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Intervention de Christine Marin

Réunion du 31 mai 2011 à 21h45
Ventes de meubles aux enchères publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Marin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons aujourd'hui la deuxième lecture de la proposition de loi de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Ce texte d'une cinquantaine d'articles peut paraître technique, et je crois qu'il l'est effectivement, mais les enjeux économiques sont de taille : plus de 2 000 personnes travaillent dans ce secteur et le montant des adjudications s'élevait à plus de 2,2 milliards d'euros en 2009.

Les opérateurs français de ventes volontaires aux enchères publiques sont confrontés à d'importantes évolutions, qui tiennent non seulement à la circulation sans cesse plus rapide des biens à vendre, mais également au développement de sites spécialisés sur internet, tel eBay.

Nous avons déjà réformé ce secteur. La loi du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques a modifié le statut des commissaires-priseurs et limité leur monopole aux ventes judiciaires. Cette loi a eu un impact très positif en permettant aux acteurs français de faire face à la concurrence internationale.

Toutefois, dix ans après son adoption, le cadre juridique nécessite de nouvelles adaptations. En effet, sans la vente de la collection Saint-Laurent-Bergé, le montant des adjudications aurait diminué de 5,1 % en 2009.

On ne peut que regretter la baisse de rayonnement de la France dans ce domaine. Comme le soulignait le Conseil des ventes volontaires dans son rapport de 2007, nous assistons à un « déclin dans l'euphorie ». À titre d'illustration, en matière de ventes d'objets et d'oeuvres d'art, Paris réalise en un an les ventes de New York en un mois, alors que la France se situait au premier rang mondial dans les années cinquante.

Dans ce contexte, il apparaît que notre cadre législatif doit être amélioré. L'obligation de transposer la directive « Services » nous offre l'occasion de moderniser ce secteur et d'offrir à nos opérateurs les outils qui leur permettent de faire face à une concurrence internationale de plus en plus forte.

Le 26 avril dernier, le Sénat a adopté vingt-six articles conformes au vote de l'Assemblée nationale. Ne restent donc en discussion que onze articles.

En adoptant à l'identique les deux tiers des dispositions restant en discussion, le Sénat a approuvé une grande partie des évolutions introduites en première lecture par l'Assemblée nationale.

Parmi les mesures importantes validées définitivement par le Sénat figure l'encadrement de l'activité des opérateurs de ventes volontaires aux enchères publiques. Nos collègues sénateurs ont en effet adopté les obligations nouvelles introduites à l'initiative de notre rapporteur pour tirer les conséquences de l'affaire Drouot. Rappelons qu'une information judiciaire pour vols en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de commettre un crime ou délit a été ouverte le 18 mai 2009. Les faits consistaient en la commission, de manière habituelle et organisée, de vols d'objets et d'oeuvres d'art.

Dans ce cadre, le Sénat a acquiescé au double impératif pour les opérateurs de prendre les mesures nécessaires à la sécurité des ventes en faisant intervenir pour leur compte des prestataires de services et de communiquer au Conseil des ventes volontaires toutes les précisions utiles afférant à leur organisation et à leurs moyens techniques ou financiers. Nos collègues sénateurs ont également approuvé la nouvelle articulation des régimes de l'action disciplinaire et pénale prévue par notre assemblée.

Par ailleurs, le Sénat a tenu compte des propositions formulées par le rapporteur et visant à revenir à une codification plus conforme au droit actuel du statut des courtiers de marchandises assermentés. Notre commission des lois avait en effet supprimé les dispositions précisant que les courtiers de marchandises assermentés, susceptibles d'être désignés par le tribunal de commerce pour effectuer des ventes judiciaires ne pourraient le faire que dans leur spécialité. Or cette précision était ambiguë, car le tribunal peut déroger au principe de spécialité si, dans le ressort de la cour d'appel, il n'existe pas de courtier assermenté spécialisé dans une catégorie de marchandises donnée ou si ce courtier se récuse. Le Sénat n'a donc pas remis en cause le rétablissement d'une certaine latitude, pour le juge, dans la désignation de courtiers de marchandises assermentés en dehors de leur spécialité.

