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Intervention de Michel Heinrich

Réunion du 7 avril 2011 à 11h00
Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Heinrich, rapporteur :

M. Régis Juanico l'a rappelé, la performance des politiques sociales en Europe est un sujet vaste qui présente de nombreux aspects intéressants. Le Règlement de l'Assemblée prévoyant que l'étude doit être réalisée dans un délai de douze mois, nos premières auditions menées nous ont convaincus de la nécessité de préciser le champ de nos investigations pour respecter ce délai. Nous proposons donc une démarche en deux parties : une première approche transversale et macro-économique de la performance des politiques sociales, complétée par une analyse plus fine visant à identifier des bonnes pratiques concernant certains aspects des politiques familiales et des politiques de l'emploi, qui relèvent de deux champs distincts mais dont certains enjeux sont communs.

Une première étude pourrait concerner les politiques du marché du travail. Elles présentent une importance majeure pour lutter contre la pauvreté, promouvoir la cohésion sociale et soutenir la croissance, mais aussi prévenir certaines dépenses sociales, par exemple au titre des minima sociaux ou de l'assurance chômage.

Nous envisageons d'étudier plus précisément les dispositifs qui apparaissent les plus performants pour favoriser l'accès ou le retour à l'emploi. Cette question englobe les trois critères de la performance : l'accélération du retour à l'emploi relève de l'efficacité, l'amélioration du service rendu aux personnes en recherche d'emploi témoigne d'un souci de qualité de service et l'optimisation des dépenses au titre de l'indemnisation du chômage est une démarche d'efficience.

L'étude pourrait porter sur cinq pays environ : outre la France naturellement, des pays comparables en taille et en proximité, notamment l'Allemagne ou le Royaume-Uni, et d'autres qui se caractérisent par des résultats intéressants comme la Suède, les Pays-Bas ou le Danemark pour les pays nordiques, le Portugal pour les pays latins ou l'Autriche pour l'Europe continentale.

Après avoir défini les principales caractéristiques des politiques du marché du travail des pays concernés – par l'analyse des modèles institutionnels, de la nature et de la structure des grandes catégories de dépenses, des transitions entre chômage, inactivité et emploi – nous pourrions comparer les principaux dispositifs d'accompagnement proposés aux demandeurs d'emploi. La palette des prestations offertes au demandeur d'emploi varie selon les pays. Dans certains États, on propose même du coaching sportif ou diététique – mais avec quels moyens, et pour quels résultats ?

Une réflexion similaire serait utile au sujet des organismes de placement : quel est leur rôle, et de quels moyens disposent-ils ? Quels sont les rôles respectifs du service public de l'emploi et des acteurs privés ? Comment les besoins des usagers sont-ils pris en compte et les partenaires sociaux associés?

Enfin, il nous paraît important de comparer les modalités d'indemnisation du chômage dans différents pays.

Un second angle d'étude approfondie pourrait concerner les politiques familiales. Au cours des auditions, il est apparu que les recommandations de l'Union européenne dans le champ des politiques familiales concernent pour l'essentiel des objectifs de taux d'emploi et de qualité de l'emploi. L'originalité de l'approche européenne sur ce point tient à l'importance accordée à la dimension du « genre », vue sous l'angle non seulement de l'égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi des conditions de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, qui est considérée par les travailleurs européens comme le troisième critère de qualité de leur emploi après la stabilité et le salaire. La question des familles monoparentales, a également été évoquée ; il y a là des enjeux importants au regard de la lutte contre la pauvreté mais aussi des difficultés rencontrées pour l'accès à l'emploi.

Après avoir cerné les caractéristiques des politiques familiales dans un panel de pays en examinant les dépenses et leur nature ainsi que les résultats comparés obtenus au regard d'indicateurs clés, nous pourrions étudier comment favoriser la conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle, en analysant en particulier la disponibilité et la qualité des structures d'accueil des jeunes enfants. Il nous semble également important de comparer les politiques visant les familles monoparentales : quel est, pour elles, l'impact des politiques sociales et familiales, notamment en termes de redistribution et de lutte contre la pauvreté ? Quels principaux dispositifs d'accompagnement à l'emploi leur sont proposés ? Dans quelle mesure le système fiscal et le système social encouragent-il les parents isolés à exercer une activité professionnelle ? Ces questions nous paraissent mériter une attention particulière. L'évaluation pourrait porter sur cinq pays environ : outre la France, nous pensons à l'Allemagne et au Royaume-Uni pour les raisons précitées mais aussi, pour leurs résultats et l'originalité de leurs politiques, à l'Autriche, au Portugal, à la Suède ou au Danemark.

Pour répondre à ces deux champs d'interrogations, plusieurs outils d'investigation peuvent être envisagés : en premier lieu, un cycle d'auditions spécialisé sur les thèmes retenus ; une revue des ressources documentaires disponibles ; l'envoi de questionnaires aux ambassades et aux Parlements des pays étudiés ainsi qu'aux administrations françaises compétentes.

Ensuite, trois ou quatre missions, selon les contraintes du calendrier des travaux, nous permettraient de rencontrer des responsables institutionnels, des responsables de l'évaluation et des représentants des bénéficiaires et des usagers, syndicats ou associations de chômeurs par exemple, dans les pays retenus et à Bruxelles.

Enfin, compte tenu de l'ampleur du travail envisagé et des obstacles linguistiques et matériels mais aussi pour nous appuyer sur des enquêtes qualitatives ou des données nouvelles, il nous paraît nécessaire de solliciter la commande d'études par les prestataires retenus au titre de l'accord-cadre défini par le CEC. Ces études porteraient en premier lieu sur les politiques familiales en Europe ; elles concerneraient essentiellement les structures d'accueil des enfants et les parents isolés. Elles pourraient également porter sur une partie du thème des « politiques d'accès à l'emploi », car même si, en ce domaine, les données et les études disponibles sont plus nombreuses et accessibles, nous rencontrerons des obstacles linguistiques.

Sous réserve de l'accord de principe du Comité, un cahier des charges précis pourra être soumis aux cinq prestataires sélectionnés dans l'accord cadre pour le lot des politiques sociales. Nous envisageons également de faire appel à un groupe informel d'experts, composé de plusieurs des personnes auditionnées, en vue d'apporter un avis technique. Après analyse et sélection des candidatures avec le concours du secrétariat du Comité, nous piloterons et suivrons naturellement la réalisation des travaux ainsi commandés.

Selon l'ampleur des investigations nécessaires, l'examen du rapport par le Comité pourrait être envisagé à l'automne, et au plus tard avant la fin de l'année 2011. Dans cette hypothèse plus tardive, l'organisation au début de l'automne d'un ou plusieurs séminaires ou tables rondes sur une partie des thèmes d'étude proposés pourrait être envisagée.

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