Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Étienne Pinte

Réunion du 10 mars 2011 à 15h00
Immigration intégration et nationalité — Article 41, amendements 33 126 160

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉtienne Pinte :

Ce débat sur l'allongement de la durée de rétention a fait l'objet de nombreuses discussions. J'ai moi-même beaucoup visité les centres de rétention et j'ai interrogé les responsables de la police de l'air et des frontières, les associations et tous ceux qui accompagnent les personnes retenues. Pour eux, la première prolongation de la rétention, de quinze jours actuellement à vingt jours, ne se justifie pas. Quant à la seconde prolongation, elle passe à vingt jours maximum.

Porter de trente-deux jours maximum à quarante-cinq jours la rétention administrative traduit une véritable banalisation de la privation de liberté alors qu'il s'agirait plutôt de réfléchir à des solutions alternatives à la rétention, comme nous l'avons dit ce matin. Outre le fait de porter atteinte aux droits fondamentaux des migrants, cette proposition d'allongement de la durée de rétention constitue à mes yeux une mesure inefficace et coûteuse.

En effet, toutes les études qui ont été menées et tous les échanges que j'ai eus avec ceux qui s'occupent de la rétention démontrent que les étrangers, lorsqu'ils sont reconduits, le sont dans les tout premiers jours de la rétention, entre neuf et dix jours. Quant à ceux qui restent en rétention durant trente-deux jours, ils sont généralement non pas reconduits mais libérés.

L'enfermement des étrangers génère un coût important pour les finances publiques – je suis d'ailleurs étonné que cet article ne soit pas tombé sous le coup de l'article 40 – et mobilise de nombreux fonctionnaires non seulement au sein de la police, mais également dans les préfectures et dans les tribunaux. L'allongement de la durée de rétention s'inscrit donc à contre-courant d'une politique générale de réduction des déficits et du nombre de fonctionnaires, sans qu'un bénéfice substantiel paraisse pouvoir en être retiré.

Hier, le ministre nous a dit que l'augmentation du délai de rétention était surtout destinée à deux pays qui ne voulaient pas accorder des visas consulaires, le Mali et la Chine – ce sont les deux exemples qu'il a cités. Que les choses soient bien claires, le Mali n'a jamais voulu signer d'accord de retour avec la France pour deux raisons : une raison politique et une raison économique.

D'une part, ils ne veulent pas contribuer à participer à des décisions politiques vis-à-vis de leurs propres ressortissants. Une participation au retour des Maliens qui sont en France aurait, selon eux, sur le plan intérieur des incidences politiques et psychologiques importantes.

D'autre part, les Maliens se rendent bien compte que tous ceux qui travaillent en France alimentent, financièrement, les familles, les proches, les amis. Cette source de revenus très importante facilite la vie de tous ceux qui sont restés au Mali. C'est la raison pour laquelle le Mali ne donne pas, en général, de visa consulaire.

Le cas de la Chine est différent parce qu'il y a relativement peu de Chinois en centre de rétention : les Chinois s'occupent eux-mêmes de la manière dont ils reçoivent leurs coreligionnaires.

Pour toutes ces raisons, aussi bien politiques que financières, je ne vois pas l'utilité de prolonger la durée de rétention de trente-deux à quarante-cinq jours.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion