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Intervention de Philippe Houillon

Réunion du 31 mai 2011 à 21h45
Ventes de meubles aux enchères publiques — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Houillon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le 26 avril dernier, le Sénat a examiné en deuxième lecture la proposition de loi de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, que notre assemblée avait modifiée en première lecture le 25 janvier.

Plus de trois ans se sont écoulés depuis le dépôt, par les sénateurs Marini et Gaillard, de ce texte dont l'objectif consiste, d'une part, à transposer aux ventes volontaires de meubles aux enchères publiques les prescriptions de la directive « Services » du 12 décembre 2006 et, d'autre part, à moderniser les conditions d'activité des acteurs du secteur, pour leur permettre de rivaliser plus efficacement avec leurs concurrents anglo-saxons.

Or les derniers chiffres rendus publics par le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques montrent l'urgence de l'adoption de cette réforme. En 2010, le montant global des adjudications réalisées en France a accusé une diminution de 2,8 % par rapport à 2009, exercice lui-même contrasté.

Qui plus est, l'an passé, les cessions de biens à forte valeur ajoutée tels que les objets d'art et objets de collection ou les chevaux ont régressé assez nettement, dans des proportions respectives de 6,4 % et 4,2 %, alors que les ventes de biens traditionnellement porteurs en période de crise, c'est-à-dire essentiellement les véhicules d'occasion, ont augmenté de 2 %.

Autre indice éclairant, le classement des principales sociétés de ventes volontaires en France montre que les plus importantes dans le domaine de l'art et des objets de collection sont aujourd'hui les filiales de Sotheby's et Christie's, tandis que les premières entités proprement nationales interviennent plus particulièrement pour les ventes de véhicules d'occasion et de matériel industriel ou celles de chevaux. À l'exception notable d'Artcurial, peu d'opérateurs français sont désormais capables de rivaliser avec les majors anglo-saxonnes des enchères.

Dans ce contexte, il est heureux que cette réforme, qui vise principalement à dynamiser le secteur tout en augmentant la sécurité offerte aux vendeurs et aux acquéreurs, ait rapidement été réinscrite à l'ordre du jour de notre assemblée.

En deuxième lecture, le Sénat n'a pas contesté le bien-fondé de l'essentiel des modifications apportées par notre assemblée en janvier dernier, puisqu'il a adopté vingt-six articles conformes et accepté une suppression d'article. Ainsi, trente-neuf articles du texte ont d'ores et déjà été votés dans les mêmes termes et onze seulement restent désormais en discussion.

Parcimonieuses sur la forme, les modifications apportées par les sénateurs n'en ont pas moins une réelle portée sur le fond et elles se sont parfois notablement écartées de la position initiale de notre assemblée.

Lors de sa réunion du 11 mai dernier, la commission des lois a estimé que certains des changements issus de la deuxième lecture du Sénat méritaient de se voir conforter.

Il a notamment été décidé de valider les dispositions identifiant les biens susceptibles d'être vendus aux enchères publiques – article 3 –, interdisant la revente à perte de biens neufs par l'intermédiaire du procédé des enchères – article 12 bis –, régissant la période transitoire qui s'appliquera aux courtiers de marchandises assermentés pour la mise en oeuvre de la réforme de leur statut – article 46 – et complétant les règles concernant le ressort d'activité des commissaires-priseurs judiciaires – article 47. Ces apports et précisions des sénateurs se révèlent bienvenus.

De même, par cohérence avec sa position en première lecture, la commission des lois a conforté le choix des sénateurs d'ouvrir aux opérateurs encore en activité la composition du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques – article 22 –, sous réserve de l'instauration de mécanismes de déport dans les dossiers individuels concernant des opérateurs concurrents, ainsi que vous venez de le rappeler, monsieur le garde des sceaux. Tout au plus a-t-elle transféré ces mécanismes de déport au sein de dispositions plus appropriées au regard des exigences de la directive. Le transfert a eu lieu de l'article 23 à l'article 22.

Sur cet aspect, je me réjouis que la position du Gouvernement ait évolué vers davantage d'écoute des arguments du Parlement. L'article 14 de la directive « Services » n'interdit pas la présence d'opérateurs en activité dans le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, dès lors que le législateur national veille à empêcher que les membres de l'autorité de régulation du secteur soient amenés à statuer sur des situations individuelles d'opérateurs concurrents. Grâce au texte adopté en commission, nous ne nous écarterons pas de l'épure communautaire.

Sur les autres dispositions du texte en navette, la commission des lois a apporté des modifications plus substantielles.

Elle a tout d'abord supprimé à l'unanimité, à l'article 4, le plafonnement de chiffre d'affaires réalisé par les notaires et les huissiers de justice en matière de ventes aux enchères, le caractère accessoire de cette activité devant rester tel que la jurisprudence et la doctrine l'ont établi. D'ores et déjà en effet, l'activité de ventes volontaires ne doit pas entraver la mission principale monopolistique de l'huissier de justice et du notaire. En outre, cette activité s'apprécie au regard d'un faisceau d'indices recouvrant tout à la fois le produit financier dégagé, le nombre des ventes et leur fréquence, ce qui paraît suffisant.

À l'article 19, la commission a considéré que le Sénat a utilement précisé les missions conférées au Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques mais, dans un souci d'intelligibilité, elle a néanmoins adopté quelques aménagements rédactionnels.

La commission a également abrogé l'article 36 bis, dont la portée clarificatrice ne lui a pas paru évidente compte tenu de la précision du droit déjà en vigueur.

Il a par ailleurs été décidé, à l'article 42, de revenir à une définition plus précise et juridiquement moins risquée des activités complémentaires autorisées pour les sociétés de ventes volontaires dans lesquelles les commissaires-priseurs judiciaires sont parties prenantes. En effet, il a semblé à la commission que les sénateurs ont pris le risque de fragiliser le statut des intéressés au regard des institutions communautaires en adoptant des dispositions au demeurant imprécises dans leur rédaction et leurs effets.

Enfin, il nous a paru nécessaire, à l'article 45, de lever certaines restrictions de nouveau imposées aux courtiers de marchandises assermentés pour les ventes judiciaires au détail.

Du fait de ces aménagements, je crois pouvoir dire que le texte qui nous est soumis en deuxième lecture concilie davantage les changements exigés par le droit communautaire avec la préservation des équilibres professionnels d'un secteur d'activité appelé à se développer fortement.

J'appelle donc notre assemblée à adopter cette proposition de loi, en formant l'espoir que le Gouvernement ou les deux présidents des assemblées prendront les dispositions nécessaires pour qu'une commission mixte paritaire se réunisse et que la navette parlementaire trouve ainsi une conclusion rapide.

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