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Intervention de Boris Tadić

Réunion du 6 avril 2011 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Boris Tadić, Président de la République de Serbie :

C'est un grand honneur de m'exprimer aujourd'hui devant votre commission. Je m'efforcerai de vous décrire les lignes essentielles de notre politique étrangère.

Alliée de la France lors de la Seconde Guerre mondiale, la Serbie a toujours entretenu avec elle des rapports privilégiés. Votre pays a considérablement influencé les réformes de notre système administratif au début du XXe siècle et, aujourd'hui encore, il contribue à la formation de nos cadres administratifs.

État indépendant, la Serbie fut intégrée au Royaume de Yougoslavie après la Première Guerre mondiale, puis devint, après 1945, l'une des six républiques de la Fédération yougoslave, que les conflits ethniques des années quatre-vingt-dix ont disloquée. Les conséquences de ces événements tragiques se font encore sentir aujourd'hui, non seulement en Serbie mais aussi dans tout l'ouest des Balkans.

Après la chute de Milošević – consécutive à son refus de reconnaître les résultats des élections régulières –, notre pays, convaincu que son avenir est au sein de l'Union européenne, a engagé des réformes de grande envergure, parfois difficiles pour nos concitoyens.

La Serbie est frontalière des pays du Sud-Est européen, et nos concitoyens habitent partout dans la région. Nous y avons engagé, après les conflits des années quatre-vingt-dix, un processus de réconciliation auquel j'ai moi-même pris part à travers plusieurs actes symboliques, comme mes visites à Srebrenica et à Vukovar, où j'ai présenté les excuses de mon peuple.

Les relations avec nos voisins, sur les plans politique et économique, sont désormais excellentes ; une nouvelle génération d'hommes politiques, qui n'ont pas pris part aux conflits, a pris le relais. Il y a quelques jours, le Premier ministre slovène, la Première ministre croate et moi-même avons conclu un accord pour renforcer les liens économiques au sein de la « Yougosphère » et favoriser les partenariats entre nos trois pays ; une société commune de chemins de fer vient ainsi d'être créée. Enfin, notre situation géographique, à mi-chemin entre l'Europe d'une part, la Turquie et l'Asie de l'autre, est propice aux échanges commerciaux.

Nous oeuvrons à la consolidation de la paix dans les Balkans, tout en souhaitant intégrer l'Union européenne. S'agissant à cet égard de la coopération avec le Tribunal pénal international, nous mettons tout en oeuvre pour retrouver le général Ratko Mladić et Goran Hadžić. Je dois toutefois constater, en tant que Président, que nos efforts ne sont pas toujours compris. Nous avons arrêté et déféré quarante-quatre suspects devant le tribunal de La Haye ; le processus de réconciliation dans les Balkans de l'Ouest passe par l'arrestation des deux derniers fugitifs, faute de quoi il ne pourra y avoir d'État viable : il y va donc de la crédibilité de mon pays et de mon mandat de Président. J'avais d'ailleurs espéré être en mesure d'annoncer l'arrestation du général Mladić aussitôt après celle de Radovan Karadžić. Quoi qu'il en soit, je vous assure que, si le général Mladić est en Serbie, il sera arrêté : c'est là le voeu unanime du Gouvernement et de tous les partis dirigeants.

Par ailleurs, la crise a révélé la fragilité de notre économie. Alors que notre croissance atteignait plus de 5 % après la révolution démocratique, nous sommes aujourd'hui entrés en récession. Le taux de chômage, maladie chronique de la société serbe, est passé de 14 % avant la crise à environ 20 % aujourd'hui, soit autant qu'en Espagne : les grands espoirs nés de la révolution démocratique ont été déçus. Nous essayons toutefois d'atténuer les dégâts de la crise en conduisant une politique économique responsable, qui permet à notre pays d'afficher de meilleurs résultats que ses voisins, malgré l'important taux de chômage, l'inflation – que nous espérons ramener cette année de 10 à 5 % – et le déficit commercial. Le meilleur indicateur est la progression de 25 % des exportations. Notre déficit public, lui, avoisine les 4 % et notre endettement, les 40 %. La notation financière de notre pays a été deux fois réévaluée, et les réserves de valeurs sont reparties à la hausse. Tous les indicateurs macro-économiques sont stables, et la Serbie n'est pas un pays surendetté. Nous investissons, même si c'est encore trop peu, dans les sciences, l'éducation, les infrastructures et l'énergie.

Nous espérons, comme je l'ai dit, devenir candidats à l'entrée dans l'Union européenne avant la fin de l'année ; il faudra pour cela assurer le succès des réformes que nous continuerons de mettre en oeuvre jusqu'en septembre ou octobre. La fixation d'une date pour le début des négociations avec la Commission européenne est, en plus d'un rêve personnel, un objectif stratégique essentiel pour la Serbie, car elle rendrait le processus d'intégration irréversible.

Je le répète, nous coopérons avec le Tribunal de La Haye et espérons arrêter les deux derniers fugitifs, soit par nos propres moyens s'ils sont en Serbie, soit, s'ils n'y sont plus, avec l'aide de nos partenaires. Nous poursuivons nos efforts en faveur de la réconciliation dans les Balkans occidentaux, condition d'une plus grande stabilité de la région et du développement des investissements étrangers.

Notre pays désire réellement approfondir les relations avec la France et renouer avec elle le partenariat stratégique d'avant la Première Guerre mondiale ; il a gardé une vive conscience de la longue amitié qui le lie historiquement à la France, et le français est l'une des principales langues étrangères qui y est enseignée. Nous espérons donc le soutien de la France dans notre candidature à l'Union européenne.

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