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Intervention de Christian Paul

Réunion du 31 mars 2011 à 15h00
Application de la loi hôpital patients santé et territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Paul :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État chargée de la santé, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les députés, la réforme du Parlement nous conduit à regarder de plus près et plus précocement les conditions d'application et l'efficacité des textes de loi. C'est ce qui nous conduit cet après-midi à faire un bilan précis de la mise en oeuvre de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires ».

Mais il est vrai que faire à ce moment de l'agenda politique de notre pays le bilan de cette loi, c'est en quelque sorte faire aussi le bilan de la présente législature en matière d'offre de soins et plus généralement de politique de santé. Je rappelle en effet à l'Assemblée nationale que la loi HPST était censée constituer une véritable réforme cathédrale, affrontant la plupart des grandes questions de santé.

Le travail d'inventaire a été accompli par vos rapporteurs, avec le concours actif des services de l'Assemblée nationale. Je veux le dire très clairement, comme nous l'avons fait en commission : les deux tiers de la production réglementaire ont été accomplis. Mais vous comprendrez, madame la secrétaire d'État, que mon appréciation ne saurait s'arrêter à ce point-là.

Je renvoie bien sûr à la lecture de ce rapport très détaillé, mais aussi à la contribution que j'ai signée au nom du groupe SRC et qui complète l'inventaire des textes réglementaires. Je voudrais exprimer en quelques minutes l'essentiel du diagnostic que nous portons sur l'application de cette loi.

Le premier échec de la mise en oeuvre de la loi HPST concerne les inégalités des Français devant l'accès à une offre de soins de qualité. Cette loi était notoirement insuffisante, nous l'avions dit à l'époque ; sa mise en oeuvre est très lente et ses effets, il faut le reconnaître, son aujourd'hui inexistants dans les territoires. La répartition très inégale des médecins s'aggrave et la situation dans les territoires, qu'ils soient urbains ou ruraux, n'a pas bougé d'un iota.

Il faut le souligner : le manque de courage initial se double d'un recul, désormais orchestré par la proposition de loi du sénateur Jean-Pierre Fourcade, relayant en la matière les positions les plus conservatrices. Le Parlement « délégifère » en quelque sorte : avant même que l'encre soit sèche et que la loi HPST soit appliquée, on la réécrit et, ce faisant, on l'affaiblit. Nous avons vu hier, en commission des affaires sociales, comment la majorité entendait supprimer les très rares outils de solidarité entre les professionnels de santé. Je veux parler du contrat de santé solidarité, qu'avait souhaité instaurer notre collègue Jean-Marie Rolland et qui va être supprimé par l'Assemblée nationale comme il l'a été par le Sénat.

À un an de l'élection présidentielle, mes chers collègues, ce message est d'une cruelle simplicité et, je dois le dire, d'un grand cynisme. C'est en effet un message en direction d'une fraction du corps médical, celle qui est arc-boutée sur le statu quo ; ce n'est en rien un signal en direction des patients et des territoires, qui sont quand même les grands oubliés de la loi HPST.

Ce sont donc cinq ans pour rien ; les déserts médicaux progressent. Tel est le bilan de cette législature en matière de santé. Je sais bien que l'on nous dit que nos jugements sont parfois un peu radicaux, voire excessifs, mais il suffit d'aller dans une très grande majorité des départements français pour savoir qu'il y a aujourd'hui une génération de médecins hospitaliers, généralistes ou spécialistes, qui partent à la retraite sans qu'il n'y ait personne pour les remplacer.

Les états généraux de l'offre de soins auraient pu laisser croire à une volonté de réforme. Il n'en est rien. J'en témoigne en tant que rapporteur pour le compte de l'Assemblée nationale sur l'application de la loi, mais je pourrais aussi le faire en tant qu'élu de la Nièvre et de Bourgogne.

Plus grave encore, la possibilité d'une grande réforme du système de santé, offrant à la fois une stratégie préventive et prédictive, et non plus simplement curative, a été purement et simplement enterrée. Je ne doute pas que Jean-Marie Le Guen aille plus loin sur ces questions et vous renvoie, pour nos propositions – dont je suis prêt à discuter avec vous, madame la secrétaire d'État –, à la contribution présente dans le rapport.

En ce qui concerne l'hôpital, j'irai plus vite car le temps m'est compté. Le rapport le dit également : la loi HPST n'a rien d'un big bang : c'est un mauvais cap. Il y avait une volonté de transformation purement managériale, d'ailleurs directement inspirée par le Président de la République, qui s'est énormément exprimé sur ces sujets. Qu'en reste-t-il aujourd'hui ?

Une crise financière aiguë, que l'introduction brutale de la tarification à l'activité est bien sûr venue encore amplifier ; une crise humaine sans précédent, dont témoigne la manifestation prévue samedi à Paris, qui rassemblera des personnels hospitaliers venant de la France entière ; des restructurations sous contrainte budgétaire, ce qui est le contraire d'une politique d'organisation hospitalière ; enfin, une régression de la démocratie sanitaire car on voit bien que ni les élus ni les associations de malades et d'usagers ne sont les bienvenus aujourd'hui dans les hôpitaux comme dans les agences régionales de santé.

Un mot pour terminer sur les ARS. Nous ne renions pas, bien évidemment, notre intérêt, que nous avions exprimé au moment du débat, pour une rationalisation des circuits de décision en matière sanitaire, mais il est vrai que, pour l'instant, un an et demi après la loi, c'est avant tout un meccano administratif à la française. La mise en place des ARS a été très longue.

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