Au sujet du Conseil des ventes volontaires, les sénateurs ont adopté le dispositif que nous avions retenu : le mandat des membres sera renouvelable une fois, sa durée étant ramenée à quatre ans. Le Sénat a également confirmé le statut d'établissement d'utilité publique que nous avions conféré au Conseil des ventes volontaires.

De même, il a définitivement adopté les compléments apportés par notre assemblée à l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs judiciaires.

D'une part, ces derniers sont autorisés à exercer en qualité de salarié, à l'instar des notaires, par exemple. Leur position leur permettra de concilier tout à la fois l'indépendance professionnelle liée à la clause de conscience, la subordination inhérente au contrat de travail et la qualité d'officier public.

D'autre part, la distinction entre l'office ministériel et la structure d'exercice des ventes volontaires a été clarifiée. Ainsi, l'activité judiciaire du commissaire-priseur exercée en qualité d'officier public ou ministériel et l'activité de ventes volontaires, pratiquée en qualité de dirigeant, de salarié ou d'associé au sein d'une société sont séparées et rattachées à des personnes morales distinctes.

Malgré l'adoption de la majorité des dispositions de la proposition de loi dans les mêmes termes par les deux chambres, certains enrichissements apportés par le Sénat devront faire l'objet de débats au sein de notre Assemblée.

Je reviens sur trois des dispositions qui ont fait l'objet de modifications par notre commission des lois.

En premier lieu, le Sénat a décidé d'ouvrir la composition du Conseil des ventes volontaires aux professionnels en exercice, sous réserve de l'exclusion de la participation de ceux-ci aux délibérations relatives à la situation individuelle d'un autre opérateur. Les rapporteurs des deux assemblées se rejoignent sur ce point, en considérant que cette éventualité n'est en rien contraire aux impératifs de la directive « Services ». Notre commission des lois avait prévu cette disposition mais notre assemblée était revenue dessus en séance publique à la demande du Gouvernement. La question relative à la nomination des opérateurs de ventes aux enchères encore en activité est importante car il s'agit d'assurer une meilleure représentativité du Conseil des ventes volontaires, tout en laissant aux autorités ministérielles de nomination une grande liberté dans leur choix.

Toutefois, une incertitude plane sur la pertinence de l'article de rattachement de la règle de déport adoptée par les sénateurs. Afin de garantir la conformité du texte à la directive « Services », nous devons lever cette incertitude. Ainsi, notre commission des lois a transféré la règle de déport à l'article 22, afin de garantir qu'elle ne s'applique pas uniquement aux décisions disciplinaires prises à l'égard de concurrents.

En second lieu, le Sénat est revenu sur son idée initiale de plafonnement du chiffre d'affaires réalisé par les notaires et les huissiers de justice en matière de ventes aux enchères. En effet, nos collègues sénateurs ont rétabli un critère quantitatif pour caractériser la nature accessoire des ventes aux enchères ainsi réalisées, alors que notre assemblée avait supprimé cette disposition.

En l'état de la jurisprudence et des interprétations de la doctrine, il est apparu nécessaire de maintenir le système tel qu'il a été adopté par notre assemblée. En effet, le caractère accessoire de l'activité des ventes volontaires aux enchères publiques ne dépend pas uniquement du seul critère de volume d'activité en cause. Par exemple, le temps consacré à chaque activité est l'un des éléments qui doivent entrer en ligne de compte.

Pour finir, j'insiste sur le fait que cette réforme est une illustration parfaite de la valorisation du rôle du Parlement résultant de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008. Bien que menée en étroite collaboration avec le Gouvernement, cette réforme d'ampleur est d'origine parlementaire et nous ne pouvons que nous féliciter de cette coproduction législative.

Vous l'aurez compris, la proposition de loi soumise aujourd'hui à notre examen permet de répondre de manière adaptée et maîtrisée aux difficultés rencontrées par le secteur des ventes aux enchères. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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