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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 2 mai 2011 à 17h00
Attentat de marrakech — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Les chiffres sur les perspectives d'activité sont solides et nous laissent espérer une croissance robuste, tout particulièrement au premier trimestre. J'ajoute que l'INSEE a révisé à la hausse sa prévision de croissance pour le premier trimestre 2011, l'estimant à 0,6 %, de même que l'OCDE, à 0,9 %. On verra ce qu'il en sera, mais on ne peut que s'en réjouir.

Quatrième facteur à ranger dans la catégorie des positifs : la consommation soutenue des ménages. Avec une augmentation de 1,2 % au premier trimestre, malgré l'extinction du dispositif de prime à la casse, elle a évidemment soutenu la croissance.

Nous estimons que les facteurs exogènes, pour la plupart d'entre eux à caractère négatif, et les facteurs endogènes, en majorité positifs, vont globalement s'annuler, ce qui m'amène à maintenir la prévision d'activité à plus 2 % pour l'année 2011.

Comment cette croissance va-t-elle être alimentée ?

Le premier moteur, ce sera les exportations. Celles-ci ont aujourd'hui un rythme de croissance exactement identique à celui des exportations allemandes.

Deuxième moteur : l'investissement des entreprises. Je rappelle que les chefs d'entreprise prévoient une hausse, en 2011, de l'ordre de 14 %. J'accorde une particulière attention à un autre indicateur : l'augmentation du nombre de demandes de permis de construire, qui atteint 17 %. Cela constitue une nette indication de la reprise dans le secteur du BTP et dans celui de la construction, des secteurs porteurs et entraîneurs.

Le troisième moteur, c'est celui des stocks. Le cycle des stocks est extrêmement intéressant à observer parce que l'on s'aperçoit que l'ensemble des entreprises des autres pays de l'Union européenne ont reconstitué leurs stocks, contrairement aux entreprises françaises. Mais les reconstitutions de stocks interviendront très probablement pendant le premier semestre 2011 en raison de la reprise d'activité. Nous allons voir le résultat de ces reconstitutions, qui seront particulièrement notables au cours de cette période.

Enfin, dernier facteur de la croissance : les créations d'emploi. Quand on a, je l'ai évoqué, 78 000 créations nettes pendant le premier semestre 2011, cela signifie très clairement plus de salaire à la fin du mois, plus de pouvoir d'achat et donc plus de consommation, celle-ci constituant, elle aussi, un moteur supplémentaire de croissance.

J'estime qu'en 2012, la croissance française perdurera, à un rythme que je chiffre à 2,25 % parce que la reprise d'activité va se poursuivre, fondée sur le dynamisme de l'investissement et sur l'amélioration du marché du travail. Une telle amélioration est susceptible de doper la consommation et de contribuer à la diminution du taux d'épargne des ménages en France, qui est particulièrement élevé par rapport aux autres pays de l'Union européenne. En 2008, malgré la crise, nous avons fait le choix de poursuivre le rythme des réformes structurelles pour préparer la reprise. Là aussi, les réformes que nous avons engagées et que vous avez votées, au premier rang desquelles la réforme des retraites, vont permettre d'alimenter la croissance et contribuer à la réduction du déficit.

Mais les incertitudes pesant sur l'environnement international m'amènent à légèrement réviser, de 2,5 % à 2,25 %, la prévision de croissance pour l'année 2012. En effet, il y a une augmentation significative du prix du pétrole, matière première déterminante, largement au-delà des 78 dollars le baril que nous avions initialement envisagés. De plus, les crises liées aux dettes souveraines n'ont pas toutes été anticipées au début de 2010 et ne sont pas encore totalement résorbées, ce qui entraînera très certainement un effort de consolidation budgétaire, prôné d'ailleurs par le Fonds monétaire international et par la Commission européenne, réduisant ainsi légèrement la demande de produits français de la part des autres pays de l'Union. D'où la révision à la baisse, à 2,25 %.

Quelques mots sur le déficit public. Je laisserai évidemment à François Baroin le soin de détailler la trajectoire de notre déficit, mais je souligne que, pour l'année 2010, il a été revu de 7,7 % à 7 %. Cela nous permet de ramener de 6 % à 5,7 % le chiffre prévu pour l'année 2011. Je veux rappeler très solennellement l'engagement du gouvernement français, à l'égard de ses partenaires européens en particulier et sur la scène internationale en général, l'engagement inébranlable et inconditionnel de tenir les objectifs de réduction du déficit et d'assainissement des finances publiques : 3 % de déficit en 2013 et 2 % en 2014. Nous réduirons ainsi notre déficit structurel de quatre points entre 2010 et 2013, ce qui correspond à l'engagement que nous avons pris vis-à-vis de nos partenaires européens.

Comment arriverons-nous à réduire le déficit, à tenir nos engagements ? Tout simplement par moins de dépenses, par le respect de ce que j'appelle la double toise ou la double norme, que François Baroin pourra détailler plus avant. À défaut d'une pilule miracle de refinancement, nous sommes malheureusement obligés de passer par des financeurs, et je tiens à noter que les marchés financiers ont souligné la capacité de la France, grâce à ce gouvernement, notamment à François Baroin et à Roselyne Bachelot-Narquin, à tenir, pour la première fois, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, le fameux ONDAM, et à s'orienter vers une réduction de 0,1 point en 2011, puis à nouveau en 2012, pour le stabiliser à plus 2,8 %.

Deuxième méthode pour réduire le déficit : moins de niches fiscales et sociales. Nous maintenons notre engagement de suppression de certaines niches, conformément au rythme prévu dans la loi de programmation des finances publiques, c'est-à-dire pour un montant plancher de 11 milliards d'euros en 2011 et de 3 milliards d'euros annuels par la suite. Nous supprimerons en priorité les niches les moins utiles. Nous nous refusons à aborder l'ensemble de cette question sur la base d'une hausse généralisée des impôts.

Enfin, il faut plus de recettes. Nous voulons bénéficier de la reprise de la croissance, grâce à un système bancaire français solide et à une capacité d'épargne des ménages forte qui nous permet d'envisager un certain dynamisme. Dans ce contexte, pour les mêmes raisons qu'en 2009 la baisse des recettes publiques a été brutale, nous espérons bénéficier d'une hausse significative de nos recettes. Cela justifie que nous ayons adopté un coefficient d'élasticité très légèrement supérieur à l'unité. À ce titre, c'est une option parfaitement raisonnable.

En 2011 et 2012, la combinaison d'un déficit public encore relativement élevé et les prêts que nous consentons à plusieurs États membres de la zone euro, prêts financés par notre dette, nous amènera à augmenter la dette publique pendant encore deux exercices, avec un pic de 86 %. À partir de 2013, nous obtiendrons enfin un reflux de la dette publique, lequel continuera de manière rapide et mécanique.

Mesdames, messieurs les députés, ne nous y trompons pas : cette politique d'assainissement des finances publiques n'est pas une contrainte, mais tout simplement la condition indispensable pour la reprise de la croissance et pour que, dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance auquel s'ajoute le pacte de compétitivité et de convergence, nous puissions rétablir notre situation économique, dans le cadre européen auquel nous croyons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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