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Intervention de Rose-Marie Van Lerberghe

Réunion du 21 décembre 2010 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Rose-Marie Van Lerberghe :

Je crois beaucoup au pouvoir de l'interpellation, du questionnement, de l'étonnement ; c'est d'ailleurs pourquoi il est bon de changer de milieu. Notre société est malheureusement très autiste : les médecins restent entre eux, les syndicats restent entre eux, les patrons restent entre eux… Les uns et les autres ont peu d'occasion de se confronter. Pour ma part, j'ai défendu le privé lorsque je travaillais dans le public et j'ai défendu le public lorsque je travaillais dans le privé. Je m'interdis d'arriver dans une fonction avec des préjugés. Le fonctionnement de l'hôpital, par exemple, n'a rien à voir avec l'idée que je m'en faisais en arrivant à la direction de l'AP-HP. Au CSM, j'ai l'espoir de découvrir un monde et de me forger progressivement une opinion.

Il me semble que la demande sociale vis-à-vis de la justice est de plus en pressante. Je ne connais pas de magistrats mais j'imagine que cette fonction n'est pas facile à assumer, d'autant que les attentes sont contradictoires : les justiciables réclament des interventions de qualité, mais dans des délais courts. Et la justice est investie par certains d'une mission qui va bien au-delà de celle de dire le droit au nom du peuple français : je suis très frappée d'entendre énoncer à la télévision l'idée que, le jugement n'ayant pas été assez sévère, les victimes ne pourront pas faire leur deuil ! D'un point de vue philosophique, c'est extraordinaire...

J'ai été soumise à la pression médiatique à l'AP-HP. On sait bien que la presse n'est intéressée que par ce qui ne va pas ; je suppose que c'est la même chose en matière de justice.

Par ailleurs, parler des juges en général, comme des médecins ou de tout autre corps social en général, n'a pas de sens. Le service public compte des personnes absolument extraordinaires, mais aussi, et il faut le dire, d'autres qui ne sont pas à la hauteur.

Et comment avoir une opinion sans bien connaître ? Certes j'ai eu quelques rapports avec l'institution judiciaire ; j'ai notamment, en début de carrière, à l'IGAS – avant la décentralisation –, travaillé avec des assistantes sociales de l'Aide sociale à l'enfance. Elles s'efforçaient, par une action de prévention, d'éviter l'appel au juge ; mais lorsque celui-ci était finalement saisi pour punir, son premier réflexe était de demander si le travail de prévention avait été fait. C'est une très bonne illustration de cette coexistence de points de vue différents : la société est très complexe et, avant de se faire une opinion, il est essentiel de tous les prendre en considération.

La justice a-t-elle réellement une image dégradée ? Je ne sais pas : si c'était le cas, les attentes ne seraient sans doute pas si fortes. La comparaison est difficile avec l'AP-HP, où les médecins ont des comptes à rendre ; la société souhaite que les magistrats rendent des comptes, mais aussi que leur indépendance soit garantie.

Concernant la problématique de la séparation entre magistrature du siège et magistrature du parquet, je me refuse à ce stade à avoir une opinion, ne sachant pas comment cela fonctionne concrètement, mais je perçois qu'il est contradictoire de vouloir garantir l'indépendance totale de la justice tout en assurant l'organisation du système. De même, avant d'évoquer un manque de moyens, il faut se pencher sur leur organisation. Aujourd'hui, je ne dispose pas des éléments pour me prononcer. J'espère me faire une opinion au bout de quelque temps, mais pour l'instant je m'y refuse car elle relèverait du préjugé.

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