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Intervention de Jean Gauvain

Réunion du 24 mai 2011 à 16h00
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean Gauvain, Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire, AEN :

En matière de R&D dans la sûreté, l'expertise de l'AEN, qui est en fait celle des trente pays membres de l'OCDE, aborde plus particulièrement deux domaines : celui de l'analyse, de la prévention et de la gestion des accidents, et celui des projets coopératifs de recherche en sûreté.

S'agissant du premier volet, les domaines étudiés portent sur l'évaluation du risque et la sûreté du combustible ainsi que sur la thermohydraulique, sur les accidents graves et sur le confinement, enfin sur la tenue des équipements et des structures. L'analyse repose à cet égard d'abord sur les rapports sur l'état de l'art (SOAR) – impliquant jusqu'à des dizaines d'experts pendant plusieurs années afin de mettre en commun l'expertise internationale dans un domaine spécifique pour en déduire les meilleures pratiques –, ensuite sur les exercices de comparaison internationaux (ISP) – réunissant également des experts pendant quelques années pour comparer les méthodes de calcul sur un problème donné afin de définir le meilleur modèle, libre à chaque pays d'utiliser celui-ci pour ses analyses de sûreté.

S'agissant des rapports sur l'état de l'art, des recommandations ont été faites pour améliorer l'analyse de sûreté concernant à la fois le combustible nucléaire, la thermohydraulique, les accidents graves et la tenue de l'enceinte de confinement. Il en va de même pour les exercices de comparaison qui ont conduit là encore à des recommandations pour améliorer l'analyse de sûreté, en particulier la meilleure manière de calculer un problème donné – fuite dans un circuit primaire, renoyage d'un assemblage après dénoyage, etc.

J'en viens au second volet, les projets de recherche en sûreté. D'une façon générale, il s'agit de la mise en commun de l'expertise internationale sur un sujet particulier, avec l'utilisation d'une installation expérimentale unique au monde aux fins d'obtenir entre experts un consensus sur le problème étudié – modélisation, application des résultats,... Sur le plan pratique, un pays hôte finance la moitié du projet aux côtés de 8 à 15 pays partenaires, cela pendant une durée fixe et avec un budget spécifique, les experts se réunissant régulièrement pour discuter des programmes et des objectifs des essais. Là encore, on retrouve les mêmes domaines étudiés : thermohydraulique accidentelle, comportement du combustible, accidents graves et intégrité des composants et des structures.

Sur trente ans, une trentaine de projets ont concerné notamment l'intégrité des composants – Projet PRISME de l'IRSN –, la thermohydraulique – projet SETH, qui concerne l'installation MISTRA –, la sûreté du combustible – projet CABRI –, l'enceinte de confinement – projets SETH et STEM – ou encore les accidents graves hors cuve – projet SERENA. Il s'agit, dans ce dernier cas, de l'explosion vapeur hors cuve, celle en cuve ayant fait l'objet d'un rapport sur l'état de l'art voilà trois ans, lequel a estimé que les risques et les conséquences sont maîtrisés par les dispositions en vigueur.

Concernant les projets de recherche en sûreté relatifs à la thermohydraulique du coeur, le premier remonte à plus de trente ans aux États-Unis. Le dernier est ROSA, pour lequel l'avant dernier essai a eu lieu comme prévu le 19 mai dernier en dépit d'un tremblement de terre et d'un tsunami, nos collègues japonais ayant été capables de maintenir leur recherche en l'état malgré l'adversité. Les principaux phénomènes étudiés dans les circuits ont trait à la dilution de bore ou encore au refroidissement de secours. Ces projets servent souvent de support à des programmes de comparaison de modélisation.

S'agissant des projets relatifs à la physique des accidents graves, je citerai à nouveau le programme CABRI, mais également celui sur les piscines de combustibles : lancé voilà deux ans aux États-Unis, il tend, à partir d'un réservoir dénoyé et d'assemblages chauffés, à étudier comment se comporte un incendie du combustible – simulé afin d'éviter de relâcher de la radioactivité –, à l'image de celui que l'on vient d'observer à Fukushima. D'autres projets concernent le problème du coeur fondu à l'intérieur du réacteur ou encore l'intégrité de la cuve. C'est ainsi qu'a eu lieu l'inspection de la cuve de Three Mile Island – je rappelle, pour ceux qui attendraient des résultats instantanés de Fukushima, qu'il a fallu sept ans entre le jour de l'accident et celui où l'on a pu retirer le combustible de la cuve...

Pour ce qui est, enfin, de la recherche sur le confinement des réacteurs, celle-ci porte à la fois sur la chimie – le comportement des produits de fission radioactifs, notamment l'iode qui est un produit très volatil – et sur la tenue du confinement.

En résumé, les projets OCDE sont une référence internationale qu'il s'agisse du développement et de la validation des modèles pour les accidents, de la comparaison des codes de calculs des pays ou de l'amélioration de la gestion de l'accident. Outre les projets OCDE, certains pays confient à cette dernière leurs archives, ce qui nous permet de disposer d'une grande bibliothèque de données à la disposition des pays membres.

En conclusion, les projets fédérés par l'AEN permettent une amélioration de la compréhension des situations accidentelles complexes en coordonnant l'expertise et la recherche internationale, une promotion des meilleurs outils et pratiques afin d'obtenir des approches comparables entre les pays – chacun étant libre de choisir son approche – et une mise en oeuvre des leçons apprises facilitée par les synthèses de l'AEN.

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