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Intervention de Hervé Schricke

Réunion du 2 mars 2011 à 11h15
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Hervé Schricke, président de l'Association française des investisseurs en capital :

Nous vous remercions de nous donner l'occasion de nous exprimer sur la fiscalité du patrimoine, et plus globalement sur l'orientation de l'épargne. Notre métier consiste à prendre des participations dans le capital d'entreprises, et par conséquent à renforcer leurs fonds propres, 80 % de nos opérations concernant les PME.

En France, les petites et moyennes entreprises manquent chroniquement de fonds propres, et la situation est en train de s'aggraver. En outre, le nombre d'entreprises de taille intermédiaire, les ETI, initialement moins élevé qu'en Allemagne, tend encore à se réduire. Dans ce contexte, les réglementations, qui vont augmenter le besoin de fonds propres des PME, réduiront, voire supprimeront l'incitation des institutionnels, dont les fonds représentaient de 55 à 60 % de nos ressources, à se porter vers le capital investissement. Les dispositions de Bâle 3 réduiront la capacité d'investissement et de crédit des banques. En outre, elles renchériront le crédit et le rendront plus sélectif, les banquiers prêtant naturellement aux entreprises dont la surface financière ou la structure de bilan sont les plus satisfaisantes. Cette situation devrait stimuler l'intérêt pour les fonds propres, ce qui est en soi positif, mais les nouvelles règles, qui imposeront aux banques de mettre face à leurs emplois davantage de fonds propres, pénaliseront aussi le capital, c'est-à-dire les actions, cotées ou non, plus que les autres actifs.

La réglementation Solvabilité 2 aura la même incidence sur l'appétit des compagnies d'assurance pour l'investissement, qui devront mettre face à leurs emplois en actions, particulièrement non cotées, une part plus importante de fonds propres. L'exigence d'une rentabilité plus forte s'accompagnera donc d'un frein à l'investissement, alors que les compagnies d'assurance détiennent la plus grande part de l'épargne française.

Dès lors que la collectivité consent un effort pour aider à la constitution de l'épargne et l'orienter vers un produit, on doit s'assurer que son utilisation est efficace en termes de création d'emplois salariés. C'est le cas des fonds propres des PME car, lorsqu'une entreprise voit s'améliorer sa situation financière, elle devient plus apte à investir, à recruter et donc à générer des richesses. Puisque les ressources majeures s'investissent dans les assurances-vie, détenues par les compagnies d'assurance, il faut s'assurer que le différentiel de fiscalité encourage l'épargne à s'orienter vers le capital, particulièrement vers les actions non cotées. En outre, les incitations fiscales doivent être attractives. Le maigre succès des contrats DSK puis NSK tient à ce que l'avantage fiscal, qui se résume à un différentiel sur la fiscalité à la « sortie », n'a pas été perçu par les épargnants.

Certaines mesures réglementaires pourraient orienter dans une proportion raisonnable l'épargne stable ou longue vers les fonds propres des PME. Une fraction des 75 milliards d'euros que représente la partie non centralisée des livrets d'épargne pourrait les alimenter, au travers de fonds d'investissement, ce qui sécuriserait les emplois sans faire courir de risque aux épargnants.

Le même type de mesure pourrait s'appliquer à l'ensemble de l'épargne constituée au travers d'avantages fiscaux ou sociaux, afin de la drainer vers les systèmes d'épargne pour la retraite. La France est l'un des rares pays dans lesquels il n'existe quasiment pas de fonds de pension, et les autres pays qui bénéficient de ces systèmes ne sont pas soumis à Solvabilité 2.

Un effort significatif doit également être fait pour soutenir l'innovation. Si l'ISF est réduit ou supprimé, les ressources allouées aux fonds propres des PME par l'investissement direct ou par le biais de fonds – lesquelles représentent 300 millions d'euros, les investissements favorisés par la loi TEPA portant sur un total de 1 100 millions d'euros – diminueront de manière importante. Nous suggérons de transformer le dispositif Madelin en relevant les plafonds pour l'ensemble des investissements dans les PME et de porter à 35 % la réduction pour investissement dans l'innovation, domaine où le risque perçu par les souscripteurs est sensiblement plus important.

Enfin, il faut aider les entreprises industrielles à s'orienter vers le capital investissement industriel – corporate venture – en réactivant le dispositif de la société financière de l'innovation, qui permet l'amortissement fiscal des appels de fonds. On encouragerait ainsi les industriels et les PME à travailler ensemble dans un contexte objectif où ils partagent le même intérêt pour certaines technologies.

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