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Intervention de Vincent Drezet

Réunion du 16 février 2011 à 11h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Vincent Drezet, secrétaire national du Syndicat national unifié des impôts, SNUI :

Pour ce qui est de l'évasion fiscale dans les pays pauvres, nous ne disposons pas de données. On sait seulement que les niveaux de prélèvements obligatoires y sont très faibles, ce qui entrave le financement du développement. Au Sénégal, où nous nous sommes récemment rendus pour le forum social mondial, la question des zones franches et des incitations fiscales, notamment, se pose avec autant d'acuité, sinon plus, qu'en France.

Pour ce qui est de l'évasion fiscale en France, nous avons suivi la même méthode que le Conseil des prélèvements obligatoires, en extrapolant des résultats du contrôle fiscal des hypothèses sur le comportement d'ensemble des contribuables. Si nous arrivons à des résultats différents, c'est que le Conseil n'inclut dans sa définition de la fraude ni les irrégularités, ni l'évasion fiscale internationale. Il donne une estimation de 29 à 40 milliards d'euros, fraude sociale comprise – celle-ci représentant un quart du montant –, tandis que nous arrivons à une fourchette de 42 à 51 milliards d'euros.

Une autre estimation disponible est celle de la Commission européenne, qui a établi que les États membres perdent en moyenne de 10 à 12 % de leurs recettes de TVA.

La question des moyens se présente toujours sous trois aspects : juridique, matériel et humain. Une de nos propositions est d'avancer sur le terrain de l'expertise fiscale, où nous subissons une concurrence croissante du secteur privé qui, comme on l'a dit, se verrait bien réaliser les audits à notre place. Nous préconisons notamment l'établissement, au sein de la catégorie A, d'une véritable filière d'expertise. Nous souhaitons même que se structurent, dans les départements et dans les directions nationales, les groupes qui existent de façon parfois informelle pour expertiser de nouveaux schémas de fraude et livrer des propositions à leurs collègues. Cela donnerait un vrai « cap stratégique », pour reprendre une expression à la mode dans notre administration, en matière d'expertise fiscale, et cela viendrait en appui des vérificateurs confrontés sur place à des situations très diverses.

Des améliorations peuvent également intervenir en matière d'accès à l'information. Les agents de catégorie B sont trop mobilisés par les campagnes de réception et par le renforcement des agents de catégorie A lors des contrôles fiscaux, alors qu'ils pourraient être employés à la « pêche à l'information » dans le cadre du droit de communication.

Tout ce que je sais de la cellule à laquelle vous avez fait allusion, monsieur Terrasse, est qu'elle n'existe plus. Nous tenons à ce que le ministre soit responsable, non pas des dossiers personnels, mais de son administration, des orientations qu'il lui fixe et des moyens qu'il lui donne. À défaut, le risque est que l'on passe des contrats et que l'on transforme l'administration en agence. Auparavant, lorsqu'une situation fiscale pouvait donner lieu à un certain retentissement, des collègues apportaient un regard d'expertise sans qu'il existe de service structuré. Pour nous, la question reste de savoir si le droit fiscal est bien appliqué.

Au sujet de la franchise sur la résidence principale, je n'ai pas de réponse précise, monsieur Rodet. Nos hypothèses varient entre 400 000 et 500 000 euros. S'y ajouterait une franchise en base destinée à éviter de taxer les biens meubles au premier euro. Cela dit, il en résulterait sans doute un manque à gagner de 0,8 à 1 milliard d'euros, soit peu ou prou l'équivalent de ce que représente l'abattement de 30 %. L'intérêt d'une franchise en montant est de redistribuer les cartes, puisque les biens immobiliers à la valeur la plus élevée supporteraient un surcroît d'ISF : ils viendraient ainsi élargir l'assiette de l'impôt sur le patrimoine.

D'après les derniers documents internes, le ratio des contrôles fiscaux en Île-de-France est d'environ un tous les soixante-dix ans. Mais il faut aussi aborder la question par « tissu fiscal ». Les agriculteurs font l'objet de très peu de vérifications, par exemple, alors que certains réseaux de PME sont bien plus vérifiés, notamment en province. On sait aussi que les bénéfices non commerciaux sont très peu vérifiés en Île-de-France par rapport aux SARL classiques.

Pour ce qui est de la fiscalisation des biens immobiliers, nous soutenons de longue date que la valeur locative cadastrale représente, au moment de l'évaluation, une forme de valeur vénale, puisque des critères comme la situation ou l'aspect du bien sont pris en compte.

Dans le cadre de la contribution économique territoriale, l'évaluation des locaux professionnels se fait selon une nouvelle méthode comportant, entre autres, des distinctions de zones géographiques et de sous-groupes. Cela peut être considéré comme une expérimentation, mais nous restons attachés à la notion de valeur vénale de référence, qui évite aux ménages de subir les effets des booms immobiliers, et aux finances locales d'être victimes des crashs. Dans ce système, l'idée de base est que l'acheteur ou le locataire a la capacité contributive nécessaire pour acquitter le prix ou le loyer. La valeur vénale au jour de l'achat ou du bail peut donc servir de référence. Des évolutions peuvent intervenir ensuite en fonction du revenu afin de ne pas pénaliser les ménages.

Sachant que la direction générale des finances publiques, qui gère la conservation des hypothèques et les droits de mutation, détient de nombreux éléments statistiques, il nous semble tout à fait possible de créer un observatoire public de l'immobilier associant la DGFiP et d'autres acteurs – dont les collectivités locales – et fournissant des outils pour déterminer le prix des biens et l'assiette de leur imposition.

J'en viens aux holdings. Il nous semble que les structures passives ne devraient pas bénéficier des niches fiscales. Mais, une fois de plus, c'est le contrôle qui pose un problème.

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