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Intervention de Paul Giacobbi

Réunion du 3 novembre 2010 à 17h00
Commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation affectant le fonctionnement des économies

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Vous avez raison de lier la spéculation à la liquidité, qui est la condition de son développement. C'est l'excès de liquidité qui provoque les bulles spéculatives. Or les États-Unis se lancent dans une seconde vague de quantitative easing. La Fed va créer 1 000 milliards de dollars en achetant des bons du Trésor américain à long terme, en vertu de la théorie du portefeuille, selon laquelle cela va nécessairement entraîner une réallocation des portefeuilles au profit d'obligations à long terme ou d'actions ; mais cette théorie, si intéressante qu'elle soit, ne se vérifie jamais complètement.

S'agissant du financement d'emplois longs par des ressources courtes, on connaît le cas d'AIG, dont la filiale d'activités sur dérivés refinançait des encours à dix ans au jour le jour : le désastre se compte en centaines de milliards de dollars. Quant à Freddie Mac et Fannie Mae, le rapport de la Federal Housing Finance Agency conclut qu'après avoir reçu 148 milliards de dollars du Trésor public, il leur faudra encore entre 221 à 363 milliards de dollars. Autrement dit, ces deux organismes publics, audités par le Congrès des États-Unis, vont coûter au total au moins 500 milliards de dollars aux contribuables américains !

En ce qui concerne les ratios, il faut d'abord s'entendre sur ce qu'est une banque. En France, nous avons une loi bancaire qui, en schématisant, prévoit que si l'on prête de l'argent on est une banque. Aux États-Unis, les banks ne sont pas forcément des banques : une grande partie d'entre elles dont l'activité les conduirait, en France, à être condamnées pour exercice illégal de la profession de banquier, brassent des centaines de milliards de dollars sans que personne ne dise rien. Le Comité de Bâle fixe de nouveaux ratios extrêmement exigeants, pleinement satisfaisants, qui vous obligeront soit à augmenter votre capital – et donc à répondre aux exigences des actionnaires –, soit à restreindre vos crédits. Mais si on n'applique pas les mêmes règles aux États-Unis, et si l'Europe continue à réglementer les banques sans se préoccuper de ce qui se fait en dehors d'elles – et qui tient d'ailleurs une place beaucoup plus importante hors d'Europe –, son action n'aura abouti qu'à punir les plus vertueux et à encourager ceux qui le sont le moins ! En Europe en général, et en France en particulier, nous ne nous défendons pas assez. Il faut dire aux Français que parce qu'ils ont voulu réglementer les banques, ils auront moins de crédit ou un crédit plus cher, sans avoir pour autant enrayé la spéculation – car une masse de liquidités qui ne s'emploie pas dans l'inflation alimente nécessairement la spéculation.

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