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Intervention de Jean-Pierre Brard rapporteur spécial pour la direction de l'action du Gouvernement

Réunion du 8 novembre 2010 à 15h00
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des affaires culturelles et de l'éducation, commission des affaires économiques, commission du développement durable et de l'aménagement

Jean-Pierre Brard rapporteur spécial pour la direction de l'action du Gouvernement, les publications officielles et l'information administrative :

Merci, monsieur le président, pour cette promesse de dialogue direct et vivant avec le ministre. La tâche de celui-ci est rendue ardue car, comme le président l'a rappelé, le ministre n'est pas directement maître d'oeuvre : il est obligé de défendre des actions qu'il n'a pas lancées lui-même. Bref, il est obligé de couvrir ces actions sans être responsable du service après-vente.

En préalable, je note avec satisfaction que le taux de réponse des services aux questions que nous leur avons posées est de 97 %. Si elle ne permet de préjuger la qualité des réponses, cette proportion est le signe certain du zèle démocratique des services concernés et leur respect pour le Parlement.

Deux institutions font exception à cette règle et ne semblent pas vraiment concernées par le travail du Parlement : la Commission supérieure de codification et la Commission des archives constitutionnelles de la Cinquième République. La raison en est-elle la faiblesse de leur activité ? Faut-il y voir au contraire un souhait de ne pas s'expliquer sur elle ? En tout cas, le caractère répété de ce comportement mérite les représentation d'usage.

Monsieur le ministre, j'évoquerai successivement cinq des questions qui relèvent du champ du rapport spécial que j'élabore : la maquette budgétaire, les crédits des cabinets ministériels, le service d'information du Gouvernement (SIG), la direction de l'information légale et administrative (DILA) et enfin les autorités administratives indépendantes. Pour les autres éléments, je renvoie au projet de rapport, qui formule sur eux aussi analyses et propositions.

Le nouveau programme 333, « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées » est critiquable à plus d'un titre : d'abord, il se rapporte à titre principal à l'administration territoriale de l'État et non aux services du Premier ministre.

Ensuite, il regroupe exclusivement des moyens de fonctionnement de titre III des directions départementales interministérielles (DDI). Les crédits de rémunérations correspondants, qui devraient normalement aussi y figurer, sont inscrits au programme 129, « Coordination du travail gouvernemental ».

Cette dissociation des crédits d'effectifs déconcentrés, rattachés au programme 129, et des moyens de ces administrations déconcentrées, inscrits au nouveau programme 333, a pour effet d'augmenter la masse de crédits de rémunérations fongibles pouvant être redéployés au profit des cabinets ministériels.

Un amendement a été déposé pour remédier à cette situation, en regroupant sur le programme 333 l'ensemble des crédits prévus, au sein de la mission, pour les secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR) et les DDI. Quel est le point de vue du Gouvernement sur cet amendement ?

Malgré notre persévérance, notre ardeur et notre curiosité, nous avons de la peine à obtenir des informations exhaustives sur les crédits des cabinets ministériels.

Certes, le fascicule « jaune » annexé au projet de loi de finances présente l'intégralité des effectifs des cabinets – pour le Premier ministre, au 1er juillet 2010, 498 personnes. Toutefois, en matière de rémunérations, il faut distinguer trois agrégats.

Le fascicule « jaune » n'indique les rémunérations, estimées par extrapolation, que pour les personnels détachés sur contrat ou recrutés sur contrat : 71 personnes sur 498, et 3,49 millions d'euros. C'est le premier agrégat.

Le deuxième agrégat est constitué par la récapitulation, dans la réponse au questionnaire budgétaire, des dépenses en 2009 et des prévisions pour 2010 pour l'ensemble des cabinets payés dans le cadre du programme 129. Il s'agit donc des membres des cabinets sous contrat – premier agrégat – ou mis à disposition du cabinet au sein des services du Premier ministre – rémunérés dans le cadre du programme budgétaire –, mais non des agents rémunérés dans le cadre d'autres programmes, qui sont mis à disposition.

Au cabinet du Premier ministre, l'effectif de ces collaborateurs est, au 1er juillet 2010 de 246 personnes sur 498, pour une dépense totale de 29,9 millions d'euros en 2009 et de 23 millions du 1er janvier au 30 septembre 2010.

J'en viens au troisième agrégat. Les rémunérations des 252 personnels mis à disposition et relevant d'autres programmes budgétaires au 1er juillet 2010 , soit plus de la moitié de l'ensemble, ne sont recensées nulle part. Pourtant, ces personnes ne vivent pas de l'air du temps ! Leur rémunération doit bien être inscrite quelque part !

En conséquence, le fascicule « jaune » relatif aux effectifs des cabinets ministériels est à peu près sans aucun intérêt pour appréhender les montants réels des rémunérations – 71 agents sur 498 pour le cabinet du Premier ministre –, et donc les coûts des cabinets ministériels. Ce document devrait être utilement complété par des éléments précis sur les rémunérations des agents employés par les cabinets ministériels quelle que soit leur catégorie, c'est-à-dire qu'ils soient contractuels, mis à disposition, ou encore affectés par l'administration.

