujours à Toulouse, et durant laquelle la commission de la transparence a estimé le service médical rendu du Mediator insuffisant, ce qui n'a pas empêché que l'autorisation de mise sur le marché soit malgré tout renouvelée en 2007 dans l'indication du traitement du diabète avec surcharge pondérale. Toutes ces années auraient mérité de ne pas être omises.

Concernant les conclusions du rapport, plusieurs points me semblent avoir été insuffisamment traités. C'est notamment le cas des conflits d'intérêts que l'on rencontre en matière d'expertise et de prise de décision. Le rapport fait certes référence au « Sunshine act » américain, mais celui-ci ne figure pas explicitement dans la liste des propositions du rapporteur.

Pour ce qui est de la formation médicale, il ne suffit pas d'énoncer quelques réflexions sur ce sujet très important. Je pense qu'il est temps d'en assurer un financement public. Si les laboratoires pharmaceutiques disposent de moyens à y consacrer, la puissance publique peut tout à fait recourir à l'impôt pour financer une formation médicale indépendante.

Les propositions du rapporteur me semblent par ailleurs insuffisantes pour corriger un dysfonctionnement important du système français, à savoir que 90 % des consultations médicales donnent lieu à la prescription de médicaments, ce qui est considérable – le double du nombre de prescriptions médicamenteuses constaté dans certains pays européens.

Le rapport souffre également d'un manque de propositions concernant les visiteurs médicaux qui, à notre sens, doivent être mieux encadrés ; il convient également que la puissance publique se dote d'un corps de délégués de l'assurance maladie plus performant pour donner aux prescripteurs des informations objectives sur les médicaments.

Le rapport confond, de façon regrettable, l'éducation thérapeutique avec l'information des patients, alors qu'il ne s'agit pas du tout de la même chose.

Je suis par ailleurs tout à fait opposé à une fusion de l'Institut national de la prévention et de l'éducation pour la santé avec l'Institut de veille sanitaire. Ces deux organismes ont des missions très différentes ; j'avoue ne pas avoir bien compris pourquoi cette proposition était formulée.

En conclusion, sans mettre en cause le travail qui a été effectué, je juge les propositions insuffisantes. Si mercredi dernier je n'avais pas dû intervenir en séance publique, je n'aurais pas voté en faveur de ce rapport.

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