Un amendement a été déposé pour remédier à cette situation. Quel est le point de vue du Gouvernement sur celui-ci ? Peut-on espérer que le fascicule « jaune » qui sera joint au projet de loi de finances pour 2012 comportera des informations sur l'ensemble des rémunérations des cabinets ministériels ?

On parle beaucoup de remaniement ministériel, mais je souhaite que vous restiez afin d'avoir un garantie d'obtenir des réponses aux questions que je pose. Quoi qu'il en soit, si nous n'obtenons pas ces informations, nous irons les chercher sur place – que les personnes concernées gardent en permanence leurs fiches de paye sur elles. Cependant, même si établir la liste des montants des rémunérations de 498 personnes ne doit pas être si difficile, je préfèrerais, ayant un emploi du temps quelque peu chargé, ne pas devoir réaliser ce travail moi-même.

J'en viens maintenant au Service d'information du Gouvernement. Je précise à ce sujet que la Cour des comptes a transmis à la commission des finances un référé concernant le contrôle de la gestion du SIG.

Avec la nomination de M. Thierry Saussez à sa tête en avril 2008, à l'initiative manifeste de la présidence de la République, le SIG a connu une transformation, voire une transmutation. Ses moyens ont été considérablement accrus par la loi de finances initiale pour 2009.

Pour dire vrai, tout se passe comme si M. Saussez connaissait assez mal les usages de l'appareil d'État. Alors que le SIG devrait être subordonné au Secrétariat général du Gouvernement, l'impression est que, d'une certaine manière, M. Saussez est un électron libre échappant aux lois universelles de la physique. Peut-être de l'ordre devrait être remis. Peut-être aussi l'origine de cette situation pourrait-elle être trouvée dans l'opacité des modalités de la nomination de M. Saussez. En effet, on n'a pas l'impression que c'est une initiative spontané du Premier ministre que de l'avoir pris à ses côtés, mais peut-être que ce que je dis n'est que pur fantasme.

Il semble que les marchés d'études et de sondages soient peut-être parfois passés non sans quelque liberté avec le code des marchés publics et exécutés – pour user d'une litote – avec des éléments de souplesse non prévus par les règles de la comptabilité publique. Notre collègue Michel Diefenbacher ici présent n'aurait, je crois jamais toléré de telles méthodes dans les départements dont il a été préfet. En particulier, les règlements ont lieu sur attestation du service fait sans que le SIG soit toujours à même de communiquer des éléments matériels justifiant le paiement, dans un contexte de faible supervision par le secrétariat général du Gouvernement et de vigilance allégée du comptable.

Le SIG aurait par ailleurs failli dans sa tentative de coordonner et centraliser l'ensemble des dépenses de communication du Gouvernement, qu'il s'agisse des dépenses d'analyse de l'opinion – études et sondages – ou de celles portant sur la communication en direction des Français. Il existe toujours une dispersion de la communication gouvernementale – dont bénéficient peut-être des agences qui peuvent aisément cumuler des contrats d'un ministère à l'autre, sans que l'on ait une connaissance exacte de l'ensemble des marchés attribués par bénéficiaire.

Si ces propos ne sont que pure hypothèse, c'est l'absence de transparence qui permet de les formuler. J'espère qu'on pourra nous démontrer qu'ils ne sont pas fondés. Quelles mesures ont été prises pour mettre fin à ces errements ? Le départ de M. Saussez est annoncé dans les gazettes. Peut-on avoir connaissance de l'ensemble des dépenses de communication réalisées par les structures étatiques en 2009 et 2010 pour des travaux d'analyse de l'opinion et de communication en direction des Français, ainsi que des bénéficiaires des marchés en question ?

Je serai beaucoup plus bref sur la direction de l'information légale et administrative (DILA). En effet, grâce aux informations que nous lui demandons – et que nous obtenons très facilement –, nous connaissons bien son action, sous la direction de M. Xavier Patier.

La fusion de la direction des Journaux officiels et de la direction de la Documentation française été concrétisée au premier semestre 2010. Il faut maintenant consolider les parts de marché de la DILA au sein de l'administration, en diminuant la sous-traitance, y compris pour l'activité de l'ancienne Documentation française, et en rapatriant à la DILA une part plus importante de l'activité d'impression de l'État. Où en sommes-nous ? Nous admettons bien volontiers qu'une telle action doit être organisée dans la durée. Elle n'est du reste pas forcément toujours pertinente, l'activité d'impression de certains ministères, comme celui de l'éducation nationale, étant considérable.

La question des autorités administratives indépendantes (AAI), chères à Richard Mallié, est régulièrement posée du fait d'amendements tendant à diminuer leurs crédits. La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, est particulièrement visée.

Le très récent rapport du Comité d'évaluation et de contrôle s'interroge à son tour sur le périmètre et la légitimité des AAI, la rigueur qui doit être mise enoeuvre dans leur gestion, et l'intérêt de les placer sous la protection du Parlement. Il préconise de procéder en urgence à leur rationalisation, notamment au regroupement fonctionnel de plusieurs d'entre elles. Malgré la présence d'experts en leur sein – mais qui définit la qualité d'expert –, la multiplication de ces autorités ne serait-elle pas une forme de démantèlement de l'État ?

Quel est le point de vue du Gouvernement sur l'avenir des AAI et les amendements tendant à réduire leurs crédits ?

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